Marché propre contre glanage

Mais ces grands sacs noirs sont les ennemis des glaneurs, qui ont désormais plus de difficultés pour faire leurs repas.

Nom de code : "Opération Marché propre". Objectif : Obliger les commerçants à jeter les "retraits de vente" dans des sacs poubelles et à entasser leurs cagettes vides à la fin du marché pour faciliter et accélérer le travail des éboueurs. Après plusieurs villes de l'agglomération, Lyon expérimente depuis juillet 2007 l'opération à la Croix-Rousse et quai Saint-Antoine.

Eviter que les détritus se répandent sur le bitume et que les sacs plastiques volent, tout le monde y est favorable. Problème : cette opération fait des victimes collatérales, les glaneurs. Par nécessité ou par choix, ces personnes fouillent à la fin des marchés dans les cagettes pour récupérer ici une pomme, là du raisin et là-bas une courge, laissés par le commerçant car invendables. Rencontrés à la Croix-Rousse, des glaneurs nous disent qu'ils ont de plus en plus de mal à opérer. "On doit désormais ouvrir les sacs poubelles. Les fruits et les légumes sont écrasés et mélangés à tous les autres détritus", nous explique une étudiante-glaneuse". Du coup, certains refusent de mettre la main dans les poubelles. Une question d'hygiène et de visibilité. "Avant, ce qu'il y avait à glaner étaient répartis tout le long du marché. Maintenant, les sacs sont rassemblés à quelques endroits. C'est plus stigmatisant", ajoute un chômeur-glaneur". D'autres ont promis de continuer. Parmi eux, ils sont quelques uns à avoir créé en novembre un "collectif de glaneurs et glaneuses" : "Même si la mairie veut aseptiser la ville en virant les prostituées, en interdisant l'affichage libre et empêchant le glanage, nous continuerons car pour nous la récup' est vitale. Nous encourageons donc la résistance face à ce dispositif. Nous-mêmes nous ferons des actions pour le faire savoir".

Marie-Odile Fondeur, conseillère municipale en charge des marchés, rejette en bloc l'idée que la Ville de Lyon pourrait faire de "Marché propre" une opération "anti-pauvre". Mais elle reconnaît toutefois quelques ratés. "On n'avait pas pensé aux glaneurs. Le fait qu'ils m'envoient un message sur mon blog nous a amené à rectifier le tir. On a revu le dispositif : les sacs poubelles servent uniquement pour les détritus. Parallèlement, les commerçants conservent quelques cagettes pour mettre leurs invendus".

Mais cette nouvelle consigne n'a pas été transmise aux commerçants. En discutant avec certains d'entre eux, nous les avons mis au courant des nouvelles dispositions municipales. Un primeur : "Il ne manquait plus que ça ! Déjà qu'on nous demande de mettre nos invendus dans les sacs poubelles, il faudrait qu'on les trie !" D'autres commerçants profitent de la quasi-absence de contrôles et continuent de mettre tous leurs invendus dans les cagettes. Pour le plus grands bonheur des glaneurs qui peuvent encore grappiller quelques fruits et légumes.

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