Romain Weber, prévisionniste à Lyon Météo, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Alors que la région lyonnaise suffoque sous des températures inédites pour un mois de juin, l’émission 6 minutes chrono donne la parole à Romain Weber, dirigeant et prévisionniste à Lyon Météo. À la veille d’un nouvel épisode caniculaire, il alerte sur une tendance de fond : des étés de plus en plus chauds et secs, qui débutent désormais dès le mois de juin.
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"On n’en a pas fini avec la chaleur", prévient Romain Weber. Difficile encore d’avoir une vision très précise de l’ensemble de l’été, mais les modèles saisonniers annoncent d’ores et déjà une tendance lourde : un été plus chaud et plus sec que la normale. "On risque d’avoir un été assez chaud dans l’ensemble", confirme le météorologue, qui anticipe déjà un pic de chaleur autour du mercredi 25 juin, avec des températures attendues entre 37 et 39 degrés. "Clairement il y a le record mensuel du mois de juin qui est en jeu puisqu'il est de 38,4 degrés donc à voir si on le bat ou non."
Un phénomène qui ne surprend plus vraiment les observateurs réguliers du climat régional. Ce qui inquiète davantage, c’est la répétition. "Ce qui est un petit peu moins normal, c’est la récurrence de cette chaleur. On a quasiment plus de périodes de frais", note Romain Weber. Le mois de juin, censé être une transition entre printemps et été, est désormais pleinement estival : "On peut dire que le mois de juin fait clairement partie de l’été, en termes de température."
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Des canicules précoces, signes du changement climatique
Les fortes chaleurs précoces en juin, encore très rares avant les années 2000, deviennent de plus en plus fréquentes. "Il n’y a jamais eu [de canicule en juin] avant les années 2000. Et depuis, 2000 il y en a eu six ", rappelle Romain Weber. Il rappelle les épisodes marquants de 1947 ou 1987, mais ceux-ci restaient ponctuels. Aujourd’hui, le phénomène s’installe durablement.
Pour autant, le prévisionniste nuance : "Je ne veux pas dire non plus que c’est inquiétant, mais c’est quand même embêtant, notamment pour les personnes fragiles, pour la végétation, pour la faune, la flore." La chaleur ne vient pas seule : sécheresse superficielle des sols, stress hydrique pour les animaux, pics de vent qui accélèrent l’assèchement... Tous les signaux convergent vers un bouleversement durable du climat régional.
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Une météo de plus en plus locale
Face à ces enjeux, les collectivités s’organisent. Lyon Météo, la structure dirigée par Romain Weber, vient de signer un partenariat avec Vienne Condrieu Agglomération, sa 15e collectivité partenaire. "Ça va être de l’alerte, faire des alertes précises par commune ou collectivité", explique-t-il. Le service fournit aussi une assistance météo pour la gestion de l’événementiel ou des espaces verts, l’installation de stations météo locales, et même l’optimisation de l’arrosage.
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Plus de détails dans la vidéo :
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La retranscription de l'émission avec Romain Weber :
Bonjour à tous, bienvenue dans l'émission 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction de Lyon Capitale. Aujourd'hui, on va parler de météo. Lyon enchaîne les températures extrêmes depuis plusieurs jours, et pour en parler, nous sommes connectés avec Romain Weber, qui est dirigeant et prévisionniste à Lyon Météo. Bonjour Romain Weber. On va rentrer dans le vif du sujet. Est-ce qu’on va brûler comme ça tout l'été ? C’est une question un peu de prévision : quelles sont les perspectives pour l'été, enfin les prochains mois, donc juillet-août à ce stade ?
Bonjour. Alors, il est assez difficile quand même de faire des tendances à long terme. Globalement, les modèles saisonniers voient un été plus chaud et plus sec que la normale. Donc on risque d'avoir un été plus chaud que la normale, donc assez chaud dans l'ensemble. Je ne peux pas rentrer dans les détails, ça ne veut pas dire qu'il ne pourra pas y avoir quelques semaines un petit peu plus fraîches ou orageuses. En tout cas, on est sous la menace d'une nouvelle canicule à partir du week-end prochain, jusqu'à mercredi prochain éventuellement. Donc on n'en a pas fini avec la chaleur.
D'accord. Est-ce qu'on peut un petit peu parler des causes aussi ? Pourquoi, alors ce n’est pas propre à Lyon, mais pourquoi est-ce que la France, d’un point de vue météorologique, connaît cette vague de chaleur ? D'où vient cette chaleur ?
On est situé dans un flux de sud à sud-ouest, donc on a de la chaleur qui remonte directement d'Afrique du Nord, directement sur le pays pendant plusieurs jours.
C’est fréquent, c’est normal par rapport aux moyennes qu'on a sur les dernières années ? Je ne sais pas quelle est la profondeur qu'on a sur les statistiques, mais est-ce qu'on est dans une échelle qui arrive fréquemment ou pas ?
Alors, c’est normal que de la chaleur remonte sur le pays, notamment à cette saison. Ce qui est un petit peu moins normal, c’est la récurrence de cette chaleur. On a toujours de la chaleur, on a quasiment plus de périodes de frais.
Mais parce qu'habituellement, le mois de juin, comment est-ce qu’il se caractérise en région lyonnaise, puisque c’est d’ici dont on parle ?
Alors, le mois de juin, on est censé avoir des températures entre 15 et 16 degrés le matin et entre 25 et 26 degrés l’après-midi. Donc c’est une transition normalement entre le printemps et l’été. Et là, maintenant, on peut dire que le mois de juin fait clairement partie de l’été intégralement, en termes de température.
Nos grands-parents, dans les années 60-70, je ne sais pas si vous avez ce recul, mais les étés étaient différents. Ces périodes caniculaires, où Lyon a connu des températures proches des 38 °C tout de même, au mois de juin, est-ce que c’est des choses qui arrivaient au moins ponctuellement, ou ça n’arrivait jamais ? Je ne sais pas si vous avez cela dans vos archives.
Alors, il y a eu des canicules dans le passé, notamment une grosse en 1987, c’était en juillet. Il y en a eu une en 1947 qui était aussi vraiment importante. Mais elles étaient très rares, ponctuelles, et souvent les étés étaient frais, ou ça ne durait pas longtemps. En revanche, au mois de juin, c’est très très rare qu’on ait des canicules. Il n’y en a eu que six, il me semble, depuis les années 2000. Il n’y en a jamais eu avant les années 2000 en juin. Donc la récurrence au mois de juin est de plus en plus inquiétante.
Pour vous, c’est un sujet d’inquiétude en tant que météorologue, prévisionniste ? Ce n’est pas quelque chose qui vous laisse indifférent ?
Je ne veux pas dire non plus que c’est inquiétant, mais c’est quand même embêtant, notamment pour les personnes fragiles, pour la végétation, pour la faune, la flore. Ce sont des choses qui sont quand même embêtantes puisque, de base, tout n’est pas adapté au changement du climat actuel.
Oui, forcément, la sécheresse n’est pas que dans les villes. Il y a aussi la végétation, et même le bétail, je crois, qui connaît des stress hydriques et qui n’est pas physiologiquement adapté, finalement, à cette forte chaleur. Et ça crée aussi des problèmes dans le monde rural. J’aimerais qu’on parle un petit peu des sécheresses. Ce n’est pas forcément un angle qu’on aborde souvent au moment des canicules, mais il y a aussi un taux d’humidité très faible, ou beaucoup de vent. Comment ça se caractérise, ces périodes de sécheresse dans la canicule ?
Alors, ce n’est pas parce qu’on est en canicule qu’on est forcément en sécheresse. Ce sont vraiment deux phénomènes qui sont différents. Là actuellement, on ne peut pas dire qu’on est en période de sécheresse. On a eu l’avantage d’avoir pas mal de pluie ces derniers mois, donc les nappes phréatiques sont à des niveaux corrects. Elles sont forcément en train de baisser, c’est normal en cette saison. On commence à avoir une sécheresse superficielle des sols qui arrive, liée aux fortes chaleurs, et elle va s’accentuer au fil des jours. Pour le moment, on n’a pas trop de vent, donc ça n’assèche pas trop la végétation. Mais on va avoir un pic caniculaire mercredi, avec un vent du sud qui va mettre un bon coup d’accélérateur sur la sécheresse des sols.
Ce mercredi, d’ailleurs, c’est combien qui est attendu à peu près en région lyonnaise ? Vous avez déjà quelques données à nous livrer ?
Alors, ça peut fluctuer, mais entre 37 et 39 degrés. Là, on va atteindre un pic caniculaire. Clairement, il y a le record mensuel du mois de juin qui est en jeu, puisqu’il est de 38,4 degrés. Donc à voir si on le bat ou non.
Voilà, c’est pour le mercredi 25 si je ne me trompe pas. En deux mots, vous venez aussi de signer – on va parler de votre actualité à vous – vous venez de signer un contrat avec Vienne Condrieu Agglomération, c’est la 15e collectivité avec qui vous signez. Est-ce que vous pouvez nous dire en quelques mots quels sont les services, les missions que vous rendez aux collectivités avec Lyon Météo ?
Alors, il y a plusieurs missions. Ça va être déjà de l’alerte : faire des alertes précises par commune ou par collectivité, et non à l’échelle du département comme c’est fait aujourd’hui par les préfectures. Ça va être une assistance aussi, si jamais il faut fermer les parcs ou non en raison de vent fort ou d’orage. Ça va être l’installation de stations météo pour avoir vraiment des données locales. Ça va être aussi l’aide à l’événementiel, si ces communes, par exemple, ont des événements à l’extérieur, pour les aider à s’organiser et savoir si elles peuvent le faire ou non. Et aussi pour la gestion de l’eau : gestion de l’arrosage pour optimiser l’arrosage et faire des économies d’eau.
Et parce que vous avez des données plus fiables, plus locales que, par exemple, Météo France ? Vous êtes une alternative qui permet de localiser au maximum, c’est cela ?
Ce ne sont pas forcément des données plus fiables, mais on va dire que c’est surtout un complément plus local. Météo France, aujourd’hui, a énormément de surfaces à gérer, il y a toute la France, clairement. Donc moi, c’est vraiment un complément, avec des prévisions qui sont plus fines à l’échelle locale.
Très bien, ce sera le mot de la fin. Merci beaucoup Romain Weber, on est déjà au bout des six minutes chrono. Quant à vous, chers téléspectateurs, merci d’avoir suivi cette émission. Vous pouvez trouver plus de détails sur la météo lyonnaise sur le site lyoncapitale.fr. Je vous dis à très bientôt.