Quelle que soit la méthode de comptage, il y aurait donc aujourd’hui à Lyon davantage de logements vides que de personnes contraintes de dormir dans la rue. © Pixabay / Planet_fox
Quelle que soit la méthode de comptage, il y aurait donc aujourd’hui à Lyon davantage de logements vides que de personnes contraintes de dormir dans la rue. © Pixabay / Planet_fox

Crise du logement : pourquoi l’habitat vacant n’est-il pas réquisitionné ?

Les écologistes et plusieurs associations demandent à l’État d’utiliser son pouvoir de réquisition du logement vacant dans le contexte de la lutte contre le mal-logement et le sans-abrisme.

Un constat. La crise du logement et son pendant le plus extrême, le sans-abrisme, se développent. “Dans la métropole lyonnaise, il y a 2 500 personnes qui dorment dehors, plus 5 000 dans des conditions très précaires. Si vous ajoutez les personnes qui vivent chez des proches faute de mieux, cela fait 25 à 30 000 personnes sans réelle solution d’hébergement”, rappelait Amaury Dewavrin, président du foyer Notre-Dame des Sans-Abri en avril dans l’émission “6 minutes chrono” de Lyon Capitale. Quelle que soit la méthode de comptage, il y aurait donc aujourd’hui à Lyon davantage de logements vides que de personnes contraintes de dormir dans la rue.

Conscientes de ces ordres de grandeur, de nombreuses associations d’aide aux personnes à la rue – comme la Fondation pour le logement (ex fondation Abbé-Pierre), le collectif Jamais Sans Toit, l’association Droit au Logement – appellent à la réquisition des logements vacants de longue durée par l’État et les collectivités locales. Le but : en faire du logement d’urgence. Problème, depuis l’après-guerre et les grands mouvements liés à la reconstruction, l’État, pourtant garant du droit au logement, n’a plus jamais utilisé ce pouvoir de réquisition du logement vacant.

Nous sommes tout à fait favorables à la réquisition par la préfecture, avance Sophia Popoff. Nous lui avons d’ailleurs envoyé plusieurs courriers en ce sens, avec une liste de logements vacants longue durée à fort potentiel, détenus par des sociétés, pas des propriétaires individuels. Il y a parfois des immeubles entiers. Par exemple, l’intérieur de l’îlot du Printemps de la Presqu’île, qui appartient à un fonds d’investissement étranger, est vide depuis dix ans. La préfecture nous a répondu de façon très claire qu’elle ne souhaitait pas utiliser son pouvoir de réquisition puisque c’était porter atteinte aux droits de propriété”, peste l’élue écologiste qui rappelle l’encadrement légal : la réquisition se fait contre une indemnisation, avec une durée de 9 ans maximum, et la possibilité de contester en justice la décision.

La Ville va-t-elle réquisitionner des logements privés ?

Un volontarisme qui revient toutefois comme un boomerang : plusieurs associations rappellent que les collectivités locales disposent elles aussi de leviers pour agir en matière de réquisition ou de mobilisation du parc vacant. Juliette Murtin, professeure de français à Lyon et porte-parole du collectif Jamais Sans Toit, l’explique ainsi : “Les maires ont le droit de réquisitionner des locaux vides. Le maire de Lyon s’y était même engagé pendant la campagne municipale, quand il nous avait rencontrés.”

Dans les faits, il y a actuellement peu de chances de voir demain Grégory Doucet réquisitionner des logements privés. “Les services juridiques sont formels. Le maire a le droit de réquisitionner seulement en cas de catastrophes naturelles ou de sinistres majeurs. Malheureusement le sans-abrisme ne rentre pas dans ce cadre. Le seul pouvoir public qui est compétent en la matière, c’est l’État”, pointe Sophia Popoff qui rappelle avoir fait passer le budget sur le logement d’urgence de 37 000 euros à 2,5 millions d’euros. Même son de cloche à la Métropole de Lyon : “Une telle décision serait immédiatement cassée par le tribunal administratif au nom du droit de la propriété”, prédit Renaud Payre. En février dernier, Ian Brossat, sénateur communiste de Paris et porte-parole du PCF, avait proposé une réforme sur le renforcement du pouvoir de réquisition des maires. Une proposition de loi encore à l’étape de l’examen en commission à ce jour.

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