Le marché de gros de Lyon Corbas commercialise chaque années 300 000 tonnes de fruits et légumes. @Antoine Merlet

À la veille du salon de l’agriculture, au Marché de gros de Lyon l’écologie au coeur du débat

À 24 heures du coup d’envoi du salon de l’agriculture, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, était en déplacement ce vendredi matin au Marché de gros de Lyon pour réaffirmer sa promesse de soutenir une filière "bonne pour l’économie et l’écologie", face à une profession qui "veut des actes".

Il est à peine 6 heures ce vendredi matin et à la veille de l’ouverture du salon de l’agriculture les ministres d’Emmanuel Macron sont sur le pont pour continuer d’apaiser les tensions avec les professionnels de la filière agricole. Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique, et sa ministre déléguée Dominique Faure sont aussi là pour réaffirmer leur volonté de faire cohabiter agriculture et écologie, tout en rassurant les producteurs sur la méthode. Au lendemain de l’officialisation d’une réduction de près de 2 milliards d’euros du budget alloué à la transition écologique, pourtant érigée en septembre au rang de "priorité absolue" par l’État, il s’agit aussi d’enclencher une opération déminage alors que les critiques fusent.

Christophe Béchu au Marché de gros de Lyon-Corbas. (Photo HJ)

Ne pas opposer agriculture et écologie

"Certes, on va en faire un peu moins parce que la croissance est en berne, mais on va en faire un peu moins dans un contexte où l’on en a jamais fait autant. Les crédits pour la biodiversité augmentent de 800 millions d’euros en 2023 par rapport à 2024 et ça, c’est concret. Les moyens pour faire mieux pour notre environnement sont sur la table d’un point de vue budgétaire", martèle Christophe Béchu, installé entre les cagettes de fruits et légumes en provenance de France, mais aussi de l’étranger. Quelques minutes auparavant, le représentant du gouvernement assurait encore vouloir "une agriculture qui permet de préserver la biodiversité", alors qu’un producteur inquiet de l’avenir de la profession l’interpellait.

"Beaucoup de gens voudraient opposer l’écologie et l’agriculture, là on a un ministre qui nous dit que les deux peuvent aller ensemble et que l’agriculture doit être au rang supérieur",
Michel Joux, président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes
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Entre deux poignées de mains avec les grossistes et les producteurs présents dans les allées du ventre de la région Auvergne-Rhône-Alpes, qui commercialise chaque année 300 000 tonnes de fruits et légumes, pour un chiffre d’affaires de 420 millions d’euros, Christophe Béchu échange à bâtons rompus avec les représentants des syndicats agricoles. Une mise en bouche avant le grand débat prévu samedi avec le président de la République au salon de l’Agriculture qui semble plutôt porter ses fruits. Quand certains voudraient "opposer agriculture et écologie", "là on a un ministre qui nous dit que les deux peuvent aller ensemble et que l’agriculture doit être au rang supérieur, d’intérêt national", apprécie Michel Joux, le président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes. 

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"Laissez-nous produire"

En première ligne de la contestation des agriculteurs depuis plusieurs semaines, ce représentant syndical souhaite notamment que l’État se penche plus sérieusement sur la question des zonages ou encore des retenues d’eau. "Il faut que l’on défende l’agriculture française pour nourrir les Français, mais on ne fera rien sans eau. L’agriculture à besoin d’eau, donc il faut la stocker, c’est ce que l’on est venu faire entendre au ministre", insiste de son côté Élise Michallet, la présidente de la FDSEA Rhône. Un sujet pour le moins délicat dans un contexte où les retenues colinéaires suscitent un débat très vif en France au regard de la mobilisation d’associations pour la protection de l’environnement et la préservation de la ressource en eau. "Laissez-nous produire parce qu’on est motivé et on a envie de remplir les assiettes de nos concitoyens", plaide Élise Michallet, celle qui est aussi et surtout exploitante d’élevage bovin à Saint-Genis-les-Ollières. 

"Que l'on ait une agriculture française qui fonctionne, c’est l’intérêt des agriculteurs, mais c’est l’intérêt de notre pays. C’est bon pour l’économie, c’est bon pour l’écologie"
Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique.
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"Quand on entend laisser nous travailler, on ne peut qu’être d’accord", reconnaît Christophe Béchu. En déplacement dans le Rhône durant 24 heures pour "montrer toutes les facettes dont on a besoin en termes de transition écologique", du logement, au transport en passant par l’agriculture, le ministre se dit prêt à "se demander comment on soutient une agriculture qui doit pouvoir vivre de ses revenus et faire en sorte que ce qu’il y a dans nos assiettes vienne de moins loin, parce que c’est bon pour l’économie et l’écologie". 

Encadrer la saisonnalité des produits pour réduire les importations, la fausse bonne idée ?

Un défi de taille alors que les producteurs de l’Hexagone sont confrontés à une augmentation des importations de produits en provenance de l’étranger. Pour Frédéric Goyet de l’entreprise Lyon Sélect, l’un des 25 grossistes installés au Marché de gros de Corbat, la solution pourrait en partie passer par une réglementation de la saisonnalité. "Il faudrait donner des périodes de production et de commercialisation en fonction des origines", estime ce revendeur de la région lyonnaise qui confie qu’aujourd’hui seulement 60 à 65% de ses produits sont d’origines françaises. "Si l’on se donnait une réglementation sur des périodes de production ou de commercialisation, ce serait beaucoup plus simple et tout le monde s’y retrouverait", explique-t-il. 

"Pour que nous les revendeurs soyons satisfaits au même titre que les producteurs, on a besoin que soient respectées les saisons en valorisant les produits français"
Frédéric Goyet, grossiste, Lyon Sélect
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Au même titre que l’affichage environnemental des produits, la provenance ou encore l’origine, le sujet de la saisonnalité devrait bien être sur la table du gouvernement dans les prochains mois, mais Christophe Béchu assume ne pas vouloir se précipiter sur un tel sujet, au risque de recréer "des règles qui vont générer de l’incompréhension parce qu’on aura rajouté des normes". Surtout,  si une réglementation sur la saisonnalité venait à être prise on craint une possible rupture avec les partenaires étrangers de la France, qui pourrait cette fois pénaliser les exportations des producteurs français.

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