Le musée Guimet avait déjà été l’objet d’une polémique à propos d’une éventuelle vente du bâtiment. (Photo Hadrien Jame)

L’adjointe à la Culture de Lyon menace de démissionner si le musée Guimet est vendu

Incertain, le futur du musée Guimet fait débat au sein de la majorité municipale. Vent debout contre une éventuelle "vente au plus offrant" du site, l’adjointe à la Culture, Nathalie Perrin-Gilbert, s’est catégoriquement opposée à cette idée, menaçant de démissionner si elle venait à aboutir.

C’est peu dire que l’avenir du musée Guimet divise au sein de la majorité municipale. Ce jeudi matin, lors d’une réunion réunissant plusieurs adjoints de l’exécutif du maire, Grégory Doucet, à l’initiative de Sylvain Godinot, l’adjoint en charge du patrimoine, les élus étaient invités à se prononcer sur l’avenir de l’ancien muséum d’histoire naturelle, comme le révèlent nos confrères de Tribune de Lyon

Perrin-Gilbert et Blache alliés de circonstances

Alors qu’une vente au plus offrant du bâtiment figurait sur les cinq scénarios présentés à l’appréciation des élus, dont le maire LR du 6e arrondissement, Pascal Blache, les échanges ont vite tourné au vinaigre. D’après nos informations, le maire d’arrondissement aurait refusé de participer à l’atelier qui consistait notamment à donner un pourcentage d’adhésion à chacun des scénarios. Dans son combat, il a même trouvé une alliée de poids en la personne de l’adjointe à la Culture, Nathalie Perrin-Gilbert. Très attachée au lieu, l’ancienne maire du 1er arrondissement s’est vivement opposée à cette méthode. 

"Pour moi c’est une incompréhension de ce que représente le musée Guimet dans le coeur et aux yeux des Lyonnais"

Nathalie Perrin-Gilbert, adjointe à la Culture de la Ville de Lyon

"Il nous était demandé de donner notre avis et de noter notre degré d’acceptabilité aux différents scénarios, depuis la cession au plus offrant, jusqu’au portage publique en totalité. Ces notations n’ont pas eu lieu. Nous avons refusé d’entrer par cette méthode-là, en disant qu’il fallait d’abord avoir une vision, une ambition et un projet sur Guimet pour rentrer techniquement dans le dossier. On ne peut pas parler technique avant d’avoir défini un projet politique qui fasse sens", se justifie auprès de Lyon Capitale l’élue du groupe Lyon en commun. 

Cinq scénarios pour Guimet

Lors d’une première réunion tenue au mois de décembre, l’adjointe était déjà montée au créneau pour demander que soit étudiée la faisabilité d’un projet porté par la ville ou en partenariat avec un acteur privé. À l’époque, selon elle, Sylvain Godinot proposait seulement une cession du bâtiment, une délégation de service public (DSP) ou une gestion sous la forme d’un bail emphytéotique. Dix mois plus tard, d’autres scénarios ont donc été ajoutés aux propositions faites aux élus, que nous avons pu consulter : 

  • Créer un espace de loisir ;
  • Vendre le site au plus offrant avec charge à lui de développer un programme, en négociant "plus ou moins le contenu" ;
  • Un projet mixte définit par la Ville, qui garderait un morceau du site, éventuellement pour un équipement public, et confierait le reste à un ou plusieurs opérateurs en négociant avec eux la programmation ;
  • Une cession avec des contraintes en réservant une partie du site pour un équipement (salle d’activités, salle d’expo…) ;
  • Reconstruction d’un équipement public municipal ou partagé avec d’autres acteurs public, en créant par exemple une réserve pour tous les musées du territoire.

Ce dont se félicite aujourd’hui Nathalie Perrin-Gilbert, qui regrette toutefois que la possibilité d’une cession au plus offrant soit toujours affichée. Elle se dit même surprise que ce scénario ait été proposé par Sylvain Godinot. "Pour moi c’est une incompréhension de ce que représente le musée Guimet dans le coeur et aux yeux des Lyonnais. C’est aussi se priver de pouvoir y mener des politiques publiques", déplore l’ancienne maire d’arrondissement. À en croire Pascal Blache, agacée, l’adjointe est même allée jusqu’à lâcher : "Si vous voulez me faire démissionner, vendez le musée au privé". "Je suis absolument opposée à une cession du bâtiment, à une DSP ou un bail emphytéotique. Je n’exclus pas un partenariat, mais il faudrait que la Ville fasse partie du projet", reconnaît-elle. 

"La ville n’aura pas les moyens de financer ce projet seule"

Pascale Blache, maire LR du 6e arrondissement

Moins catégorique, Pascal Blache a bien conscience que "la ville n’aura pas les moyens de financer seule le projet" de réhabilitation du lieu, qui serait estimé entre 25 et 30 millions d’euros. Lui aussi opposé à une vente totale, qui "n‘aurait pas de sens", à l’instar de Nathalie Perrin-Gilbert, il verrait d’un bon oeil un projet de musée tourné vers l’enfance et qui serait porté avec le soutien financier d’une fondation. Le site Guimet pourrait alors intégrer la construction d’une crèche, qui doit voir le jour dans la partie Nord du 6e arrondissement. 

Lire aussi : Biennale d’art contemporain de Lyon : les premières images des œuvres au musée Guimet

Créer une Biennale des enfants

"J’aimerais en faire un lieu de pratique artistique ouvert particulièrement à la jeunesse", précise de son côté l’adjointe à la culture, qui souhaite présenter un projet à Sylvain Godinot d’ici l’été prochain. Celui-ci pourrait notamment comprendre la création d’une Biennale des enfants, en lien avec le Musée d’art contemporain, l’hébergement d’artistes, des visites d’écoliers et de collégiens… "Cela a un coût, mais est-ce qu’on demande à l’éducation et la culture une rentabilité immédiate ? Moi je pense qu’un projet d’éducation culturel est bon pour notre vivre ensemble, à un moment donné il s’agit de politique publique", insiste l’élue, non sans titiller ses collègues écologistes en lançant "est-ce que planter un arbre c’est rentable ?".

"C’est un lieu sur lequel on peut avoir une proposition forte pour la jeunesse et ca n’a pas de prix"

Nathalie Perrin-Gilbert, adjointe à la Culture de la Ville de Lyon

À entendre Pascal Blache, cette réunion "animée", où rien n’a été acté officiellement, aura au moins eu le mérite de trancher sur le fait "que personne n’était vraiment favorable à la vente de Guimet. C’est le seul scénario dont je suis sur que l’on ne veut pas", assure le maire d’arrondissement. Le scénario de vente proposé par Sylvain Godinot avait-il alors seulement vocation à nourrir le débat ? On ne le saura pas, pour le moment. Contacté l’intéressé n’a pour l’heure pas répondu à notre sollicitation. 

En attendant de connaître l’avenir du Musée Guimet, rouvert par deux fois pour la Biennale d’art contemporain et l’exposition Obey grâce à un investissement de 500 000 euros de la Ville, Nathalie Perrin-Gilbert serait en bonne voie d’obtenir que des occupations temporaires du lieu soient reconduites d’ici la fin du mandat. Reste à savoir si les échanges "animés" de ce jeudi matin laisseront des traces au sein de l'exécutif.  

Voir aussi : Musée Guimet, galerie des Terreaux, chalet du parc : la feuille de route de la ville de Lyon (vidéo)

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