Simon Aho
Simon Aho et médecin oncologue et chercheur au Centre de Recherche en Cancérologie de Lyon

Cancer du sein : "il y a eu récemment des innovations majeures" assure Simon Aho

Simon Aho, médecin oncologue au Centre de recherche en cancérologie de Lyon Léon Bérard, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.

Chaque mois d’octobre, la campagne Octobre Rose rappelle l’importance du dépistage organisé du cancer du sein, premier cancer chez la femme. 
En France, on estime qu'1 femme sur 8 développera un cancer du sein.

Le but d’Octobre Rose est de sensibiliser le grand public au cancer du sein, de promouvoir le dépistage précoce et de soutenir la recherche médicale ainsi que les personnes touchées.

Concrètement, c'est d'informer sur l’importance du dépistage (mammographie tous les deux ans pour les femmes de 50 à 74 ans, ou plus tôt en cas de risque particulier), de rappeler que détecté tôt, le cancer du sein peut être guéri dans une grande majorité des cas, de mobiliser et collecter des fonds pour financer la recherche et améliorer la prise en charge et de donner de la visibilité aux associations et aux actions solidaires envers les patientes et leurs proches.

Avancées scientifiques majeures

Simon Aho, jeune médecin oncologue au centre Léon Bérard*, assure que la recherche "avance très rapidement" avec "des innovations majeures ces dernières années".

* au sein de l’équipe "BMP : Ecosystème, Stemness & Dynamique du Cancer", dirigée par le Dr Véronique Maguer-Satta.

Si, en France, on estime qu'1 femme sur 8 développera un cancer du sein, il existe néanmoins de nombreux sous-type de gravité variable. "Le cancer du sein est une maladie hétérogène, composée de plusieurs sous-groupes très différents les uns des autres, en termes de pronostic et de comportement biologique."

"Pour vous répondre, il faut préciser que l’on parle du cancer du sein mais en réalité, il faudrait plutôt dire les cancers du sein, car il y en a grossièrement trois types. Le plus fréquent, ce sont les cancers du sein dépendants des hormones féminines. Il y a aussi les cancers du sein dépendants de l'expression d'une protéine à la surface des cellules, appelée HER2, que l’on nomme cancers du sein HER2+. Et enfin, il y a les cancers du sein triple négatif, qui ne dépendent ni des hormones féminines, ni de la signalisation HER2."

Trois typologies, et "pour chacune d'entre elles, des avancées".

Lire et voir aussi : "La prévention des cancers par le sport est un vrai sujet de société" assène Sophie Moreau de Courir pour Elles

Le cancer du sein en chiffres

- Plus de 61 000 femmes atteintes

- Plus de 12 000 décès en France

- 1re cause de mortalité par cancer chez les femmes

- 88% de taux de survie à 5 ans

- 60 % des cancers du sein

sont détectés à un stade précoce et 7,3 % le sont à un stade métastatique.

- 20 000 cancers du sein
pourraient être évités chaque année (soit un tiers des nouveaux cas de cancers pour l’année 2023).

- 61 214 nouveaux cas
ont été diagnostiqués en 2023.

Sources : Fondation Arc et Ligue du Cancer

Les 3 typologies de cancer du sein

- cancers du sein hormonodépendants : environ 70% des cas. Meilleur pronostic. Traitements médicaux basés sur les traitements anti-hormonaux en première intention puis chimiothérapie (conventionnelle ou sous forme d'anticorps conjugués).

Les avancées : amélioration des traitements antihormonaux avec meilleure capacité à contourner les phénomènes de résistance, amélioration des traitements partenaires (inhibiteurs de CDK4/6), émergence de traitements ciblant certaines anomalies moléculaires propres à la tumeur dans le cadre de traitements de + en + personnalisés (inhibiteurs de PIK3CA etc), développement d'anticorps conjugés de + en + efficaces etc.

- cancers du sein HER2+ : environ 15% des cas. Pronostic initialement moins bon mais actuellement bien meilleur du fait des nouveaux traitements ciblant HER2.

Les avancées : meilleurs inhibiteurs d'HER2, nouveaux anticorps conjugués

- cancers triple négatifs : environ 15% des cas. Les + agressifs. Historiquement traitement par chimio conventionnelle.

Les avancées : immunothérapies, anticorps conjugués, traitements ciblant mutation de prédisposition BRCA1-BRCA2 (inhibiteurs de PARP).

Source : Simon Aho.


La retranscription intégrale de l'entretien avec le Dr Simon Aho

Bonjour, vous regardez 6 minutes chrono, l'émission quotidienne de Lyon Capitale. Nous recevons aujourd'hui le docteur Simon Aho. Bonjour. Simon Aho, vous êtes médecin chercheur au Centre Léon-Bérard, spécialisé dans l'étude et la lutte contre les cancers. Nous sommes au mois d'octobre, le mois d'Octobre Rose, dédié à la lutte contre le cancer du sein. Première question : pouvez-vous nous dire aujourd'hui où en est globalement la recherche contre le cancer du sein ?

Oui, c'est quelque chose qui avance très rapidement. Il y a eu des innovations majeures ces dernières années. Pour vous répondre, il faut préciser que l’on parle du cancer du sein mais en réalité, il faudrait plutôt dire les cancers du sein, car il y en a grossièrement trois types. Le plus fréquent, ce sont les cancers du sein dépendants des hormones féminines. Il y a aussi les cancers du sein dépendants de l'expression d'une protéine à la surface des cellules, appelée HER2, que l’on nomme cancers du sein HER2+. Et enfin, il y a les cancers du sein triple négatif, qui ne dépendent ni des hormones féminines, ni de la signalisation HER2.

Donc trois typologies ?

Trois typologies, et pour chacune d’elles, il y a eu des avancées. Pour les cancers du sein hormonodépendants, de nouvelles méthodes de traitement antihormonaux, plus efficaces et mieux ciblées, ont été mises au point récemment. Pour les cancers HER2+, c’est la même chose, avec des anticorps et des inhibiteurs plus performants. Enfin, pour les cancers du sein triple négatif, l’immunothérapie a émergé ces dernières années : le but est de stimuler le système immunitaire afin qu’il reconnaisse et détruise les cellules tumorales.

Donc innovation, des innovations. Et au Centre Léon-Bérard, à Lyon, quelles sont aujourd’hui les recherches les plus prometteuses ?

Il y a beaucoup de recherches, cliniques et fondamentales. Sur le plan clinique, nous accompagnons et nous sommes moteurs dans plusieurs projets. J’ai évoqué les avancées propres à chaque sous-type, mais il y a aussi des avancées communes, notamment les anticorps conjugués : ce sont des molécules composées d’un anticorps qui reconnaît une cible exprimée spécifiquement dans les cellules tumorales, couplé à une chimiothérapie. Plusieurs études sont en cours au Centre Léon-Bérard, notamment sur les cancers du sein triple négatif. Nous sommes très impliqués dans ces travaux.

Et sur la recherche fondamentale ?

Au laboratoire du docteur Véronique Magarsata, nous nous intéressons au cancer du sein triple négatif, en particulier au type basal-like. Nous avons mis en place un programme pour comprendre les mécanismes de développement de ce cancer. Nous avons identifié une voie de signalisation qui semble impliquée et nous aimerions tester des inhibiteurs de cette voie.

Sur cette recherche-là, entre le moment où vous identifiez une piste et l’aboutissement, combien de temps cela peut-il prendre ?

C’est considérable. En années bien sûr, peut-être une dizaine. Entre le moment où l’on met le doigt sur quelque chose d’intéressant et le développement d’un traitement, il y a énormément de prérequis précliniques à établir pour être suffisamment convaincant et passer à la recherche sur l’homme. Ensuite, cette recherche progresse pas à pas : petites cohortes, premières administrations, puis phases 2 et 3 si les résultats sont convaincants.

Et globalement, sur la recherche et la lutte contre le cancer du sein, peut-on dire qu’il y a plutôt de l’espoir, que c’est positif ?

C’est extrêmement positif. Tous les traitements évoqués sont des avancées récentes, parfois majeures. Il existe aussi des traitements plus ciblés, en fonction de mutations détectées dans la tumeur ou héritées des parents. Chaque année, lors des congrès internationaux comme l’ASCO ou l’ESMO, de nouvelles avancées majeures sont présentées.

La recherche avance, mais le dépistage reste essentiel. Quel message souhaitez-vous rappeler aux femmes concernées par le cancer du sein ?

Vous avez tout à fait raison. Nous investissons beaucoup dans la recherche de traitements innovants, mais le meilleur moyen de se prémunir reste le dépistage. Il est accessible à toutes. Pour les femmes à risque moyen, sans prédisposition particulière, de 50 à 74 ans, une mammographie tous les deux ans est recommandée. Cela permet de sauver de nombreuses vies, car le cancer est alors détecté au stade localisé, moment où il est guérissable et peut être pris en charge de manière adaptée.

Merci beaucoup docteur Simon Haot d’être venu sur le plateau de 6 minutes chrono. Nous avons expliqué l’état de la recherche à Lyon, au Centre Léon-Bérard. Pour plus d’informations, vous pouvez consulter www.lyoncapitale.fr. Merci beaucoup.

Merci à vous.
Au revoir.

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