La "mère" Brazier, à Lyon et au col de la Luère, trois étoiles Michelin dans chaque restaurant
La « mère » Brazier, à Lyon et au col de la Luère, trois étoiles Michelin dans chaque restaurant
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Eugénie Brazier, pionnière inégalée de la gastronomie

Elle a fait de Lyon la "capitale mondiale de la gastronomie" et a été la première femme à obtenir trois étoiles au Guide Michelin.

Au printemps 1954, le directeur du Waldorf-Astoria de New York – l’un des hôtels les plus mythiques de la planète – propose 150 000 dollars par an à Eugénie Brazier, une somme jamais vue à l’époque, pour s’offrir ses services outre-Atlantique. La cuisinière décline l’invitation, préférant le bon air du col de la Luère, dans les monts du Lyonnais. Derrière ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler une institution, la mère Brazier est un personnage.

L’histoire du 12, rue Royale est d’abord l’histoire d’une petite fermière de la Bresse devenue, en quelques années, la reine des cuisinières, “la sainte des gastronomes” pour reprendre la formule de Curnonsky, élu “Prince des Gastronomes”. C’est chez elle, en plein cœur de Lyon, que tout ce que la planète compta de têtes couronnées, de présidents et de vedettes est venu goûter au fond d’artichaut, au foie gras et à la poularde demi-deuil.

Fille-mère

Née Brazier un 12 juin 1895 dans un village de l’Ain, la petite Eugénie est, dès ses cinq ans, préposée au gardiennage des cochons de la ferme familiale. À l’époque, la vie est dure. En guise de déjeuner, elle avale un simple bouillon de poireaux et de légumes, mélangé d’œufs battus, dans lequel trempent de grandes tranches de pain. Pour la toilette, sa mère mouille un torchon dans la rosée des champs. Elle n’a que dix ans quand celle-ci meurt. S’ensuivent des placements en ferme jusqu’à ses vingt ans. Fin 1914, elle est contrainte de quitter la campagne suite à la naissance de son fils Gaston, alors qu’elle n’était pas mariée. Être fille-mère à l’époque n’est pas vu d’un bon œil. Son fils reste en nourrice dans l’Ain, Eugénie est embauchée comme “bonne à tout faire” chez les Milliat, un fabricant de pâtes alimentaires. Elle y apprend la cuisine et se découvre une passion, et un certain talent. Quelques années plus tard, Eugénie Brazier entre chez la mère Fillioux, l’un des rares restaurants gastronomiques de Lyon. C’est chez elle, au 73 de la rue Duquesne, que la mère Brazier apprendra l’essentiel de son registre culinaire. Elle passera ensuite plusieurs années à la non moins renommée Brasserie du Dragon, rue de la République. Et le 10 avril 1921, profitant de sa réputation naissante et de quelques économies, Eugénie Brazier acquiert le 12, rue Royale, une ancienne épicerie-comptoir en faillite.

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