Paul-Maurice Morel
Paul-Maurice Morel, président de la Fondation Paul Bocuse

"Nous apprenons à nos jeunes à cuisiner" revendique Paul-Maurice Morel

Paul-Maurice Morel, président de la Fondation Paul Bocuse, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.

Il est l'associé lyonnais et l'alter ego de Jérôme Bocuse, le fils du "pape de la gastronomie" qui, depuis le décès de son père en janvier 2018, pilote le groupe Bocuse (2 000 salariés, 150 millions d'euros de chiffe d'affaires) depuis Orlando, en Floride.

Paul-Maurice Morel est également le président de la Fondation Paul Bocuse qui vient de célébrer sa toute première promotion de commis de cuisine, en partenariat avec la Société d'enseignement professionnel du Rhône (reconnue d'utilité publique).

"Nous avançons doucement et sûrement vers ce qui était l’objectif de la Fondation. L’intelligence va des mains au cerveau, pas l’inverse, c’est ce que nous a demandé Paul Bocuse : des apprentis, des personnes qui connaissent les bases de la cuisine."

Une manière aussi de revenir aux fondamentaux, à savoir de la transmission du geste des cuisiniers, le seul et véritable credo de Paul Bocuse, aujourd'hui, celui de la fondation Paul Bocuse qui a donc lancé une formation professionnelle en cuisine.

Derrière cette formation professionnelle, on sent l'envie de tourner la page de l'Institut Paul Bocuse, devenu Institut Lyfe, dont la stratégie ne colle plus à l'esprit intiial de Paul Bocuse et Gérard Pélisson (groupe Accor), co-fondateurs de ce qui était voué à former des chefs cuisiniers. Las, Jérôme Bocuse avait dénoncé des “bouleversements organisationnels (qui) ternissent et malmènent les valeurs et l’image de Paul Bocuse et instrumentalisent le nom ‘Bocuse’ pour transformer le projet pédagogique qu’il a toujours soutenu en projet marketing global”.

Fin de l'histoire Bocuse, donc,avec l'école nationale des arts culinaires des débuts mais renouveau avec la Fondation Paul Bocuse et sa nouvelle formation professionnelle en cuisine.

Lire aussi : Enquête. L’institut Paul-Bocuse dans la tourmente


La retranscription intégrale de l'entretien avec Paul-Maurice Morel

Bienvenue et bonjour à tous, nous accueillons aujourd’hui Paul Maurice Morel, président de la Fondation Paul Bocuse.

C’est cela même, merci de votre invitation.

C’est nous qui vous remercions, parce que vous vous faites rare dans les médias et nous sommes très honorés de vous recevoir aujourd’hui. La Fondation Paul Bocuse a fêté ses 21 ans cette année : transmettre, soutenir, accompagner sont ses missions. Comment, aujourd’hui, 21 ans après, définissez-vous la mission de la Fondation Paul Bocuse ?

Vous savez, on met un pas devant l’autre, petit à petit. Vingt-et-un ans, c’est l’âge de la maturité complète, particulièrement aux États-Unis où Jérôme Bocuse évolue depuis des années, Jérôme Bocuse, le président d’honneur de la Fondation Paul Bocuse. Nous avançons doucement et sûrement vers ce qui était l’objectif de la Fondation. L’intelligence va des mains au cerveau, pas l’inverse, c’est ce que nous a demandé Paul Bocuse : des apprentis, des personnes qui connaissent les bases de la cuisine. La base de la cuisine traditionnelle fait la qualité. C’est aussi un soutien à nos terroirs, au monde paysan avec lequel nous sommes très proches, et puis la qualité pour la santé publique dans l’assiette. Nous apprenons à tous ces jeunes le bien manger et le bien faire à manger.

Effectivement, vous parliez de cet esprit, l’esprit de Paul Bocuse, qui a beaucoup influencé la Fondation. Sa mission a toujours été de former des cuisiniers, des gens qui cuisinent. Aujourd’hui, la Fondation Paul Bocuse a-t-elle vocation à devenir une école de cuisine ?

Alors, cela a toujours été dans l’esprit. À l’époque, le dispositif était complet et il fallait s’occuper de ces jeunes qu’on a appelés souvent, trop souvent - c’est de moins en moins le cas - des jeunes en marge du monde de l’éducation. Souvent, les choses se jouent entre la 5e et le baccalauréat au plus tard, mais surtout entre la 5e et la 3e. On parlait à l’époque de voies de garage pour nos métiers. Paul Bocuse a voulu, avec cette Fondation, donner une chance à tous ces jeunes, à toutes ces personnes en difficulté pour des raisons familiales ou d’évolution personnelle. À 12-15 ans, on n’est pas le même qu’à 15-20 ans. Voilà, cela a été cette première marche que nous a proposée Paul Bocuse.

Au fil des années, au fil des équipes arrivées au sein du groupe Bocuse, avec l’arrivée de Jérôme Bocuse et de moi-même à la présidence, nous avons professionnalisé les choses. Nous avons eu la chance de rencontrer Eugénie Guillermin, qui s’occupe de la pédagogie, Olivier Rejany, puis Caroline Dupain qui développe la Fondation en Suisse. Nous avons professionnalisé les titres, et c’est ainsi que nous avons obtenu un titre professionnel de la SEPR (Société d'enseignement professionnel du Rhôn), strictement centré sur les arts culinaires, où l’on met de côté une partie de la théorie qui n’est pas nécessaire ou vitale dans nos métiers et qui peut s’apprendre en annexe. Avec l’avènement de l’intelligence artificielle et des cours à distance, les jeunes peuvent se spécialiser. D’ailleurs, beaucoup de jeunes issus de filières comme la communication, le marketing ou des voies plus artistiques reviennent à leur premier amour, celui qu’ils avaient à 15 ans, quand ils voulaient cuisiner comme leur grand-mère ou leur mère. Ils viennent suivre nos formations.

Mais finalement, quelle sera la différence entre cette formation dispensée par la Fondation Paul Bocuse et d’autres écoles de cuisine reconnues ?

D’abord, nous sommes accessibles à tous grâce à nos membres fondateurs, que je remercie encore, et grâce à tous les bénévoles. Nous avons 75 ateliers en France et dans le Benelux, animés par des gens passionnés par nos métiers et par l’œuvre de Paul Bocuse. Nous sommes accessibles à tous : les formations sont financées et les jeunes sont accompagnés par les professionnels. Une formation par les professionnels, pour les professionnels, afin de professionnaliser les jeunes, sans qu’ils aient à casser leur tirelire ou contracter un emprunt pour se payer cette formation.

Aujourd’hui, dans les écoles reconnues, il faut effectivement contracter des prêts, car les prix sont très élevés. On parle beaucoup - ce n’est pas nouveau - du manque de main-d’œuvre. Je n’aime pas ce mot, mais la restauration a du mal à recruter. Comment, vous, la Fondation, contribuez-vous à répondre à ces enjeux ?

Je le disais tout à l’heure : par les professionnels, pour les professionnels. Nous savons de quoi nos confrères ont besoin. Nous savons, à l’intérieur du groupe, quels sont les besoins des restaurants qui cuisinent encore — c’est important de le dire. La santé passe par l’alimentation et nous apprenons à nos jeunes à cuisiner, à maîtriser les bases de la cuisine. Nous savons exactement ce dont ces professionnels, qui manquent de collaborateurs, ont besoin. Nous réorientons également vers ces métiers : c’est aussi le rôle de la Fondation.

Les jeunes ont une appétence pour ces métiers, malgré certains a priori. Ce sont des métiers qui permettent de voyager, on a un métier dans les mains, comme aurait dit le patron, comme aurait dit Paul Bocuse. Un métier dans les mains qui permet de voyager partout, d’ouvrir les horizons. On retrouve une structure de brigade. À l’heure où l’on entend des bruits de bottes à droite et à gauche, les jeunes ont besoin d’être structurés, cela leur donne des repères. Nous avons constaté un véritable engouement pour cette formation et nous en sommes très heureux.

En tout cas, nous terminerons sur ces mots. La Fondation Paul Bocuse, qui a fêté ses 21 ans, a vu sortir cette année sa première promotion d'apprentis cuisiniers. Nous lui souhaitons de belles nouvelles promotions. Merci beaucoup d’être venu sur le plateau de 6 minutes chrono pour nous expliquer les enjeux de cette Fondation. Nous suivrons évidemment son actualité. À très bientôt, au revoir.

Au revoir.

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