la plus grande catastrophe agronomique de ce début de XXIe siècl
les agriculteurs allument des bougies pour défendre leur exploitation face au gel. Joris Miachon

"On ne peut pas revivre une année comme 2021" : dans le Rhône, l'arboriculture s'organise avant le retour du gel

Des températures négatives sont attendues pour ce premier week-end d'avril dans le Rhône et partout en France. Un phénomène qui inquiète le secteur de l'agriculture, qui doit s'organiser pour lutter contre un épisode de gel. Explications.

Elle est attendue depuis le début de la semaine. Les spécialistes s'accordaient même à dire qu'elle présentait un risque pour les récoltes. La vague de froid arrive doucement dans le Rhône et partout en France. Si le gel n'est pas encore d'actualité ce vendredi 1er avril, il pourrait l'être dès ce premier week-end d'avril, alors que le mercure devrait afficher des températures négatives dans les terres agricoles. Tout comme en 2021, les arboriculteurs du Rhône, inquiets, s'apprêtent à lutter pour protéger leurs arbres fruitiers. Prise de températures, mise en place de bougies hors-gel et "systèmes de chaufferettes", la mobilisation se fait à tous les niveaux dans le département.

Le gel, pire période en avril

Sur le terrain, Christophe Gratadour, responsable de l'équipe arbo-maraichage de la chambre d'agriculture du Rhône s'emploie pour protéger à tout prix ses arbres fruitiers. Lui qui est propriétaire d'une parcelle de vergers expérimentale sur la commune de Saint-Laurent-d'Agny a, de son côté, opté pour des bougies hors-gel pour protéger ses arbustes.

Mais son activité principale demeure tout de même celle de conseiller en arboriculture. Et le spécialiste en est persuadé : début avril est la pire période puisque "toutes les espèces sont sensibles. La plupart sont soit en floraison, soit en cours de floraison", détaille Christophe Gratadour. "Début avril, le risque est de toute façon important, qu'on ait eu un hiver doux ou pas", poursuit-il.


Aujourd'hui, "toutes les espèces sont sensibles. La plupart sont soit en floraison, soit en cours de floraison",
Christophe Gratadour, responsable de l'équipe arbo-maraichage de la chambre d'agriculture du Rhône


En 2021 déjà "l'année fut catastrophique", assure le membre de la chambre d'agriculture du Rhône. "Un certain nombre d'arboriculteurs sont déjà en difficulté. Il ne faudrait pas revivre une année comme l'année dernière". Le sentiment qui prédomine ? "De l'inquiétude" certes, mais aussi "un moral de combattant", raconte Christophe.

Pourtant, tout se jouera sur des détails ce week-end et en début de semaine prochaine. Dans les vergers du Rhône, les arboriculteurs organisent "les moyens de protection". Première étape : mesurer la température "de manière précise en se baladant dans nos vergers la nuit", selon l'arboriculteur qui explique que Météo France "donne toujours des températures sous-abris".

Ainsi, "lorsqu'il est annoncé -2 ou -3, ça veut dire qu'en vergers il fait -4 ou -5", assure-t-il. C'est à ce stade que démarre la lutte "en fonction du stade de sensibilité". "Mais le gel se joue parfois à quelques dixièmes de degrés. Quand on déclenche la lutte trop tôt, ça sert à rien. Et quand c'est trop tard, c'est déjà souvent trop tard", sourit-il.

Les pêches ont subi de plein fouet le gel dans la Drôme, dans la nuit du 7 au 8 avril 2021. (Photo d'archives @AnthonyFaure )

Des moyens de protection

Une fois la prise de température effectuée et un gel confirmé, s'engage le stade de la lutte. Un combat qui dure pendant des heures pour les arboriculteurs qui peuvent passer des nuits entières à déclencher les moyens de protection. Et il en existe plusieurs - plus ou moins coûteux - selon le conseiller en arboriculture.

Plutôt utilisé dans la partie sud de la zone arboricole du Rhône, la lutte par aspersion permet de profiter du réseau d'irrigation commun. "On arrose les végétaux. Puis en se transformant en glace, l'eau dégage de la chaleur. Et la chaleur protège les vergers de cette façon", détaille Christophe. Cependant, "il faut avoir suffisamment d'eau, de ressources et surtout être équipé pour pouvoir utiliser ce système".

D'autres moyens sont également utilisés par certains de ses confrères. Comme celui de réchauffer les végétaux "grâce aux bougies hors-gel" dont l'avantage est la souplesse d'installation. "Aujourd'hui, on a des bougies qui respectent parfaitement l'environnement", assure-t-il.


"Tant qu'on est à des températures de -4 ou -5, on peut lutter, mais quand on est à -8 ou -9 degrés sur la fleur, malheureusement on ne peut plus faire grand-chose"Christophe Gratadour, conseiller en arboriculture


Un enjeu important qui paraît minime à côté des coûts astronomiques de chaque bougie. "Selon les températures, on met entre 300 et 400 bougies à l'hectare. Chacune coûte entre 11 euros et 11,50 euros et a une autonomie de 8 heures", révèle le spécialiste. Une nuit de gel sur un hectare de plantations représenterait alors entre 3 500 et 4 000 euros de dépenses. L'arboriculteur ne se fait alors pas d'illusions. "Tant qu'on est à des températures de -4 ou -5, on peut lutter, mais quand on est à -8 ou -9 degrés sur la fleur, malheureusement on ne peut plus faire grand-chose", déplore Christophe. Quant aux aides de l'État, le fond national des calamités "ne représentera jamais une récolte et puis ça n'est pas l'objectif". Quoi qu'il se passe, ces subventions "ne remettront jamais les fruits sur les arbres", souffle finalement l'arboriculteur, qui s'apprête à passer un week-end mouvementé.

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