À mi-mandat, le Modem se cherche un avenir

MoDEM – Le Modem autonomiste. Non, ce n’est pas un mouvement corse. Mais c’est la réalité lyonnaise du parti de François Bayrou qui se débat depuis 2008 pour être audible. Son leader, Eric Lafond, présente ce jeudi un bilan de mi-mandat de Gérard Collomb aux allures de tract électoral. Après 2012, il y a 2014 et ça se prépare aujourd’hui.

À Lyon, le Modem est une blague politique. Une plaisanterie qui n’a que trop duré aux yeux de quelques irréductibles réunis autour d’Éric Lafond et qui tentent, vaille que vaille, de faire exister un centre autonome dans une ville qui en fut la capitale : d’Édouard Herriot à Raymond Barre en passant par les présidents de région Charles Béraudier, Anne-Marie Comparini ou Charles Million dont on tend à oublier qu’il a été à l’UDF avant ses tentations frontistes. Les centristes lyonnais sont à la fois sans héritage et sans héritiers.

Le ministre-président du conseil général, Michel Mercier, s’est mué au fil des ans bien en simple ami de François Bayrou bien plus qu’en animateur chevronné d’un mouvement politique. Celui qui se réclame encore le mieux du centre dans cette ville est sans doute Gérard Collomb. Paradoxe. En draguant quelques-uns de ses principaux responsables (Gilles Vesco, Anne-Sophie Condemine, Thomas Rudigoz), le maire de Lyon est d’ailleurs le principal artisan de l’affaiblissement du Modem à Lyon.

Depuis 2008 et les dernières municipales, le parti de François Bayrou n’en finit plus d’animer les campagnes électorales versant tragi-comédie. À l’époque, le Modem avait éclaté en trois familles : le Modem de droite, le Modem de gauche participant à la majorité municipale, et le Modem du centre symbolisé parfois jusqu’à l’ennui par Eric Lafond.

Chef autonomiste

Irréductible chef autonomiste, Éric Lafond est un homme sérieux. Trop sérieux même. Besogneux, il travaille ses dossiers, présente des alternatives (les réserves d’eau dans les trémies de la rue Garibaldi, c’est lui), tente de préserver la cohérence et l’existence même d’une force centriste à Lyon quand certains de ses amis vont à la soupe, à la course aux places ou bordélisent, façon Azouz Begag, totalement la stratégie du parti comme lors des dernières élections régionales. Même avec ça, Eric Lafond ne dit du mal de personne, n’a pas la petite phrase assassine facile et parle toujours de cette voix mezza vocce qui oblige toujours son interlocuteur à tendre l’oreille pour écouter celui que François Bayrou n’a précisément jamais voulu entendre.

Fidèle et laborieux, Éric Lafond n’est même pas payé en retour par le patron du Modem qui ne lui aurait jamais fait vraiment confiance. "Je n’ai pas les moyens de résoudre les problèmes" dit sobrement M. Lafond qui concède que le Modem est sans doute "le plus jacobin des partis politiques". Comprendre : façonner pour le destin d’un seul homme, François Bayrou. Les situations locales n’auraient dés lors que peu d’importance comme en témoigne le sacrifice qu’ont été les élections cantonales dans lesquelles le Modem n’a quasiment pas présenté de candidats en France. Mais Éric Lafond ne baisse pas les bras.

Logique de rayonnement

À la mi-mandat de Gérard Collomb, il a tenu à faire le bilan du début de mandat de la politique socialiste lui qui ne siège dans aucune assemblée de la métropole : ni à la ville, ni au Grand Lyon, ni au Département ou à la Région. "Le rayonnement de la ville s’est imposé comme l’alpha et l’omega de toutes les politiques mises en œuvre sur le territoire de Lyon et de l’agglomération. Il se traduit par une course au visible (événements), à la taille (projet métropole) et détermine les choix pour le développement économique du territoire. Ce faisant, il impacte négativement les autres politiques telles que l’éducation, la sécurité, le développement durable, et la qualité de vie qui reculent dans l’ordre des priorités" écrit-il dans un document de dix pages qu’il doit présenter lors d’une conférence de presse ce jeudi midi.

Pour le leader du Modem lyonnais, la politique du maire de Lyon se fait au détriment des services de proximité comme le manque de places dans les cantines ou dans les crèches. "Le fameux adage des Verts : penser global, agir local. Nous, au Modem, nous avons la prétention de l’inscrire dans la réalité" avance-t-il.

Pré-programme électoral

Dans cette note aux allures de pré-programme électoral municipal, il passe au crible avec son « équipe » neuf domaines qui vont de la désertification médicale du centre-ville à la politique du logement qui ne prend pas en compte le vieillissement de la population en passant par la politique culturelle qui fait la part belle aux grandes institutions au détriment de la créativité. "Lyon n’est plus depuis longtemps un lieu de création théâtrale, et les troupes locales malgré leurs efforts et leurs programmations souvent originales sont réduites au minimum. Le théâtre du Point du Jour a failli disparaître, celui des Marronniers est en difficulté" écrit-il. "La politique municipale favorise une culture d’élites. Que sont devenus l’industrie du jeux vidéo à Lyon qui en était la capitale, comment se porte les petites troupes de théâtre et quelle est la situation des musiques actuelles où pas grand chose n’est fait en dehors des Nuits Sonores qui sont là aussi un grand événement" fustige Éric Lafond.

Sur la politique économique, fierté de Gérard Collomb et consacrée par pléthores de publication et de classements de cabinet d’études, le Modem critique une vision archaïque de la politique consistant "à attirer les sièges sociaux des grands groupes. Or, c’est une politique des années 80. Ça ne crée pas d’emplois. Le modèle lyonnais ne crée en réalité pas plus d’emplois que dans les autres métropoles françaises" juge M. Lafond. En élaborant ce bilan de Gérard Collomb, le Modem fait la démonstration de sa maîtrise des dossiers. Mais l’enjeu pour le parti du centre est de ne pas répéter les divisions du passé. C’est la partie la moins aisée. Et le chantier n’est pas encore lancé.

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