Dan Walsh à la salle de bains

Depuis le 14 mars, l'espace d'art contemporain La Salle de Bains a quitté son local du Vieux-Lyon aussi exigu qu'une... salle de bains, pour s'installer dans des locaux plus grands, mis à disposition et rénovés par la Ville de Lyon.

Structure associative, la Salle de Bains n'est pas une galerie qui expose pour vendre des œuvres d'artistes préexistantes à l'accrochage, mais un centre de création, exigeant, pointu, très inventif. Les œuvres sont conçues spécialement pour l'exposition, et créées in situ.

Pour la première fois, parce qu'elle est désormais dotée d'un espace plus vaste, la Salle de Bains a choisi un commissaire d'exposition, Dan Walsh, qui a invité six de ses amis pour une création collective. L'idée : créer à partir des matériaux qui seraient restés du déménagement et des travaux : panneaux isolants, bois, bouts de polystyrène, papier bulle, chutes de moquettes, grillages, etc. Et sur un thème d'arrière plan : "En attendant Godot" de Beckett et l'attente. "Les artistes sont arrivés le mardi et ont bossé jusqu'au vendredi, soir du vernissage de l'expo. Ils ont travaillé dans l'urgence, en se concertant en permanence, le plus souvent avec beaucoup d'humour". raconte Noémie Razurel, salariée de la Salle de Bains.

L'exposition relève bien plus d'une scénographie de théâtre, avec une succession d'actes ou de saynètes, que d'une collection d'œuvres. En la parcourant, on s'y raconte très facilement des histoires. On retrouve des matériaux, des formes, des jeux de lumière qui se font écho dans l'espace, comme autant de personnages d'une pièce, d'actions récurrentes. D'emblée, des objets renvoient clairement à l'attente. Le premier : une cigarette plantée là dans le mur... Puis des objets en suspension, des chaises vides, dont certaines plastifiées. Au mur, un point d'interrogation et, plus loin, un point d'exclamation ponctuent la série d'objets que le regard vient de balayer : un arbre-portemanteau beckettien avec des objets suspendus, des panneaux peints en rose, un autre recouvert d'alu, le dessin d'une forme conique. Le fait de retrouver, plus loin dans l'expo, des matières ou des formes (la forme conique d'un porte-voix, le rectangle d'un pupitre ou de gobos (Godot ?) suspendus, le rond d'une cible) lève l'interrogation et active l'exclamation. Une silhouette de personnage beckettien, échappée du carton de l'exposition, s'est glissée dans la reproduction d'un tableau de Jérôme Bosch... On imagine ses mésaventures, absurdes mais non dénuées d'humour, dans cet univers un peu énigmatique, puis son attente, sa très longue attente, jusque vers la mort. Dans la dernière pièce, calées dans un coin : des pelles pour enterrer, des cordes pour se pendre. Déjà, à l'entrée, on avait repéré, suspendu à l'arbre, un arc et sa flèche. Puis, disséminées sur les murs et les vitres, des cibles et des trajectoires. La mort rôde. Après l'attente, les objets en suspension, voilà le pendu. Une petite potence en mécano se dresse dans un angle, avec, à son pied, un jeu du pendu crayonné sur le sol, et sur le mur en ardoise une série de petits traits tracés, puis barrés, à la craie : le décompte des victimes ? Des pointes de couleur rouge, ici et là, puis les trois lettres RED écrites sur un papier en fin d'expo, confirment ce pressentiment morbide. Morbide mais jamais sombre, tant cette exposition est légère, drôle, suggestive et pleine de petites fictions à imaginer.

Revisited, une exposition de Dan Walsh, avec Tilman, Matthew McCaslin, Amy O'Neill, Matilde Alessandra, Lars Wolter,
Dan Walsh, Stephen Felton. La Salle de Bains, 27 rue Burdeau, Lyon 1er.
04 78 38 32 33. www.lasalledebains.net

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