Piétonnisation de Lyon : "si on n'accompagne pas le changement, ce sera une traversée du désert pour les commerces"

Une appli 100% lyonnaise "accompagne" les commerçants de la Presqu'Ile, vouée à être prochainement piétonne, et facilite les achats des clients.

A l'aune de la piétonnisation de la Presqu'Ile de Lyon, à l'horizon 2026 - à supposer que le tribunal administratif de Lyon n'invalide pas le projet, faute d'études impacts engagés par la Métropole - une application lyonnaise a vu le jour pour  "accompagner la piétonnisation progressive des centres-villes en participant à leur dynamisme commercial".

Izzy Town, c'est son nom,  IzzyTown apporte un service de livraison jusqu'à présent souvent réservé aux seuls achats online ou aux courses alimentaires.

Un bon moyen pour ceux qui viennent des extérieurs de Lyon en voiture et qui n'auront plus accès à l'hypercentre mais aussi une alternative pour ne pas céder ux sirènes des achats sur internet. En 2022, selon l'enquête consommateurs annuelle de la région lyonnaise (publiée en mars 2023), 22% des dépenses non alimentaire étaient réalisés sur Internet, en augmentation de +11,5%

On fait le point avec sa cofondatrice, Anne Delaigle, créatrice de mode et commerçante indépendante pendant près de trente ans, et ancienne porte-parole des comemrçants indépendants lyonnais pendant le Covid.


La retranscription intégrale de l'entretien avec Anne Delaigle

Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 minutes. Je vous présente tous mes vœux de bonheur et de réussite pour cette année 2024 et de réussite. Nous recevons aujourd'hui Anne Delaigle, cofondatrice de l'application Izzy Town qui propose un service de shopping mains libres, un nouveau service de livraison pour faire ses courses en centre-ville. D'où vous est venue l'idée de cette application ?

Tout simplement parce qu'il y avait une annonce de piétonnisation du centre-ville de Lyon. J'ai vu d'autres centre-villes se fermer aux voitures et je sais que si on n'accompagne pas le changement, il y a vraiment une traversée du désert pour les commerces, et en l'occurrence les commerces indépendants.

Ça veut dire que pour vous voiture égale forcément commerce ?

Non, pas systématiquement. Je dis juste que, pour l'instant, on a quand même ces habitudes de consommation là, on vient malgré tout en centre-ville. Les gens ont quand même de moins en moins la possibilité de se loger en centre-ville, au vu des loyers ou du prix de l'immobilier, les gens vivent donc dans des zones périurbaines de plus en plus éloignées, il faut donc acheminer les gens au centre-ville pour qu'ils puissent venir y faire les boutiques. Et comme aujourd'hui, il n'y a quand même pas suffisamment de transports en commun pour contrebalancer le fait qu'on piétonnise la villen il fallait trouver des solutions. Voilà donc pour l'instant ce n'est pas forcément voiture égale shopping mais quoi qu'il en soit il faut acheminer les shoppeurs.

Une étude 2016 montrait que sur 100 villes en Europe, moins il y avait de voitures en ville, plus la fréquentation forcément des piétons augmentait et ça facilitait le commerce à hauteur de 49%. Vous, vous dites ok pour une ville piétonne mais il faut acheminer les piétons..

Exactement. Moi-même, je vis en centre-ville, en plus sur les quais du Rhône. Si demain, vous me dites que c'est piétons et que j'ai plus le bruit de la circulation ça me va très bien, et que quand je descends de chez moi, la ville est apaisée c'est parfait. En revanche, je dis juste que l'idée ne fait pas un projet et qu'il ne suffit pas de fermer les rues pour que ça fonctionne. Il faut accompagner ce changement et il faut proposer des alternatives justement à cette fermeture des rues.

Cette application, Izzy Town, promeut un shopping mains libres. Ça veut dire quoi au juste ?

Alors je vous expliquerai après mais le principe c'est de pouvoir faire les boutiques, car c'est toujours mieux que de consommer sur internet. D'abord, vous choisissez, vous touchez, vous essayez.

Et on touche le commerce indépendant ?

Vous touchez le commerce indépendant, entre autre, mais même les chaînes aussi. Il ne faut pas être sectaires, c'est-à-dire que ces chaînes ont aussi besoin de vivre, elles embauchent des gens dans leurs boutiques donc c'est vraiment tout type de commerce. Mais malgré tout, pour les commerces indépendants, ça leur permet de rivaliser, de lutter à armes égales avec les chaînes, ce qui n'est pas toujours le cas. Le principe, c'est donc que quand vous allez faire les boutiques, vous faites vos achats et vous créez du lien, vous continuez à créer du lien et plutôt que d'être chargé de vos paquets, vous laissez vos achats dans la boutique où vous les avez achetés, le commerçant les identifie au travers d'un QR Code qu'on lui a fourni, les engage via son application Izzy Town - ce qui veut dire que ça envoie un message au logisticien qui collecte en vélo cargo
Alors je tiens à le dire, les livreurs sont salariés, il n'y a pas d'ubérisation du travail chez nous, on massifie l'ensemble de vos paquets au cours de votre session de shopping. Vous-même, en tant que shoppeur, à la fin de votre session de shopping, vous ouvrez votre application Izzy Town quand vous avez décidé de rentrer chez vous, vous dites "j'ai terminé mon shopping", ça vous ouvre les créneaux de livraison qui sont disponibles vous choisissez et à ce moment-là on valide votre lieu de livraison chez vous, au restaurant, si vous en avez envie, à votre bureau. Le shoppeur devient un promeneur.

Aujourd'hui, combien de commerçants adhèrent à Lyon ?

Pour l'instant, il y a une cinquantaine de commerçants, et une vingtaine en cours de signature. On a signé aussi des partenariats avec des hôtels, qui prescrivent l'application à chacun de leurs clients, en entrant, au moment de leur remise des clés. Ce qui veut dire que ces touristes ont la visibilité sur le service mais aussi sur les boutiques partenaires. Ce qui veut dire qu'on devient prescripteur d'un parcours shopping. Au-delà de ça, pour les boutiques partenaires on effectue également pour eux, au travers de ce réseau de vélos cargo, la collecte de leurs déchets cartons papiers plastiques qu'on massifie à Pont Morand, qu'on fait transiter par le Rhône via une barge jusqu'à Port Rambaud, donc toujours 100% décarbonés. Et là on a monté un partenariat avec Paprec qui retraite et revalorise, ce qui veut dire qu'on fournit une attestation de retraitement des déchets à nos boutiques partenaires. Donc, c'est vraiment un service global de logistique urbaine.

Vous parliez de l'exécutif lyonnais, et donc son projet de piétonnisation du centre-ville à l'horizon 2026. Vous l'avez présenté à la mairie de Lyon, qu'est-ce que les adjoints et la mobilité commerce en pensent ?

Oui, on l'a présenté à la mairie à la Métropole. C'est compliqué malgré tout de pouvoir nouer un partenariat. On est une entreprise privée et, malgré tout, on nous explique que donc on ne peut pas nous aider au titre d'une entreprise privée. C'est en ça où je trouve que c'est quand même très dommage, c'est-à-dire qu'on accompagne typiquement le projet de piétonnisation et d'apaisement de la Presqu'île. Finalement, on se retrouve nous à monter un système d'accompagnement de cette piétonnisation ,qui aurait dû être mis en place, soit par la mairie soit par la Métropole, pour accompagner le projet qu'ils avaient.

Merci Anne Delaigle. Au revoir.

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