Niek Van de Steeg 1

Expos : Niek Van de Steeg, artiste irradié

La galerie Roger Tator présente les œuvres de l’artiste néerlandais Niek Van de Steeg, qui a pour l’occasion transformé le lieu en laboratoire de formes. À découvrir jusqu’au 8 novembre.

Un jaune éclatant, presque fluorescent, irradie la rue d’Anvers. Et pour cause, l’artiste Niek Van de Steeg en a recouvert la moitié des murs et le plafond de la galerie Roger Tator. Une couleur qui accroche l’œil et qui correspond à celle du yellowcake, ce concentré d’uranium, produit final de l’extraction du minerai et filigrane de cette exposition. À l’origine du projet, la découverte par l’artiste du parc d’activités économiques Michel-Chevalier, dans l’Hérault, construit sur un ancien site d’extraction du minerai radioactif.

Matière première

De ce lieu potentiellement dangereux et néanmoins ouvert au public, Niek Van de Steeg, artiste topographe, a étudié toutes les coordonnées, à partir desquelles il a imaginé cette série d’œuvres. Il prolonge également sa réflexion sur la matière première amorcée il y a quelques années avec sa Maison des matières premières, architecture utopique récemment déclinée en sculpture et girouette au centre d’art Le Lait d’Albi. Source inépuisable d’inspiration, l’ancien site minier, situé près de Lodève, prend alors différentes formes plastiques, du plan d’orientation représentant le parc – œuvre abstraite s’il en est – à une série de céramiques et une vidéo montrant l’artiste face caméra allonger quelques foulées dans le parc en question et commenter, essoufflé, les spécificités du lieu.

Les bas-reliefs réalisés en grès à partir d’un même moule, sortes de minipaysages qui appellent autant à la vue qu’au toucher, semblent pour certains avoir été contaminés par le jaune mural (parties émaillées). Tous uniques, ces objets ondulants séduisants répondent par une matérialité forte à une matière première invisible, à laquelle ils renvoient par contamination de l’esprit. Tout comme l’artiste, exposant son corps à une potentielle radioactivité pendant l’effort, redonne une réalité physique à l’invisible danger, et enclenche la fiction.

Dark Knight

La seconde et dernière salle se veut plus obscure. Contrastant avec la luminosité de celle qui la précède, elle plonge les œuvres dans un bleu nuit et une ambiance de néons façon laboratoire, plus intime et mystérieuse. Outre les bas-reliefs en grès évoquant la fameuse Maison des matières premières, des pièces horizontales et verticales apparaissent entre chien et loup, entre liquide et solide. Obtenues à partir d’un travail sur une porcelaine noir et blanc qui a cristallisé des formes tourbillonnaires, elles sont à la fois support et surface. Ces coupes géologiques d’un territoire abstrait, parfois rehaussées de formes géométriques colorées rappelant celles du Bauhaus, oscillent entre représentation scientifique et expérimentation plastique du paysage. À l’image de ce deuxième ensemble d’œuvres, le travail de Niek Van de Steeg est riche et polysémique.

Tout en partant d’un terrain concret “sculpté” par l’homme – l’ancienne carrière d’uranium –, dont il pointe en filigrane les enjeux économiques et environnementaux, l’artiste crée des pièces qui en appellent à l’imaginaire, aux associations d’idées, et joue sur des répétitions formelles, des échos entre les œuvres, à travers différents styles et médiums. Car, comme le souligne Niek Van de Steeg lui-même, “la matière première, c’est aussi l’histoire de l’art, et l’idée de transformer la matière en œuvre est inépuisable”.

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Parc d’activité – Niek Van de Steeg. Jusqu’au 8 novembre, à la galerie Roger Tator, 36 rue d’Anvers, Lyon 7e.

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Cet article est extrait de Lyon Capitale n°727 (novembre 2013).

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