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Ça sent le roussi entre pâtés-croûte

Les championnats du France de pâté-croûte et d'Oreiller de la Belle Aurore ont lieu le même jour. La guerre froide est déclarée.

A ma droite, le championnat de France de pâté-croûte. Né à Lyon. 15e édition. Sous le haut patronage du Président de la République française. A ma gauche, le championnat de France de l'Oreiller de la Belle Aurore. 1er du nom. Et soutenu par la confédération nationale des charcutiers traiteurs.

Le pâté - quoi qu'il en croûte ! -, c'est un symbole de la charcuterie française. Un monument d'anthologie et de gourmandise. Pendant des années, cette pièce d'artillerie de la cuisine française était tombée au champ d'honneur. Fusillée sur l'autel de la nouvelle cuisine - ce mouvement du milieu des années 70 qui, telle une lame de fond, a tout balayé sur son passage, comme la cuisine fumée et à la braise, désormais de retour sur le devant de la scène, où le lièvre à la royale qui revient au galop, bref des plats furieusement rétro.

Comme dirait Bernard Pivot au sujet du beaujolais, le pâté-croûte est un plat de lutte des classes, des canuts et des rad-soc’s, de Gnafron et d’Édouard Herriot, des bleus de chauffe et des costumes-lavallière, des mâchons entre vieux potes et des déjeuners de famille, de la gauche-saucisson et de la droite-pot-au-feu.

Le pâté-croûte à la feuille d’or, canard, foie gras, cochon, ris de veau et poivre vert du chef nippon Taiki Mano, champion du monde 2024 de pâté-croûte. Instagram/ @championnatdumondepatecroute

Et, au zénith du pâté-croûte, il y a l'Oreiller de la Belle Aurore, l'un des plus illustres plats du patrimoine français. Un chef-d’œuvre bicentenaire pour lequel on cède volontiers aux superlatifs et aux envolées lyriques pour décrire le plaisir de l’avoir connu. Un goût pour la démesure, une architecture flamboyante et gothique, un tableau aromatique. Un plat "digne de la table des dieux" s’est exclamé, il y a des lustres, l’homme de lettres et journaliste Curnonsky, dont les trois syllabes sont devenues synonymes de gastronomie*.

* Dans la rubrique “Vue cavalière de la Principauté des Gastronomes”, Marianne n° 95 du 15 août 1934. Curnonsky est l’auteur d’un très novateur tour de France des cuisines régionales à l’heure de ce qu’il a appelé “la Sainte Alliance du tourisme et de la gastronomie”.

Jusqu'ici, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes charcutiers (et pâtissier, la recette étant, à l'origine pâtissière, pour la pâte). Jusqu'à ce qu'on apprenne, par voie de communiqué de presse, que la CNCT (pas la China National Tobacco Corporation, ni le Comité national du trait de côte du ministère de l'écologie), aka la Confédération nationale des charcutiers traiteurs a "le plaisir de vous convier au lancement du prestigieux concours "Championnat de France de l'Oreiller de la Belle Aurore", qui se déroulera le 5 novembre 2025 au CEPROC (Le Centre d’Excellence des Professions Culinaires), dans le 1er arrondissement de Paris."

L'invitation date du mercredi 29 octobre 11h43. Le même jour, à 13h33, soit 1 heure 50 plus tard, toujours par communiqué de presse, est annoncée la tenue de la sélection française du championnat du monde de pâté-croûte (rebaptisée, cette année, Championnat de France de pâté-croûte) qui aura lieu à La Samaritaine, dans le 19e arrondissement Paris. Soit 4,5 kilomètres à vol d'oiseau entre les deux championnats de France.

Côté pâté-croûte, dix-neuf candidats, dont trois Lyonnais (Laurent Bouvier, La Caborne, à Limonest, Clément Destrebecq, Bouchon Tupin, à Lyon et Stéphane Joffre de la Maison Crauser, à Lyon). Côté Oreiller de la Belle Aurore, vingt prétendants dont un seul lyonnais (Jérémie Crauser, de la Maison Crauser & Bello). Pour l'anecdote, Jérémie Crauser a été deux fois de suite 2e du championnat du monde de pâté-croûte. Il passe donc, cette année, à l'Oreiller de la Belle Aurore, tandis qu'un charcutier de la même maison reprend le flambeau du pâté-croûte classique.

Bref, la France est coupée en deux : les pro-croûte et les pro-oreiller. Autant dire que ça va finir en guerre de tranchée… pâtissière. Et, quoi qu'il en croûte, la France n'est pas couchée.

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