Fabrice Matteucci, secrétaire fédéral du Parti socialiste du Rhône, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Premier secrétaire fédéral du Parti socialiste du Rhône et candidat aux législatives anticipées de juillet 2024, Fabrice Matteucci se dit prêt à repartir en campagne, alors que la perspective d’un nouveau scrutin législatif se rapproche après la démission de Sébastien Lecornu. "Nous souhaitons partir rassemblés à gauche, mais sur un projet commun. Si les Insoumis ne s’y retrouvent pas, ils feront leur choix », souligne-t-il. Le socialiste défend l’idée d’une alliance large avec les écologistes, les communistes et les socialistes. Sans exclure totalement La France insoumise qu'il appelle à faire des compromis : "On ne peut pas dire le programme, rien que le programme. Il faut aussi apprendre à travailler ensemble", ajoute-t-il.
Fabrice Matteucci revient aussi sur ce moment inédit que traverse la politique française : "il y a une crise politique et une crise institutionnelle. Les Français ont donné une majorité au NFP, et cela n’a pas été reconnu". Il appelle à “réapprendre à gouverner autrement”, en privilégiant le dialogue parlementaire et la recherche de compromis, plutôt que la confrontation permanente : "Nous avons conscience qu’il y a des efforts à faire, mais cela ne doit pas se faire au détriment des Français ni des politiques sociales".
La retranscription intégrale de l'entretien avec Fabrice Matteucci
Bonjour à tous et bienvenue. Vous regardez 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction de Lyon Capitale. Aujourd'hui, nous sommes avec Fabrice Matteucci, bonjour. Vous êtes premier secrétaire fédéral du Parti socialiste dans le Rhône. Vous étiez candidat aux législatives anticipées de juillet 2024. Est-ce que, ce matin, vous êtes prêt à repartir en campagne ? Parce que ça peut aller très vite, depuis la démission de Sébastien Lecornu.
Écoutez, oui, l'ensemble des candidats socialistes sont prêts à repartir en campagne pour de prochaines échéances. Nous sommes prêts, Olivier Faure l’a dit, nous l’avons répété, et nous souhaitons pouvoir repartir avec l’ensemble des mouvements du NFP. La gauche est majoritaire au Parlement et il faut absolument que nous retrouvions la même majorité.
Vous reconduisez le NFP, vous repartez avec les écologistes, avec les Insoumis, alors que vous sortez d’un congrès – enfin, c’était il y a quelques mois – où celui-ci s’était joué à celui qui dirait le plus de mal de la France insoumise. Là, vous seriez prêt à repartir avec eux ?
Déjà, l’idée, c’est de partir sous le format qu’on appelle le format de “bailleux”, donc avec les écologistes, les communistes et d’autres partis de gauche. Si la France insoumise souhaite participer à ce regroupement et reformer le NFP, pourquoi pas, mais je pense qu’ils sont aussi dans d’autres considérations. En tout cas, au Parti socialiste, l’idée est de partir rassemblés à gauche pour pouvoir reconduire le même nombre de députés.
Donc rassembler, mais pas forcément avec les Insoumis. Il y a de la sémantique là-dedans.
Rassembler, oui, mais il faut s’assembler sur un projet commun, sur une volonté commune. Dans le cadre de “bailleux”, un certain nombre de forces politiques de gauche, dont le Parti socialiste, ont affirmé leur volonté de travailler ensemble en vue des élections présidentielles de 2027. Maintenant, il faut que tout le monde puisse rejoindre le même mouvement. Si les Insoumis décident qu’ils ne se retrouvent pas et qu’ils pensent pouvoir faire mieux que nous, ils feront leur choix.
C’est aussi ce qu’on voit se dessiner pour les élections municipales, notamment dans l’agglomération lyonnaise, où il y a un accord entre le PS et les écologistes, mais pas forcément avec les Insoumis. Ce n’est pas une ligne rouge pour vous, la présence des Insoumis ? S’il devait y avoir une version 3.0 – puisque ce serait la troisième fois de la NUPES devenue NFP – vous pourriez quand même partir sous cette bannière, à titre personnel ?
À titre personnel, je souhaite partir sur le rassemblement de la gauche. En 2022, il y avait la NUPES, où la gauche était rassemblée, y compris avec les Insoumis. En 2024, ce fut la même chose. Si de nouvelles élections ont lieu et que nous repartons sur ce chemin, je me présenterai pour le rassemblement de la gauche, et j’espère que toute la gauche sera réunie. Néanmoins, nous avons des divergences sur certains sujets, et le programme doit être commun à tous. Nous avons une base, mais on ne peut pas dire “le programme, rien que le programme”. Il faut aussi apprendre à travailler ensemble, et je pense que c’est ce que les Français attendent de nous.
Est-ce que vous avez l’impression qu’on vit une crise politique ou une crise institutionnelle ?
Les deux, je dirais. On peut vivre une crise politique, car avec la montée du Rassemblement national et de ses idées, une nouvelle considération se pose sur les valeurs, la manière de voir la France, le vivre-ensemble, la justice sociale. Et puis il y a une crise institutionnelle. Le nombre de Premiers ministres passés sous le dernier quinquennat, qui n’a pourtant commencé qu’il y a peu, montre qu’il y a un questionnement. On voit aussi que les Français, lors des législatives de 2024, avaient donné une majorité au NFP et que cela n’a pas été reconnu.
Majorité très relative.
Oui, mais une majorité quand même.
Si demain Emmanuel Macron nommait un Premier ministre de gauche, son espérance de vie serait encore plus relative que la majorité du NFP ?
Nous, nous sommes prêts. Pourquoi ne pourrions-nous pas voter pour un Premier ministre de gauche ? Depuis 2024, nous disons que nous sommes prêts à gouverner. Si nous devons prendre nos responsabilités, nous les prendrons.
Est-ce que cet échec, finalement, d’arriver à faire des coalitions signifie que la classe politique française est incapable d’en faire ? Est-ce que ce n’est pas notre manière de fonctionner ? Ou bien est-ce un problème de personnes, de stratégie, de présidentielles qui empêche cela ?
Non, je ne pense pas que ce soit seulement cela. On peut lire dans le résultat des élections une volonté de ne plus donner un chèque en blanc à tel ou tel parti. Les électeurs veulent un peu de tout, ils veulent panacher. Peut-être que la classe politique ne sait pas encore répondre à cette demande, peut-être qu’elle ne sait pas faire.
Au Parti socialiste, tout au long de cette séquence, nous avons dit que nous étions prêts à travailler avec l’ensemble des composantes parlementaires sur des sujets spécifiques et à trouver des consensus et des compromis. Ce n’est pas de la coalition, mais c’est apprendre à travailler ensemble au Parlement. C’est peut-être une nouvelle manière de fonctionner, plus tournée vers la discussion sur les sujets, avec des convergences de point de vue.
Ce que nous demandions, c’était une justice fiscale. Nous demandions, par rapport au budget, la reconnaissance d’une contribution plus importante de ceux qui font des hyperprofits, et un retour sur la réforme des retraites. Nous avons eu une porte fermée, aucune discussion sur ce point. La coalition, comme vous le dites, suppose d’apprendre à trouver des compromis et à entendre les points de vue des uns et des autres. Nous avons bien conscience qu’il y a une dette importante en France, des efforts à faire, des politiques à conduire, mais cela ne doit pas se faire au détriment des Français ni des politiques sociales.
S’il devait y avoir des élections législatives, quels impacts auraient-elles sur la campagne municipale à venir ? Vous alliez peut-être annoncer avec vos partenaires de gauche une candidature à Caluire. Qu’est-ce que cela changerait ?
Nous découvrons. C’est vrai que la période serait courte : entre les législatives et, en mars, les municipales, une campagne entraînerait l’autre. Le risque, il faut le dire, est que nos concitoyens ne se retrouvent pas dans le fait de passer sans cesse d’un échelon national – jusqu’au mois de décembre, par exemple – à une campagne municipale dès mars. Cela peut avoir un effet d’entraînement, mais aussi un effet déstabilisant. Nous l’avons vu en 2024 : beaucoup ont eu le sentiment que leur vote n’était pas respecté. Si nous nous retrouvons dans une situation comparable, avec une majorité relative non reconnue, cela pourrait avoir un effet néfaste sur la participation en mars.
En effet, les socialistes sont prêts à repartir à la campagne !