© Ed Cook

Nuits de Fourvière : The Libertines, assagi ?

Parmi les reformations impossibles à imaginer, il y a celle de Libertines, rongé par des conflits d’ampleur bibliques et les addictions de sa star Pete Doherty. C’était sans compter sur la toute aussi improbable résurrection de l’enfant terrible du rock anglais, reconverti en sage Normand.

Difficile d’imaginer qu’on reverrait un jour les Libertines sur scène. Et surtout que Pete (devenu Peter) Doherty finirait par se calmer et apaiser ses démons pour reprendre une vie normale qui permettrait au groupe qui les révéla, lui et son compère Carl Barât, de se reformer pour le plus grand bonheur de fans qui avaient 20 ans il y a… 20 ans.

L’épisode le plus emblématique des frasques psychédéliques de Doherty reste ce passage où, exclu d’une tournée du groupe pour cause d’usage exagéré de stupéfiants, il trouve le moyen de cambrioler le domicile de Barât. On ne fait guère mieux pour construire une légende. Et détruire, par la même occasion, un groupe en pleine bourre depuis un premier album dévastateur. Mais Barât vient chercher Doherty à sa sortie de prison et ils donnent un concert le soir même qui restera dans les mémoires.

Le groupe se séparera mais seulement après un deuxième disque enregistré pour ainsi dire à coups de poing. Puis un troisième, inspiré par Wilfred Owen et Rudyard Kipling (Doherty a des défauts mais c’est un vrai connaisseur de poésie) après une reformation en 2015, laquelle ne durera pas. Doherty, un temps lavé de ses addictions, replonge. On raconte qu’en 2017, lors du Sgt. Pepper Live à la Philharmonie de Paris auquel Doherty et Barât participent tous deux (en compagnie de Supergrass et Ed Harcourt notamment), les coulisses se transforment en dessin animé de Tex Avery, dans lequel Doherty tente de s’échapper de l’hôtel où tous résident pour aller quérir son illicite pitance. Y compris quand Barât et consorts l’y enferment à clé. Une nuit il disparaît corps et biens.

Sur scène, lors de ce show, il a l’air, au pire, d’un mort-vivant, au mieux, d’un fou. Pourtant, même déchiré, il n’en reste pas moins déchirant. Oui, mais voilà, aujourd’hui, c’est un quasi-miracle, Doherty est rangé de tout cela et, on le croit, définitivement. Il est devenu une espèce de sage augmenté (autrefois sec comme un coup de trique, il arbore désormais une silhouette façon Marlon Brando tardif) et enregistre de jolis disques en solo en mangeant du camembert par-dessus la falaise d’Étretat, où il vit.

C’est cette cure de sobriété qui permet aujourd’hui à ce groupe météore, ancien “nouveau sauveur du rock” parti en fumée, d’avoir renoué avec la production discographique avec le très efficace All Quiet On the Eastern Esplanade. Puis de remonter sur scène pour donner aux fans ce qu’ils attendent le plus : ses irrésistibles Can’t Stand Me Now ou Don’t Look Back Into the Sun. Reste à savoir ce que les années et la sagesse auront fait de l’énergie punk d’un groupe qui, jadis, se nourrissait surtout du chaos. Imagine-t-on un remake de Jurassic Park avec un T-Rex végétarien ?

The Libertines – Le 10 juillet au théâtre antique de Fourvière

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