Coronado : le théâtre noir de Dennis Lehane

Reprise, en partenariat avec Quais du polar, d’une pièce saisissante sur l’envers du rêve américain. Les antihéros de Dennis Lehane (Mystic River, Shutter Island) prennent vie et verbe (violent). À la mise en scène, les Lyonnais Colas et Mathias Rifkiss.

C’est une galerie de personnages floués par le destin, condamnés à végéter dans des vies sans relief, entre bitures, lignes de coke et sexe sans joie que dépeint Dennis Lehane dans sa première pièce de théâtre, Coronado, un de ces polars sombres et poisseux dont il détient le secret. Deux jeunes amants qui projettent un crime, une patiente à la conscience encombrée qui séduit son psychiatre, un père borderline et son fils, ancien taulard rongé par le mal-être et le regret de sa fiancée disparue... L’auteur de Mystic River ne craint pas de flirter avec le sordide. D’autant qu’ici, comme l’amour ne suffit plus à apporter un peu d’idéal, c’est le crime qui prend le relais. Surtout s’il permet de se débarrasser d’un mari encombrant en sus de récupérer quelques dollars.

L’action progresse par à-coups souvent brutaux au sein des différents couples formés par les personnages. Le suspense est savamment entretenu entre les différents projets criminels qui prennent forme, et le passé, pas plus reluisant que le présent, qui remonte à la surface. Ceci au cours de conversations marquées par la violence et la crudité du langage. Jusqu’à l’explosion finale qui nous empoigne à la gorge.

Grands amateurs de cinéma américain, notamment celui de Tarantino, Colas et Mathias Rifkiss signent avec cette adaptation un spectacle efficace et rythmé. Les scènes deviennent de véritables plans-séquences, isolés par le pinceau lumineux des projecteurs. Les antihéros de Lehane, emblématiques de l’échec dans l’Amérique provinciale, sont incarnés par une distribution jeune et talentueuse. Tous s’emparent de leur rôle avec un réalisme intense. Se détachent Mathieu Besnier en chien fou, Carl Miclet en désespéré et Marianne Pommier en irréductible séductrice.

Coronado, de Dennis Lehane. Du 3 au 6 avril à 20h et dimanche 7 avril à 16h, au théâtre de l’Iris (Villeurbanne).