Ancien maire socialiste de Villeurbanne pendant près de vingt ans, Jean-Paul Bret n’exclut plus un retour en politique à l’approche des élections municipales de 2026. "Il est très vraisemblable que j’y aille", admet-il désormais sans détour. Une candidature qu'il situe à gauche : "je suis socialiste depuis toujours, ou presque. Je n’ai pas besoin de prouver mon attachement à ces valeurs. Mais aujourd’hui, il y a beaucoup plus de socialistes en dehors du Parti socialiste qu’à l’intérieur. nous conduirons une liste de gauche, avec des socialistes et quelques autres sensibilités".
Jean-Paul Bret se montre particulièrement sévère envers son successeur Cédric Van Styvendael, maire socialiste qu'il avait choisi comme dauphin en 2020 : "Quand j’ai quitté mes fonctions, la dette de la ville était égale à zéro. Aujourd’hui, elle atteint 175 millions d’euros". Il l'accuse d'avoir "cramé la caisse".
La retranscription intégrale de l'entretien avec Jean-Paul Bret
Bonjour à tous et bienvenue, vous regardez 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction Lyon Capitale. Aujourd'hui, nous accueillons Jean-Paul Bret. Bonjour, vous êtes ancien maire socialiste de Villeurbanne. Vous aviez expliqué réfléchir à une candidature. Où en êtes-vous de vos réflexions ? Serez-vous candidat aux prochaines élections municipales à Villeurbanne ?
La chose avance dans ce sens, mais je n’ai pas encore fait d’annonce officielle de ma candidature. J’ai créé autour de moi un collectif avec des hommes et des femmes, ainsi qu’un travail programmatique et une analyse critique de ce qui s’est fait pendant les cinq dernières années et demie. Donc oui, il est très vraisemblable que j’y aille.
En 2020, vous aviez transmis le mandat, les électeurs avaient quand même eu leur mot à dire, mais vous aviez désigné votre successeur en la personne de Cédric Van Styvendael, l’actuel maire socialiste de Villeurbanne. Qu’est-ce qui ne va pas dans ce qu’il fait ? On sait que vous étiez plutôt en froid avec lui sur des aspects de positionnement, notamment par rapport à la France Insoumise. Aujourd’hui, une liste Insoumise se présente contre lui, donc il ne fera pas alliance avec eux. Qu’est-ce qui fait que, cette fois, vous dites “j’y vais contre lui” ?
Bien sûr, c’est sur le fond, sur la politique menée dans cette ville depuis cinq ans. J’ai été relativement discret : j’étais le maire sortant, j’avais largement contribué à le mettre en place, même si ce sont les électeurs qui l’ont élu. Mais s’il n’avait pas été sollicité, il ne serait pas devenu maire. J’ai donc eu un temps de réserve par rapport à ce qu’il faisait, et les derniers mois m’ont conduit à faire un bilan, une analyse critique assez sévère d’un certain nombre de choses.
Qu’est-ce qui, selon vous, ne fonctionne pas à Villeurbanne ?
Il y a beaucoup de choses. Je vais publier une lettre aux électeurs qui sera diffusée à partir du début de la semaine prochaine. Elle ne sera pas exhaustive, mais j’y évoquerai plusieurs points qui, pour moi, ne vont pas.
Je peux vous en citer un, peu évoqué d’habitude : quand j’ai quitté mes fonctions de maire, la dette était égale à zéro. L’épargne était élevée, et Villeurbanne était souvent classée parmi les villes les mieux gérées de France, avec un niveau d’investissement conséquent. Aujourd’hui, la dette est passée de zéro à environ 175 millions d’euros. Elle a donc explosé. Les deux premières années ont été pour l’équipe municipale actuelle l’occasion de mesures très dispendieuses, non contrôlées, un peu comme une équipe qui arrive et s’amuse avec la cassette. Les gens que j’ai interrogés me disent souvent qu’il “a cramé la caisse”, Cédric Van Styvendael.
Il n’y a pourtant jamais eu autant d’investissements à Villeurbanne. Il y avait peut-être un besoin ?
Oui, c’est l’argument avancé en défense. Mais j’ai connu des mandats où les investissements étaient déjà élevés. Alors, qu’ils l’aient été un peu plus ces dernières années, je veux bien. Mais prenons un autre exemple : ce n’est pas de l’investissement, mais c’est une dérive lourde. Les frais de personnel ont augmenté de 25 % en cinq ans , du jamais vu. Dans toutes les équipes municipales précédentes, on n’a jamais vu cela. Et cela pèse sur la gestion future de la ville.J’ai eu récemment accès à un document du conseil des adjoints, où le constat fait en 2024 est clair : si rien ne change, la nouvelle municipalité, quelle qu’elle soit, n’aura plus aucune marge de manœuvre.
Et vous, vous n’avez pas peur de revenir simplement pour administrer une cure d’austérité ?
Non, pas d’austérité. Mais il faut remettre les choses en place. La conséquence, par exemple, c’est que depuis deux ans, les associations ont vu leurs subventions baisser en moyenne de 12 %. On a eu le sentiment, confirmé par l’analyse des documents financiers et par la perception des habitants, qu’il y a eu une période où tout semblait possible, et qu’on est désormais entré dans une phase de régression.
Si je suis maire, il ne s’agira pas d’austérité, mais il faudra bien redresser la situation et engager les mesures nécessaires.
Votre périmètre d’alliance pourrait aller d’où à où, puisque vous serez candidat sans étiquette, le PS ayant investi Cédric Van Styvendael ?
Je n’aurai pas l’étiquette du Parti socialiste.
Il peut pourtant y avoir des alliances. Lors des législatives anticipées de juillet 2024, vous aviez failli être élu face au député sortant Insoumis Gabriel Amard à la surprise générale, et à la vôtre. Vous aviez probablement bénéficié de voix à gauche, peut-être même à droite. Peut-il y avoir une grande alliance pour battre Cédric Van Styvendael ?
Je suis socialiste depuis toujours, ou presque. J’ai été maire socialiste pendant trois mandats, et avant cela membre d’équipes socialistes. Je n’ai pas besoin de prouver mon attachement à ces valeurs. Mais aujourd’hui, il y a beaucoup plus de socialistes en dehors du Parti socialiste qu’à l’intérieur.
Donc il y aura avec moi des socialistes, pas encartés, mais qui le sont dans l’esprit. Il y aura aussi des gens du centre-gauche, et surtout beaucoup de citoyens progressistes qui travaillent déjà avec moi. D’une certaine manière, nous conduirons une liste de gauche, avec des socialistes et quelques autres sensibilités.

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