Lyon : piétonnisation de la Presqu'île ? Un grand “oui, mais”

La somme des intérêts particuliers ne fait pas l'intérêt général. C'est ce qui est ressorti ce mardi soir de la première réunion publique sur la piétonnisation de la Presqu'île.

Parmi la centaine de personnes présentes, tout le monde, ou presque, se dit “pour” cette piétonnisation de la Presqu'île. Pourtant, les allocutions se terminent souvent par un “mais”. Les associations de promotion du vélo sont pour, “mais” à condition de réaliser des axes structurants de voies cyclables. Les commerçants sont en majorité pour, “mais” ont peur pour leur chiffre d'affaires. “Et comment faire pour les clients qui viennent de loin en voiture ?”, questionne une créatrice. Les habitants de la Presqu'île sont aussi pour, “mais” est-ce la seule solution pour “apaiser le centre-ville ?” et réduire les nuisances et incivilités ? Les artisans qui se demandent comment ils interviendront dans cette zone sachant que l'augmentation des tarifs de stationnement à Lyon a déjà fait augmenter leurs coûts de “3 à 12%” ?

“Vivre dans une zone piétonne, ce n'est pas synonyme de paradis”

Les deux maires des arrondissements concernés ont eux aussi accueilli favorablement ce projet. Dans le 1er, Nathalie Perrin-Gilbert a salué l'initiative “mais” a demandé l'extension au bas des Pentes et s'est inquiétée d'une uniformisation de la Presqu'île en faveur des grandes chaînes et au détriment des petits commerçants à l’image de ce qu’il se passe rue de la République. Denis Broliquier, dans le 2e, “approuve la démarche”, mais demande de la “lisibilité et des moyens”. “Rien ne doit non plus être idéalisé. Vivre dans une zone piétonne, ce n'est pas synonyme de paradis. Il y a de la fréquentation, une absence de stationnement, des squats de punk à chiens, etc.”, a-t-il tempéré. À chacun son inquiétude légitime.

Pas d’évolution de la Presqu’île “depuis 1978”

La concertation va durer sept mois et la première expérimentation aura lieu un samedi, fin septembre. “Le projet va pouvoir évoluer, rien n'est figé. Le but est d'écouter tout le monde, mais si à un moment donné il n'y a personne pour dire on y va, rien ne se fait. Il faut prendre un risque et j'assume ce risque. Maintenant, il va falloir évaluer et discuter”, explique David Kimelfeld. “C'est une étape de transition au regard de l'évolution de nos villes de manière générale. Depuis 1978 et l’arrivée du métro A, le cœur de la Presqu’île a connu très peu d’évolution de son espace public. Aujourd'hui, la part de la voiture diminue dans la circulation, c’est le bon moment pour faire évoluer le centre-ville”, a abondé son adjoint à l'Urbanisme, Michel Le Faou.

Piéton ? Vous avez dit piéton ?

Mais ce projet de piétonnisation n'a pour le moment de piéton que le nom. Trois scénarios ont été présentés ce mardi soir. Trois plans, pas définitifs, qui proposent trois visions plus au moins ambitieuses de la démarche. Des Terreaux jusqu'à Bellecour, une zone de trafic limitée à certains véhicules à définir (bus, taxis, résidents, clients d'hôtels, etc.) sera mise en place. Selon les différents plans, les rues 100% piétonnes seront plus ou moins étendues. Dans le plan A, seules les rues piétonnes actuelles le seront à 100%. Les autres rues seront des “espaces de rencontre” où cohabiteront voitures sur la chaussée et piétons sur les trottoirs. Le trafic serait réduit de 40% selon les études du Grand Lyon. Le Plan B un peu plus ambitieux ajouterait quelques rues piétonnes au projet. Enfin le plan C, le plus audacieux, rendrait 100% piétonne une bonne moitié de la Presqu'île à l'exception du quartier Grolée, des rues de Brest et Édouard Herriot et de quelques rues côté Saône. Dans ces artères, il subsisterait du stationnement de surface et du trafic des véhicules autorisés. Avec cette dernière hypothèse, le nombre de places de parking en surface supprimées serait de 280 sur les quelque 1500 de la Presqu'île. Dans le public, certains Lyonnais se sont étonnés du décalage entre l'annonce d'une piétonnisation qui semblait totale et des projets présentés. David Kimelfeld donne lui ses faveurs au plan C.

“Un sujet casse-gueule”

Le président de la métropole a surtout insisté sur “l'importance de la concertation”. Mais comme les promesses, elles n'engagent que ceux qui y croient... Et beaucoup de militants associatifs présents “n’y croient plus”. “Les élus nous ont souvent habitués à faire des concertations après décision”, ironise Bernard Colombaud, président du Comité d’intérêt local Centre Presqu’île (CPI).

David Kimelfeld insiste sur “l’importance de la méthode” et assure “s'attendre à prendre des coups” sur un sujet qu'il estime “casse-gueule”. “Si l'expérimentation marche, on ne dira pas forcément qui l'a proposée… alors que si ça ne marche pas, on saura qui viser”, a conclu celui qui est candidat à la présidence du Grand Lyon en 2020.

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