Montluc : prison politique des nazis, l’horreur en plein Lyon

A l'occasion de la Journée internationale de commémoration en mémoire des victimes de l’Holocauste et de la prévention des crimes contre l’humanité le 27 janvier 2012, Lyon Capitale vous propose de retrouver notre article sur : Montluc : prison politique des nazis. Deuxième partie : l'horreur en plein Lyon.

L’appel, avec ou sans bagage

Les Juifs sont détenus dans une baraque en bois à l’extérieur. 2 500 d’entre eux seront internés entre 1942 et 1944. Régulièrement, ils sont placés dans des wagons de troisième classe aux portes plombées qui les emmènent à Drancy. Là, ils sont transférés dans les tristement célèbres bétaillères qui partent à Auschwitz. Le 6 avril 1944, Klaus Barbie fait arrêter les 44 enfants de la colonie d’Izieu ainsi que 7 adultes. Ils sont conduits à Montluc avant d’être déportés. Et le dernier convoi que réussira à faire partir le Boucher de Lyon – 600 détenus dont 400 Juifs – ira directement de Montluc à Auschwitz. À leur arrivée, onze jours plus tard, les prisonniers sont gazés.

Pour l’ensemble des prisonniers, les journées sont régies par l’angoisse de l’appel, avec ou sans bagage. Dans le premier cas, il s’agit d’un aller simple vers la déportation et le camp de concentration. Dans le second, un sombre rendez-vous final avec le peloton d’exécution. Le tribunal militaire ne désemplit pas et condamne à la chaîne les prisonniers à l’exécution. Ils sont alors amenés aux stands de tir du terrain militaire de la Doua, ou bien encore abattus le long du mur d’enceinte de la prison. Pourtant, malgré des conditions de survie atroces, malgré les parasites, la torture, la paranoïa, l’espoir naît parfois de petites choses. L’historien et résistant Marc Bloch, arrêté le 8 mars 1944, tient des cours dans sa cellule, les hommes échangent entre eux, débattent. Rapidement, les nouveaux détenus vont apprendre aux anciens que les Alliés ont débarqués et renversent la balance. Durant l’été 1944, face à l’avancée des Alliés, les nazis organisent des massacres à titre de représailles. Les prisonniers sont emmenés autour de Lyon pour y être fusillés. Bron, Saint-Genis-Laval et même Bellecour, les exécutions sommaires des prisonniers de Montluc vont se tenir dans plus de trente lieux. Ne pouvant plus être convoyés par train, les Juifs sont fusillés avec les autres détenus.

Les représailles allemandes

Le 20 août, Yves Farge, commissaire de la République clandestin, écrit une lettre au colonel Knab, commandant des services allemands de police. Il le somme d’arrêter immédiatement les massacres des prisonniers de Montluc, sous peine de faire lui-même fusiller des soldats allemands capturés. Il met ses menaces à exécution dès le lendemain, en représailles au massacre de 120 détenus de Montluc à Saint-Genis-Laval : 80 prisonniers nazis sont abattus.

Fin août, pour mettre définitivement fin au massacre, les résistants assiègent la prison. Le 24 août, le commandant de la prison, se sachant assiégé, se rend dans la cellule du prisonnier le plus âgé, le général Chevallier, pour lui transmettre le commandement. Il accepte de libérer Montluc à la condition sine qua non que lui et ses hommes soient épargnés et que les cellules ne soient ouvertes que le lendemain, pour éviter le lynchage des gardiens. Les nazis quittent alors la prison. Après avoir entonné la Marseillaise et l’Internationale pour fêter la nouvelle, les détenus réussissent à sortir de leurs cellules. En cherchant des vivres, ils descendent au sous-sol, où ils auraient découvert des explosifs prêts à réduire les bâtiments en cendres. Les nazis auraient prévu de ne leur laisser aucune chance.

Mais, si la prison de Montluc est libérée, ce n’est pas encore le cas de la ville. La libération de Lyon ne sera effective que dix jours plus tard. Les prisonniers sont donc toujours dans la clandestinité, craignant les patrouilles allemandes qui peuvent encore les rattraper et les faire fusiller. De faux papiers sont distribués, mais ils arrivent trop tard pour certains.

Après la guerre, les collaborateurs sont à leur tour emprisonnés à Montluc, ainsi que d’anciens membres de la Gestapo. Par la suite, les lieux accueilleront des militants pro-Algériens dont certains seront exécutés. En 1983, après avoir enfin été arrêté, c’est dans cette même prison que Klaus Barbie est détenu, sur ordre de Robert Badinter : “Quarante ans après ses crimes, c’est à Montluc que Barbie devait passer la nuit, seul dans une cellule avec les ombres des êtres qu’il avait martyrisés.” Montluc a servi de prison jusqu’en février 2009, avant d’être considérée comme vétuste et définitivement fermée. Aujourd’hui, le lieu est devenu un mémorial, qui peut être visité librement.

Retrouvez notre première partie : Montluc : prison politique des nazis, de ses origines militaires à sa réquisition

Visite du mémorial du mercredi au samedi de 14h30 à 17h (visite guidée à 15h30). Informations et réservation : ONAC 04-78-27-15-61

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