Ecran géant place Bellecour : Fan zone 2018 finale de la Coupe du monde France-Croatie

Lyon rejoint le front des villes qui boycottent le Mondial 2022 au Qatar

Dans un entretien exclusif, Julie Nublat-Faure, adjointe aux Sports de la Ville de Lyon, annonce que la Ville de Lyon rejoint "le front des villes" qui ne diffusera pas sur écran géant les matchs de la Coupe du monde de football 2022.

Exclusif - Silencieuse jusqu’à présent, elle se positionne officiellement dans cet entretien accordé à Lyon Capitale. L’adjointe aux sports Julie Nublat-Faure annonce que la Ville de Lyon ne diffusera pas les matchs de la Coupe du monde de football qui se tiendra au Qatar du 20 novembre au 18 décembre.

Lyon imite donc Paris, Bordeaux, Lille, Marseille, Nancy, Reims, Strasbourg, Toulouse, Montpellier, Rodez, Rennes, Brest et, plus près de chez nous, Annecy, Saint-Etienne, Villeurbanne et Vénissieux.

La municipalité lyonnaise annonce à Lyon Capitale son refus, pour des raisons humanitaires et environnementales, de promouvoir les matchs de la Coupe du monde de football au Qatar (20 novembre-18 décembre). Un choix assumé par Julie Nublat-Faure, l'adjointe aux sports à la Ville de Lyon qui, pour autant, estime que les footballeurs et les fans de ce sport sont "pris en otage" en raison de l'attribution de cette compétition à un Etat qui ne respecte pas les droits des êtres humains.

Lyon Capitale : Quelle est la position de la Ville au Lyon au sujet de cette Coupe du Monde qui se déroulera au Qatar ?

Julie Nublat-Faure, l'adjointe aux sports de la Ville de Lyon

Julie Nublat-Faure : Comme vous pouvez l'imaginer, la Ville de Lyon se positionne pour ne pas retransmettre de matchs sur écran géant ni d'organiser de fan zone pour cette Coupe du monde au Qatar, parce qu’on estime que c’est une compétition (2022) qui ne remplit pas du tout les objectifs de droits humains, environnementaux et même éthiques. Il y a énormément de choses à reprocher à cette Coupe du monde au Qatar. A Lyon, on a décidé de continuer le front des villes qui est en train de se mettre en place pour ne pas proposer à la collectivité de promouvoir cet événement.

 

Même si les Bleus disputent la finale, vous n’allez rien organiser dans la ville ?

Même si les Bleus disputent la finale, il n’y aura pas de matchs diffusés à Lyon. On estime que nous sommes pris en otage : les supporters, les amatrices et amateurs de football, même les joueurs professionnels, car ce ne sont pas eux qui ont choisi le lieu de cette attribution de cette Coupe du monde. Nous sommes pris en otage. On aime ce sport, il a de nombreuses valeurs, ces grands événements sont magiques et fédérateurs, et là, ils sont dévoyés par une attribution qui est totalement un renoncement écologique et de droits humains.

Par rapport à cette décision, l'impact est minime. En plein hiver, les gens n'allaient pas se retrouver en extérieur pour voir cette Coupe du monde….

L’impact est symbolique. C’est plus un message à porter que finalement l’événement en lui-même. Vous le soulevez dans votre question, c’est une approche inédite : on a jamais vu une Coupe de monde avoir lieu en hiver. Pour éviter de suffoquer et qu’il y ait des chaleurs intenses en été là-bas, on l’a organisé en hiver. Pour nous amateurs de football, c’est quelque chose déjà de très perturbant.


"On ne va pas être moralisateur et empêcher ceux qui veulent suivre cette Coupe du monde de le faire"


Dans les différentes prises de position de ces derniers jours, il y a beaucoup d’hypocrisie. Tout le monde se réveille maintenant alors que l’attribution de ce Mondial date de 2010…

Quand on n'est pas fier d’un événement de A à Z, il ne faut pas le porter. C’est très important. Quand on crée de tels événements qui sont des moments collectifs, des joies intenses, conviviaux, qui portent des valeurs sportives qui sont celles du bien-être et du sport santé, ils se doivent d'être irréprochables. A l’époque du choix, il y a sûrement eu ces jeux d’hypocrisies mais, je le répète, quand on soutient une telle manifestation, on doit le faire avec fierté de A à Z et pour le coup, avec ce Mondial au Qatar, ce n’est pas du tout le cas.

Stade de Lusai, Qatar, accueillera la Coupe du monde de football 2022
Le stade de Lusai, au Qatar, @MUSTAFA ABUMUNES / AFP)

Le maire de Bordeaux a déclaré qu’il n’allait pas regarder ce Mondial de football. Et vous ?

C’est un choix personnel, chacun s’interroge. Bien évidemment, à Lyon, on ne condamne personne, on ne va pas être moralisateur et empêcher ceux qui veulent suivre cette Coupe du monde de le faire. Ce n’est pas là le sujet. Me concernant, après tout ce que j’ai pu lire sur les travailleurs qui sont morts (selon le journal britannique The Guardian, plus de 6 500 ouvriers seraient morts sur les chantiers ces douze dernières années, NdlR), l’exploitation des ouvriers immigrés, on peut le dire c'était presque de l'esclavage, tous les rapports d’Amnesty International, les droits humains bafoués, l’écocide avec une attaque de la biosphère avec ces stades dans le désert… Ça va être la première fois, mais je vais avoir du mal à regarder cette Coupe du monde.

Quelle leçon faut-il retenir de tout cela ?

C’est de savoir comment on réfléchit collectivement, sans hypocrisie, sur les grandes compétitions sportives de demain. Si ce Mondial est boycotté largement, qu’il y a eu beaucoup de prises de position contre cette aberration humaine et climatique,  je crois que c’est peut-être l’occasion, pour ceux qui ont le pouvoir de peser sur ces instances-là, de revoir de fond en comble leurs critères. Qu’ils se mettent autour de la table pour réfléchir à des événements qui soient plus vertueux. En tout cas, à Lyon, c’est ce qu’on essaie de faire. On aime le sport, mais on est exigeant. On regarde de près comment ces événements sont conçus, ce qu’ils apportent en termes de sponsors, qu’ils respectent les droits humains… On a la possibilité de peser et de faire évoluer ces pratiques. On espère à l’avenir que ces grandes fêtes populaires se construiront de la sorte.

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