Les faux dinars s'apprêtaient à inonder le marché algérien

Faux billets (article actualisé à 17h34). Douze ans que la planche à billets n'avait plus fonctionné en France. Un réseau de faux monnayeurs vient pourtant d'être démantelé à Lyon. Dans une imprimerie de la rue du Lac, près de la Part-Dieu, les faussaires étaient sur le point de fabriquer plusieurs dizaines de milliers de faux billets de 1 000 dinars (10 euros), et s'apprêtaient à inonder le marché algérien.

A l'origine, c'est l'attaque d'un camion en 2006 à Marseille qui a permis aux malfaiteurs marseillais de mettre la main sur 40 rouleaux de papier fiduciaire algérien, soit 20 tonnes de papier bancaire vierge et original. Les Marseillais ont braqué un camion qui transportait le précieux papier à destination d'Alger. Deux délinquants lyonnais issus du grand banditisme ont eu ensuite vent de la prise. Connus des services de police pour escroquerie, homicide et braquage, les deux hommes ont recherché une imprimerie qui acceptent d'imprimer de faux billets à Lyon. Ils ont réussi à convaincre deux imprimeurs, les frères Dunand installés rue du Lac, à deux pas de la Part-Dieu. Ces derniers ont mis au point le procédé de reproduction de faux-billets en partie.

Mais en avril 2009, la police "réussit a pénétrer le milieu délinquant", selon le directeur de la DIPJ. C'est à dire que des fuites parviennent jusqu'aux oreilles des enquêteurs de la police judiciaire de Lyon qui entament alors une filature. Six mois durant, la police suit les moindres faits et gestes du réseau.

Des billets très ressemblants

Entre avril et septembre dernier, les faussaires mettent au point une image la plus réaliste possible. Ils font des essais d'impression. Au début, les policiers présument qu'il y a beaucoup de pertes, le temps d'arriver à l'image parfaite, cet été. Parallèlement, il faut trouver un informaticien pour numéroter les billets, un technicien qui accepte de prendre part à la combine. Les malfaiteurs déniche la perle rare à Saint -Etienne, un informaticien leur met au point un programme "très proche de la réalité", selon Michel Neyret, directeur adjoint de la DIPJ de Lyon. Il permet de numéroter les faux billets de manière aléatoire en trois points, comme les vrais billets algériens et ce, sans jamais reproduire le même numéro deux fois sur le même billet.

1 à 2 millions de faux billets

En août, les policiers apprennent que l'opération arrive à terme. L'équipe est au complet. Les imprimeurs ont mis au point l'image parfaite, le programme de numérotation de l'informaticien tourne bien. L'équipe s'apprêtent à écouler un à deux millions de faux billets sur le marché algérien, selon les policiers, sachant que la capacité maximale de production des faussaires est de 5 à 6 millions de faux billets, rapportés au milliard de billets de 1000 dinars en circulation en Algérie. "Pas de quoi déstabiliser l'économie algérienne, selon la DIPJ. En Algérie, précise le directeur adjoint lyonnais, le billet de 1 000 dinars est le billet le plus courant, il représente 70 % de la monnaie fiduciaire algérienne, c'est comme le billet de 10 euros chez nous".

Fin de partie à Saint-Genis-Laval

Mais l'aventure se termine brusquement sur le parking du Quick de Saint-Genis-Laval, mercredi dernier. Les informaticiens stéphanois viennent livrer 8 000 planches de faux billets numérotés aux Lyonnais lorsque la police les cueillent. Les enquêteurs saisissent alors entre 160 000 à 1 million de faux billets numérotés, selon les estimations. L'équivalent de deux rouleaux de papier fiduciaire algérien transformé en planches à billet. Il ne reste plus qu'à les découper et à les écouler sur le marché algérien. Les malfaiteurs espèrent revendre leurs billets 3 ou 4 euros l'unité àà leurs intermédiaires algériens, soit un bénéfice espéré de 500 000 à 4 millions d'euros.

Mais toute l'équipe est arrêtée mercredi. Six personnes à Lyon et six autres entre Montélimar, Saint-Etienne et Paris. Les douze faussaires présumés sont présentés au parquet dimanche et mis en examen pour "contrefaçon et mise en circulation" de fausse monnaie, "recel de vol à main armée", le tout "en bande organisée". Ils risquent trente ans de réclusion criminelle et de 450 000 euros d'amende en France, le procès aura lieu dans plusieurs mois à Lyon.

L'enquête se poursuit

En attendant, une autre enquête est toujours en cours à Marseille. Après l'attaque du camion en 2006, une trentaine de rouleaux de papier fiduciaire algérien original est toujours dans la nature. Une dizaine ayant été retrouvés entre Lyon, ce mercredi, et Naples en début d'année. La Police judiciaire de Marseille espère elle aussi boucler l'enquête prochainement.

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