Fin de malédiction pour les peintres lyonnais ?

C'est ce que souligne la dernière expo du musée des Beaux-arts de Lyon.

"L'école de Lyon, le bagne de la peinture". En une phrase assassine, le poète et critique d'art Charles Baudelaire régla définitivement son compte à la peinture lyonnaise. "Tout ce qui vient de Lyon est minutieux, lentement élaboré et craintif... On dirait que les cerveaux y sont enchifrenés" poursuivait le poète, qui, adolescent, avait passé quatre tristes années en pensionnat à Lyon.
Des artistes comme Revoil, Fleury Richard, Berjon, Flandrin ou encore Orsel, Meissonier et Carrand méritaient-ils vraiment ce verdict sans appel ? Certainement pas ! C'est ce que souligne clairement l'exposition "le temps de la peinture, Lyon 1800-1914" au musée des Beaux-arts de Lyon. En resituant les artistes lyonnais du 19e siècle - englobés sous le terme d' "école lyonnaise" - dans le mouvement général des arts, elle révèle des peintres qui n'ont rien à envier à leurs contemporains européens, fussent-ils Courbet, Overbeck, Burne-Jones ou Cornelius.
"Cette exposition nous permettra enfin d'oublier la malédiction baudelairienne qui a pesé longtemps sur la peinture lyonnaise" s'enthousiasme l'adjoint à la Culture de Lyon Patrice Béghain.
Sur les quelques trois cents œuvres présentées dans cette exposition, la plupart n'ont pas été présentées au public, ou très peu. Elles sont sorties des réserves du musée, de collections privées ou de grands musées européens. On n'échappe pas à la reconstitution du salon des Fleurs, qui renoue avec les origines du musée, et de l'Ecole des Beaux-arts qu'il accueillit en son sein dès 1805. L'école disposait d'une classe de fleurs renommée, dirigée notamment par Berjon, qui fournissait des motifs à l'industrie de la soierie lyonnaise.
De la création de l'école des Beaux-arts - d'où sortirent dix-sept prix de Rome de 1831 à 1860 ! - à l'exposition universelle de 1914, où furent exposés Matisse, Picasso, mais aussi les Lyonnais Bonnefond, Appian ou Thierrat, l'exposition balaie un siècle de peinture jalonné par de grands noms et de très belles œuvres. On glisse du genre dit troubadour (peinture sentimentale à la Greuze) avec Fleury Richard, à la scène de genre avec Bonnefond ou Grobon, des œuvres spirituelles d'Orsel à la peinture plus réaliste de Meissonier, du paysage de Carrand ou Ravier à la spiritualité de Victor Orsel. Dans cette galerie de peintres singuliers, on retiendra trois noms principaux. Une découverte : Jean-Baptiste Frenet et ses projets de décors pour la crypte de la chapelle Sainte-Blandine (jamais réalisés car ils déplurent aux autorités religieuses) et ses autoportraits. Un classique : Puvis de Chavanne, le peintre décorateur qui fut admiré par Seurat, Gauguin et le jeune Picasso (et en regard, de belles œuvres d'un de ses disciples lyonnais méconnus, Séon). Et un incontournable : Louis Janmot, auteur du Poème de l'âme (présenté ici dans son intégralité, peinture et dessins) dont Baudelaire, enfin conquis, vantait le "charme infini" et la "mysticité inconsciente et enfantine".

> Jusqu'au 30 juillet au musée des Beaux-arts de Lyon. 20 place des Terreaux, Lyon 1. 04 72 10 17 40. www.mba-lyon.fr

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