La langue de Pantagruel ressuscitée au TNP

Benjamin Lazar et Olivier Martin-Salvan reviennent au TNP, pour donner à entendre la richesse de la langue de Rabelais.

C’est sous un pseudonyme rieur (Alcofribas Nasier, anagramme de François Rabelais) qu’un prêtre catholique controversé, médecin mais également penseur et écrivain humaniste, publie en 1532 son premier ouvrage non scientifique : Pantagruel. L’usage du pseudonyme, qu’il utilisera aussi pour Gargantua, souligne son désir de ne pas confondre ses ouvrages savants et ses fantaisies gigantales : “Un savant médecin ne pouvait inscrire son nom sur la couverture d’un ouvrage si peu sérieux.”

Mais, sous ses airs de farce, Pantagruel constitue un pamphlet humaniste opposant le Moyen Âge obscurantiste et l’extension des savoirs de la Renaissance. Et la langue dans laquelle s’exprime Rabelais, l’une des plus riches qui soit, est aussi complexe que raffinée. Un raffinement aux antipodes du français lisse, chirurgical, hygiéniste actuellement en vigueur. Imagé, coloré, tantôt fin tantôt grossier : contrasté car empreint du parler populaire autant que d’érudition et de sophistication spéculative.

Lazar, celui qui ressuscite

Ce terreau était à même d’exciter l’avant-garde que constitue le tandem Benjamin Lazar et Olivier Martin-Salvan dans le domaine du théâtre ancien, et nous voici devant leur adaptation du chef-d’œuvre en langue originale et au caractère bien plus qu’alléchant. C’est que les dernières productions de Lazar nous ont enchantés. Lui qui a ressuscité Molière (en compagnie déjà de Martin-Salvan) ou Cyrano de Bergerac comme personne ne nous les avait donnés à entendre ; lui qui ravissait la saison dernière le public du TNP avec des Amours tragiques de Pyrame et Thisbé réhabilitant la rime originale en français baroque, en éclairant à la chandelle visages et costumes, qui prenaient ainsi tout leur sens.

Peu de protagonistes pour cette re-création : un comédien (Martin-Salvan), épaulé de deux musiciens aux cornet à bouquin (instrument ancien en bois de la famille des cuivres) et luth. Ici, la musique dialogue avec la langue, qui s’anime tantôt jusqu’à prendre la forme d’un chant...

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Pantagruel. Du 9 au 20 avril, à 20h, au Petit Théâtre du TNP (Villeurbanne).

A lire aussi sur notre site : la critique du spectacle par Caïn Marchenoir.

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