Livres : notre sélection de l’été 

Lyon Capitale vous propose une sélection d’auteurs régionaux pour vous tenir compagnie en vacances. Du suspense, de la nostalgie footballistique, de l’art ou tout simplement des tranches de vie… Avec toujours, comme fil conducteur, cet amour inconditionnel de la langue française.


Une enquête théâtrale et féline…

Singulier parcours que celui de Sophie Chabanel… Après avoir brillamment réussi ses études et obtenu son diplôme d’HEC, cette Lyonnaise a un temps occupé de hautes fonctions en entreprise.

Mais elle n’y a pas trouvé suffisamment de sens ni d’intérêt. Elle s’est alors tournée vers le monde associatif et, surtout, l’écriture. Moins lucratif mais plus épanouissant…

Elle est l’autrice de Maraudes littéraires qui raconte son expérience au sein du Samu social, à Lyon. Et d’une série d’enquêtes policières menées par la commissaire Romano, propriétaire d’un spécimen félin particulièrement susceptible.

La Tragédie du chat est le quatrième roman de cette série. Pour la petite histoire, même si le livre se déroule à Lille, il a été écrit à Lyon durant le confinement et inspiré par le théâtre des Célestins, que Sophie Chabanel a exploré de long en large.

Tout commence en effet lorsque le comédien vedette d’une troupe théâtrale meurt écrasé par une pièce monumentale du décor, en pleine représentation des Suppliantes, d’Eschyle. La thèse de l’accident devrait s’imposer. Si la tenace commissaire ne l’écartait résolument, persuadée qu’il s’agit d’un meurtre prémédité…

Qui avait intérêt à voir ainsi disparaître ce comédien charismatique en dépit de son nom (Véran) ? Les agités d’extrême gauche adeptes de la cancel culture ou les identitaires d’extrême droite ? Sa maîtresse faussement libérée et réellement jalouse ? Sa sœur très catho avec qui il se déchirait au chevet de leur mère mourante ? Romano ne néglige aucune piste et nous entraîne dans différents milieux. Ce qui permet d’entretenir le suspense et de dresser, en creux, un portrait à la fois drôle et juste de notre société.

La Tragédie du chat – Sophie Chabanel, éditions du Seuil collection Cadre Noir, 304 p. 19 €.


 

Une tragi-comédie footballistique

Pour tous ceux qui sont en âge de l’avoir vue, la rencontre France-Allemagne, en demi-finale de la coupe du monde de foot à Séville en 1982, est restée un souvenir douloureux.

Un match de légende et une défaite injuste qui ont durablement marqué une génération de passionnés de la chose footballistique.

Didier Tronchet, écrivain et auteur de BD lyonnais, en fait partie. Jeune homme à l’époque, il en a conçu un sentiment d’injustice et d’extrême frustration.

Jusqu’au jour où, quatre décennies plus tard, en visionnant une énième fois les vidéos du match, un détail qui avait échappé à tous lui saute aux yeux (nous ne le révélerons pas afin de garder le suspense). Intrigué, survolté par une découverte qu’il juge capitale, il décide de mener l’enquête avec son grand ami, journaliste à L’Équipe. Et il en fait un roman, Les Fantômes de Séville.

Qui est le récit de toute une série d’aventures rocambolesques, plus ou moins inventées mais toujours crédibles, suivant l’auteur et son acolyte, de la Suisse aux Pays-Bas, à la rencontre des principaux protagonistes de l’époque : Michel Platini et Michel Hidalgo, Patrick Battiston, Harald Schumacher…

Ces incroyables péripéties sont racontées avec une drôlerie et une tendresse qui rendent irrésistible la lecture du roman. Que l’on ait ou non été spectateur de ce match maudit.

Les Fantômes de Séville – Didier Tronchet, La Fosse aux ours, 160 p., 18 €.


L’ouroboros quèsaco ?

Le quatrième numéro de la revue L’Ouroboros (le mot désigne le serpent qui se mord la queue) est paru. Certes il vous faudra débourser 25 euros pour en faire l’acquisition. Mais la qualité des – nombreuses – images reproduites, la mise en page soignée et la valeur des textes en font un véritable objet d’art.

Les champs d’investigation de la revue sont ainsi définis dans les premières pages : littérature, poésie, philosophie, arts visuels, BD, cinéma, photographie, théâtre, musique, psychologie, psychiatrie, psychanalyse, ethnologie, anthropologie, mythologie et pratiques militantes.

La revue menée par Odile Nguyen-Schoendorff contient une passionnante étude sur son frère Max Schoendorff (homme de culture et peintre avant tout, mort en 2012). Ainsi qu’un reportage sur les Indiens Hopis.

Entre autres sujets explorés. “Ne pas hurler avec les loups de la démocratie libérale, ni avec l’idéologie bêtifiante du vivre-ensemble”, telle est la volonté des animateurs de L’Ouroboros. Leur démarche mérite d’être soutenue.

L’Ouroboros – Revue-dard n° 4, 216 p., 25 €.


Des débuts prometteurs…

Jeune écrivain lyonnais, Mathieu Bermann s’était signalé à notre attention avec Amours sur mesure et Un coup d’un soir suivi de Dans le lit de Marin.

De courts romans où étaient disséqués, avec talent et précision, les sentiments amoureux, mais pas que, de jeunes hommes modernes. On retrouve cet art de sonder les psychés dans son dernier ouvrage.

Mais cette fois, ce ne sont pas les amours homosexuelles sur lesquelles se penche l’écrivain. Il s’intéresse au cas d’un tout jeune enfant de quatre ans et demi (à cet âge-là une moitié d’année, ça compte !) dont la mère, pas plus que le père d’ailleurs, ne s’occupe guère. Et qui se trouve donc chez ses grands-parents.

C’est là que le narrateur du roman, à force d’observer cet enfant “difficile”, ses caprices, ses jeux désordonnés, son désarroi, parvient petit à petit à le comprendre.

Une complicité se noue entre l’écrivain et le garçon. Une vraie affection aussi puisque Mathieu Bermann dresse de l’enfant un portrait bouleversant. Où l’on voit comment le manque d’amour et d’attention compromet son avenir. Et comment les quatre premières années de son existence, sur lesquelles l’écrivain revient par petites touches, sont, au sens littéral du terme, primordiales.

Un début dans la vie – Mathieu Bermann, éditions P.O.L, 176 p., 18 €.


Carnets d’une promeneuse

Dans son dernier ouvrage, Jusqu’où la ville, Fabienne Swiatly nous emmène en promenade, à Lyon. Non sans nous avoir d’abord expliqué, dans une courte préface, comment elle s’est retrouvée dans cette ville.

Pour des raisons qui mélangent, comme pour beaucoup, nécessité professionnelle et vie amoureuse. En tout cas, elle a su parfaitement observer la cité et (d)écrire les sentiments naissant en elle selon les quartiers, longuement explorés au seul rythme qui vaille, celui de la marche.

Et ce n’est pas seulement le Lyon touristique qu’elle scrute. Mais ce qu’il y a derrière le paravent des clichés.

De l’opéra, par exemple, elle ne note pas simplement l’audace architecturale (dont Lyon a toujours manqué) mais la manière dont chaque soir sur son esplanade “de jeunes garçons dansent la saga urbaine – gestuelle resserrée qui pourtant les décolle du sol”. Elle trouve les mots justes pour évoquer aussi ces femmes qui patientent derrière le pare-soleil en attendant de mettre leur corps au service des hommes.

Et qui, “entre deux passes, échangent en langue peul des nouvelles sur leurs enfants ou les fins de mois difficiles”. Dans chacun des textes courts qui forment ce recueil, elle recrée l’image mais aussi l’humanité qui s’y niche.

Jusqu’où la ville – Fabienne Swiatly, éditions le Clos Jouve, 64 p., 19 €.


 

 

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