“La diversité ne doit pas être un faire-valoir” pour Chafia Tifra

Conseillère municipale à Villeurbanne, Chafia Tifra a répondu à l’injonction émanant des religieux Azzedine Gaci et Kamel Kabtane, qui appelaient à la mobilisation des “élus de la diversité” face à l’abstention dans les quartiers populaires.

Ce n'est certainement pas le type de réaction qu'ils attendaient. Au lendemain du premier tour des élections régionales, Azzedine Gaci, recteur de la mosquée Othmane de Villeurbanne, et Kamel Kabtane, celui de la grande mosquée de Lyon, ont cosigné un communiqué pour interpeller les "élus de la diversité" quant à l'abstention électorale galopante des citoyens de confession musulmane.

Déjà décriés pour avoir fait intervenir le religieux dans la sphère politique, au mépris du principe de laïcité, Azzedine Gaci et Kamel Kabtane sont de nouveau pointés du doigt pour leur communautarisme supposé dans une tribune de Chafia Tifra, élue au conseil municipal de Villeurbanne sur la liste "La Métropole autrement" du maire socialiste Jean-Paul Bret.

Outre "le fait qu’il est assez inhabituel que des membres de communautés religieuses interviennent dans l’espace public pour commenter l’actualité politique", Chafia Tifra dénonce un choix maladroit des termes, notamment celui d'"élus de la diversité".

“Les musulmans parlent aux musulmans”

Chafia Tifra dénonce l'emploi de ce qualificatif d'"élus de la diversité". "On jette au visage des citoyens français une nouvelle catégorie d’élus... intronisés à leur insu ! Tout le monde sait que cette catégorie n’existe pas, il n’y a que des élus de la République ! Pour autant, tout le monde aura compris à qui on parle et surtout de qui on parle... Suivez mon regard ! Les musulmans parlent aux musulmans, insupportable !"

"Sur le fond, écrit Chafia Tifra, un élu de la République a été choisi par le suffrage universel, il est l'expression de la souveraineté populaire, il participe aux délibérations qui traitent de la vie de tous dans la cité, il assure la représentation de tous les citoyens sans distinction de couleur, d'origine ou de religion... Il respecte chacun dans son domaine et met en distance les champs politiques et cultuels conformément au principe de neutralité dans la cité."

“La question de la diversité ne doit pas être un faire-valoir”

Pour Chafia Tifra, la réaction des deux responsables religieux "démontre une réelle méconnaissance du travail colossal qui est mené par les élus de la République sur le terrain". "La question de la diversité ne doit pas être un faire-valoir et n’est en aucun cas la propriété d’une communauté, qu’elle soit religieuse, culturelle, intellectuelle", martèle-t-elle. Et d'ajouter : "Un élu de la République résiste à toute injonction et œuvre par devoir démocratique. Seul le vote peut le défaire ou le contraindre."

Sur l'abstention, l'élue explique que les raisons pour lesquelles "les habitants des quartiers populaires ont pris des distances avec le monde des politiques et de la politique" sont graves et profondes. "Penser que la tendance peut se renverser par ce type de slogan est illusoire", écrit-elle. "Imaginer que la responsabilité de chacun est d’abord liée à la ressemblance avec l’autre, c’est méconnaître le fait sociologique et les concepts qui le fonde. Il est très dangereux de venir contrarier la compréhension de la société par des injonctions hâtives et malheureuses. Les choses sont plus sérieuses."

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