Le vice-président au personnel et au budget de l'université Lyon 2 démissionne, se disant victime de "harcèlement" sur fond d'affaire Balanche.
"Ce choix a pour objet de faire baisser la pression très forte qui pèse sur l'institution et de protéger les intérêts de celle-ci dans le contexte particulièrement difficile qu'elle traverse." Lundi 5 mai, le vice-président en charge de personnel et du budget de l'université Lumière Lyon 2, Willy Beauvallet-Hadad a annoncé sa démission dans un courriel adressé à des membres de l'université.
Une décision prise "suite au harcèlement et à la campagne de dénigrement public dont je suis l'objet depuis plusieurs semaines en raison de prises de position personnelles relatives à la situation en Palestine et au Liban, elle-même en lien avec celle qui vise l'université Lyon 2 dans son ensemble et sa présidente en particulier" indique-t-il.
Un hommage à Hassan Nasrallah qui ne passe pas
En effet, un article publié sur le site d'Atlantico reprochait à Willy Beauvallet-Haddad un post publié sur ses réseaux sociaux à la mort de Hassan Nasrallah, ancien chef du Hezbollah. "Il est mort au milieu des siens pour la grande cause (palestinienne et arabe) et il a rejoint le panthéon de nos cœurs et des grands personnages de l'Histoire", écrivait ainsi le maître de conférence en science politique. Des propos que certains assimilent à de l'apologie du terrorisme.
Ces messages ont ainsi été exhumés alors qu'il a été reproché à la présidente de l'université de ne pas avoir suffisamment soutenu le maître de conférence et élu à Caluire-et-Cuire, Fabrice Balanche, dont un cours a été interrompu par des individus masqués aux cris de "racistes, sionistes, c'est vous les terroristes". Une action revendiquée par le groupe lyon2autonome, qui se réclame "anti-colon" et "anti-France". Il était notamment reproché à Fabrice Balanche de s'opposer à des ruptures de jeune lors du ramadan au sein de l'université, mais également ses prises de position sur la chaîne CNews dénonçant "l'islamo-gauchisme" à Lyon 2.
L'"affaire Balanche" est remontée jusqu'au sommet de l'Etat. Le Premier ministre François Bayrou avait dénoncé une "pression communautariste inacceptable". La ministre de l'Education nationale Elisabeth Borne avait soutenu l'universitaire lyonnais sur X : "Ce qui s’est passé à l’Université Lyon 2 le mardi 1er avril est inacceptable". Quant au ministre de l'Enseignement supérieur, il s'était fendu d'un communiqué de presse : "Rien ne peut justifier que des individus masqués et cagoulés menacent un professeur et le contraignent à interrompre son cours. Nous ne pouvons pas l’accepter et nous ne l’accepterons pas". Dans un entretien au Parisien, Philippe Baptiste avait ajouté qu'"interdire à un professeur de faire cours, c’est extrêmement grave. Ce sont des actes qui sont le contraire de ce que doit être l’université : un lieu de débat et d’ouverture."
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Des politiques réclament la démission de la présidente
Dans une interview accordée à nos confrères de Tribune de Lyon à la suite des ces évènements, la présidente de l'université Lumière Lyon 2, Isabelle Bueltzingsloewen a ainsi indiqué "ne pas avoir été étonnée" de l'interruption du cours de Fabrice Balanche, maître de conférence en géographie, en raison notamment de ses "positionnements sur Gaza". Si elle a déploré des "faits intolérables", la présidente de l'université a regretté auprès de nos confrères des "paroles affligeantes, complotistes et délétères pour l’université" de Fabrice Balanche.
Des propos qui ont suscité l'ire d'une partie de la classe politique, notamment à droite. Jugeant sa réaction "inadmissible", le président LR de la région Auvergne-Rhône-Alpes Fabrice Pannekoucke et son prédécesseur devenu conseiller spécial, Laurent Wauquiez, ont demandé au ministre de l'Enseignement supérieur une mission d'inspection sur "les dérives préoccupantes" au sein de Lyon 2. Dans la Métropole de Lyon, le maire LR de Bron, Jérémie Bréaud a lui aussi appelé à la démission de la présidente de Lyon 2 après avoir reçu Fabrice Balanche, par ailleurs élu au conseil municipal de Caluire-et-Cuire.
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"Je continuerai de m'engager pour la pleine application du droit international et des droits des humains en Palestine et au Proche-Orient"
L'association France Universités qui regroupe des dirigeants d'établissements a au contraire apporté son soutien à Mme von Bueltzingsloewen "victime d'une polémique inacceptable et stérile sur les fantasmes de l'islamo-gauchisme et du wokisme à l'Université". Le maire de Lyon a également apporté son soutien à la présidente de l'université, tandis que le parquet de Lyon a ouvert une enquête sur les chefs de "menace de mort sur personne chargée d'une mission de service public et harcèlement en ligne", confiée aux policiers de la Division de criminalité territoriale (DCT).
"Je continuerai aussi de m'engager, avec le cœur et la raison, pour la pleine application du droit international et des droits des humains en Palestine et au Proche-Orient, sur les fondements anti-racistes et universalistes qui ont toujours été les miens", indique Willy Beauvallet dans son courriel. Et de conclure : "Nous ne pouvons demeurer impassible et sans voix face à ce qu'Amnesty international, parmi d'autres grandes organisations et institutions, qualifiait encore il y a quelques jours de "génocide en direct"."
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Le bras droit démissionne, lui reste le bras gauche, celui des potes !