Juliet Roméo, libraire à La Madeleine, est l’invitée de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Juliet Roméo, libraire à La Madeleine, est l’invitée de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.

Coups de cœur du libraire : les livres à emporter en vacances cet été

Juliet Roméo, libraire à La Madeleine, est l’invitée de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.

Pour supporter la chaleur lyonnaise ou s'évader pendant les vacances, Juliet Roméo, libraire à la librairie La Madeleine dans le 7e arrondissement de Lyon, partage ses coups de cœur littéraires sur le plateau de 6 minutes chrono. Littérature engagée, autofiction, science-fiction ou dystopie politique : quatre livres à emporter, choisis avec passion.

"La plus belle histoire d’amour que j’ai jamais lue"

Le premier titre présenté par Juliet Roméo est Gioconda de Nikos Kokantzis, publié aux éditions de L’Aube. Écrit en 1975, ce court roman est un témoignage autobiographique sur un amour adolescent dans la Grèce occupée pendant la Seconde Guerre mondiale. "C’est mon coup de cœur absolu depuis plusieurs années", affirme la libraire. "Il raconte sa première histoire d’amour avec sa voisine, qui va être déportée par les nazis en 1943. C’est absolument magnifique. C’est la plus belle histoire d’amour que moi, j’ai jamais lue." Un récit pudique et bouleversant.

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Des lettres pour se reconstruire

Autre registre, autre forme avec Insolations de Meryem Alqamar, publié aux éditions Cambourakis. Ce texte d’autofiction, rédigé sous forme de lettres à une thérapeute, aborde les violences familiales, l’homosexualité, l’identité franco-algérienne. "Elle travaille beaucoup sur les mots, sur ce qu’elle veut en dire, sur les mots qui vont réparer ou faire mal aux autres", décrit Juliet Roméo. "C’est un parcours de guérison, un livre militant sur tout ce qu’on peut faire pour dire ce qu’on est."

Robots sensibles et régimes autoritaires

Les amateurs de science-fiction pourront se plonger dans Le Journal d’un AssaSynth de Martha Wells (L’Atalante), une série à succès adaptée en série sur Apple TV. On y suit un cyborg chargé de protéger une équipe scientifique sur une planète hostile, qui s’émancipe après s’être autopiraté. "Toute la question est de savoir comment l’humain accepte un cyborg qui se comporte comme un humain, mais qui n’en est pas un", résume Juliet Roméo. Un univers à la fois technique, critique et accessible : "C’est de la SF adulte, mais ça fonctionne aussi très bien pour des ados qui ont envie de robots et d’action sans tomber dans le cliché Star Wars."

Enfin, pour les lecteurs avides de littérature politique, la libraire recommande Le Chant du prophète de Paul Lynch (Albin Michel), roman multiprimé sur une Irlande fictive tombée sous un régime totalitaire. "C’est une vraie réflexion sur ce qu’on fait aujourd’hui de notre droit de vote, et du droit de vote qu’on pourrait ne plus avoir demain", prévient Juliet Roméo. À travers le regard d’une mère de famille qui refuse de fuir tant que son mari disparu n’a pas réapparu, l’auteur brosse un tableau glaçant d’une société qui bascule.

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Bonjour à tous, bienvenue dans l'émission 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction de Lyon Capitale. C'est l'été, c'est la canicule. Si vous êtes comme nous coincés dans un studio ou si vous êtes partis en vacances, voici les coups de cœur du libraire : des livres à emporter cet été, en toute subjectivité. Et pour en parler, nous recevons Juliet Roméo, qui est libraire à la librairie La Madeleine, au 16 rue de la Madeleine à Lyon 7, et qui va nous présenter ses coups de cœur. Bonjour Juliet Roméo.

Bonjour.

Merci d'être venue sur le plateau. Est-ce que, juste avant de présenter les livres que vous nous conseillez, vous pouvez nous présenter votre librairie en quelques mots ?

On a une petite librairie qui s'appelle la librairie La Madeleine. On est situés dans le 7e, on a plutôt une taille modeste, et on fait la part belle à la jeunesse, à la littérature généraliste, et à tout ce qui est féminisme et ouvrages LGBTQIA+.

Voilà, c'est votre spécificité. Et on va commencer avec le premier livre qui est Gioconda de Nikos Kokantzis, à l'Aube.

Oui, donc ça, c'est mon coup de cœur absolu depuis plusieurs années. Lui, il a écrit qu’un seul livre, c’est celui-ci. Il l’écrit en 1975, et il raconte, pour témoigner, sa première histoire d’amour avec sa voisine qui va être déportée par les nazis en 1943. Donc ça se passe en Grèce, dans un petit village, et c’est vraiment le passage à l’âge adulte suivi de l’horreur de la guerre. Mais qui, en fait, ne va pas du tout être décrite à coups de cris et de pleurs, mais vraiment comme quelque chose de… en fait, c’est comme ça, et on ne peut rien y faire. Voilà. Il témoigne de cette histoire-là. C’est absolument magnifique. C’est la plus belle histoire d’amour que moi, j’ai jamais lue en tout cas.

Ah oui, donc on vit à fond, on est avec eux. Ça traverse aussi le lecteur.

Oui, complètement.
Donc on retient Gioconda à l’édition L’Aube.

Et de Nikos Kokantzis..

Voilà, à retrouver dans toutes les bonnes librairies. On va passer à votre deuxième coup de cœur : Insolations.

Oui, de Meryem Alqamar, c’est chez Cambourakis. À la base, c’était sorti aux éditions Hors d’atteinte. Ça vient de sortir en poche. C’est plutôt de l’autofiction. Elle écrit des lettres à sa thérapeute, dans lesquelles elle va parler de son homosexualité, des violences qu’elle a subies quand elle était plus jeune. Et elle va parler de ses origines franco-algériennes, avec une mère qui a très mal vécu les différentes migrations entre la France et l’Algérie, et un père très violent, qui n’a pas aimé que ses filles prennent leur indépendance. Donc c’est très beau, et tout est une question de mots. Elle travaille beaucoup sur les mots, sur ce qu’elle veut en dire, sur ce qu’on peut en dire, et sur les mots qui vont réparer ou qui vont faire mal aux autres. Il y a toute une réflexion là-dessus, c’est hyper intéressant.

C’est un récit introspectif ? Il y a une histoire ?

Elle, c’est un parcours de guérison qu’elle nous raconte. Donc elle va vraiment aller jusqu’au bout de ce parcours avec sa thérapeute. C’est plutôt un livre militant, sur tout ce qu’on peut faire pour dire ce qu’on est, dire qui on est, et assumer parfois des choix qui ne sont pas forcément faciles à assumer, notamment dans les sphères familiales.

Très bien. On retient Insolations aux éditions Cambourakis, si je ne dis pas de bêtises. Ensuite, j’ai noté Journal d'un AssaSynth.

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Oui, Le Journal d'un AssaSynth de Martha Wells, c’est publié chez L'Atalante. C’est une série, elle en est au 12e ou 13e tome, je crois. Il y a une adaptation série qui a été faite sur Apple TV. Là, on suit un cyborg qui est chargé de surveiller une équipe scientifique qui part à la découverte d’une planète. Et lui s’est autopiraté, donc il a acquis une indépendance, une autonomie de pensée. Ils vont se retrouver sur cette planète, où visiblement on les a envoyés pour mourir, puisqu’on leur a caché la dangerosité de la faune présente. Il y a des énormes bêtes. Et en fait, toute la question est de savoir comment l’humain accepte un cyborg qui se comporte comme un humain, mais qui n’en est pas un, et dont on ne peut pas connaître les réactions. Et lui se surnomme lui-même "l’assassin", parce qu’il a effectivement déjà tué des gens, alors que ce n’est pas du tout dans ses missions, ni dans ses capacités normalement.

C’est pour tout public ?

Alors, c’est pour un public qui a envie de plonger dans de la science-fiction avec pas mal de tenants scientifiques. Il faut avoir quand même envie, un petit peu.

Ça peut être SF adulte, quoi ?

Oui, c’est de la SF adulte. Par contre, pour tous les jeunes ados qui veulent plonger dans quelque chose d’un peu sportif, avec des robots mais qui ne soit pas du Star Wars, c’est absolument génial.

Très bien. On retiendra Le journal d’un assassin chez La Talente. Ensuite, Le Chant du prophète chez Albin Michel.

Oui, donc ça, c’est Paul Lynch. C’est un auteur irlandais. Là, on va être dans une Irlande dans un futur proche, une Irlande qui a voté pour un gouvernement totalitaire. On va suivre une mère de famille dont le mari a disparu pendant une manif ; il a été arrêté par la police, personne ne sait où il est. Et plutôt que de pouvoir fuir tout de suite son pays, elle va vouloir rester, de peur que son mari, quand il revienne, ne les retrouve pas. On va suivre en parallèle la déchéance d’un pays sous régime totalitaire, et la déchéance de cette famille qui se déchire sur : est-ce qu’il faut aller manifester ou pas, entrer en résistance ou pas, est-ce qu’on reste là, est-ce qu’on supporte les bombes, est-ce qu’on ment pour aller à l’hôpital parce que le gamin n’a pas 16 ans et qu’il ne peut pas aller à l’hôpital ? Il faut qu’il aille à l’hôpital pédiatrique, mais celui-ci est fermé et à l’autre bout de la ville. Voilà. Moi, ça me donne des frissons de repenser à ce livre, parce qu’il y a vraiment tout le parcours d’un régime totalitaire, mais dans notre époque contemporaine, et surtout en Europe.

C’est assez réaliste. On a l’impression que ça pourrait se passer demain.

Ça peut se passer demain, très clairement. Et c’est tout son propos.

Et ça correspond à quel type de lecteur, à quel lectorat vous le livrez ?

Tout le monde. C’est pour tout le monde, parce qu’en fait il a une écriture très fluide, il dit des choses très belles, et puis c’est une vraie réflexion sur ce qu’on fait aujourd’hui de notre droit de vote, et du droit de vote qu’on pourrait ne plus avoir demain.

Très bien. C’étaient les quatre coups de cœur de Juliette Roméo, de la librairie La Madeleine. Merci beaucoup Juliette Roméo de nous avoir présenté vos coups de cœur pour l’été. Quant à vous, merci d’avoir suivi cette émission. On se retrouve à la rentrée. Très bel été.

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