La préfecture du Rhône a été repeinte en orange par des militants de Dernière rénovation ce mercredi 22 mars. (Crédit Dernière rénovation)

Peinture sur la préfecture : des militants de Dernière rénovation face à la justice à Lyon

Trois militants de Dernière rénovation comparaissaient devant un tribunal correctionnel ce mardi pour avoir aspergé la préfecture du Rhône de peinture orange en mars dernier à Lyon.

"J'ai milité pour le zéro déchet, mais je me suis rendu compte que pour faire changer les choses, il fallait en venir à la désobéissance civile." A la barre, M.B, la trentaine, tout comme les deux autres prévenus qui l'accompagnent, assume les faits. Ces trois militants de Dernière rénovation, mouvement citoyen connu notamment pour ses blocages de routes, ont aspergé les grilles et les murs de la préfecture du Rhône d'une peinture acrylique orange le 22 mars dernier pour alerter sur la crise climatique et la nécessité d'accélérer la rénovation thermique des bâtiments, dont le chauffage représente 21 % des émission de gaz à effet de serre en France.

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"Dans l'histoire, si on veut faire bouger les choses, il faut en venir à la désobéissance"

Au profils hétéroclites et souvent peu bavards voire silencieux lors de leurs différentes actions coup de poing, cette audience a permis de dresser le portrait de ces citoyens, engagés pour le climat à travers des voies légales, mais confrontés à "l'impasse" de "l'inaction politique", comme l'explique F.N à la barre. Et cet ingénieur devenu professeur de mathématiques d'ajouter : "Je me suis dis qu'il fallait envisager autre chose." Ce 22 mars, cet "autre chose" était donc d'aller recouvrir la préfecture du Rhône de peinture pour "faire parler du sujet", "demander aux politiques qu'ils avancent". Une action engendrant selon les conseil des parties civiles (Département et préfecture) un préjudice de près de 130 000 €, non violente, illégale, mais "légitime" et menée dans "un cadre éthique" estime l'un des prévenus.

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"Où fixez-vous le curseur ?", interroge le président du tribunal, "vous ne vous dites pas que ce type de réflexion peut fendre les fondations de l'Etat de droit ?" "Ce que nous voulons ce n'est pas le chaos. On assume nos actes et on vient ici pour les expliquer", lance M.B, qui comme les deux autres prévenus, reconnaît les faits et assure qu'elle était bien consciente des risques judiciaires encourus lorsqu'elle a décidé de prendre part à cette campagne citoyenne. Et B.P, accompagnant d'élève en situation de handicap âgé d'une trentaine d'années de rappeler que "dans l'histoire, si on veut faire bouger les choses, il faut en venir à la désobéissance".

"Tout cela est de nature à décrédibiliser la lutte contre le réchauffement climatique"

Comme de nombreux citoyens, circonspects sinon agacés par les actions de ce mouvement citoyen - notamment les blocages de route - le procureur a basiquement et naïvement rappelé que "la peinture orange sur les pierres n'a jamais fait baisser la température". Et d'ajouter : "Tout cela est de nature à décrédibiliser la lutte contre le réchauffement climatique." Le ministère public a ainsi requis une peine de 300 € d'amende à l'encontre des prévenus pour dégradation du bien d'autrui en réunion et sur un bâtiment d'utilité publique, deux circonstances aggravantes. Les casiers judiciaires des trois militants sont vierges et le procureur a indiqué "ne pas s'opposer" à une dispense d'inscription d'une éventuelle condamnation à leur casier.

Bien loin des questions de droit, une grande partie de l'audience a ainsi servi de tribune politique à ces militants, allant jusqu'à aborder concrètement la question du financement d'un plan massif de rénovation thermique du parc privé, répondant à une question d'un assesseur. Deux témoins cités par l'une des prévenus, spécialistes des questions climatiques sont ainsi venus alerter les magistrats sur l'urgence à agir. Enfin, les conseils des prévenus ont par ailleurs relevé ce qui ressemble à des errements dans la façon dont ont été menés les travaux de nettoyage du bâtiment, interrogeant les sommes dépensées.

"Dans les 48 h, la façade a été nettoyée, il n'y avait plus de peinture, mais il fallait quand même dépenser 130 000 € ensuite", a tancé l'un des trois conseils. Les portes ont été poncées, les escaliers nettoyés à deux reprises, les dorures reprises, selon les devis, par deux entreprises différentes. "Pourquoi 130 000 € ont-ils été dépensés ?" s'est encore interrogé l'avocat. Les prévenus ont de leur côté assuré qu'il pensait que cette peinture était nettoyable à l'eau. "Je n'ai jamais voulu dégrader le bâtiment", a ainsi assuré M.B. Le délibéré est attendu pour le 19 décembre.

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