Le tribunal des affaires économiques de Lyon se penche ce mardi sur le sort d'ACI Group, repreneur en série de sites industriels englobant 1.600 salariés, lui-même placé en redressement judiciaire en septembre dans un contexte de soupçons de malversation.
Enquête pénale
L'ancien tribunal de commerce n'est pas seul à se pencher sur l'entreprise qui agglomère 1.600 salariés (dont 200 à l'étranger) dans une trentaine de filiales: le parquet de Lyon a confirmé à l'AFP avoir ouvert une enquête pénale sur le dossier. Ces investigations, confiées à la division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS) de la police, font suite à des plaintes déposées par le groupe, dont l'une cible son président Philippe Rivière pour abus de biens sociaux.
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Ce dernier n'a pas souhaité s'exprimer à ce sujet auprès de l'AFP, donnant "la priorité au plan de retournement" de l'activité auquel il entend contribuer, a indiqué une source dans son entourage. Il a toutefois été privé par le tribunal de son mandat social à la tête de l'entreprise, désormais gérée par des administrateurs judiciaires.
Ultra-croissance
Comment en est-on arrivé là ? Créé en 2019 par Philippe Rivière et Patrice Rives, ACI Group a racheté à tour de bras une litanie d'entreprises industrielles. M. Rivière, s'exprimant en mars lors du salon "Global Industrie" à Lyon, expliquait vouloir consolider des actifs "hyper intéressants et stratégiques" dans "un modèle économique différent" pour fournir une "offre globale" à un client donné.
La holding met en exergue des entreprises comme le groupe d'outillages Rabourdin à Lagny-sur-Marne (Seine-et-Marne); les Forges de Monplaisir à Saint-Priest (Rhône), ou encore les Fonderies de Sougland à Saint-Michel (Aisne), qui revendiquent parmi leurs clients la marine américaine (US Navy).
M. Rivière reconnaissait qu'une telle boulimie d'acquisition pouvait faire "peur", notamment au "monde financier". "C'est difficile avec nous parce que tous les mois on intègre une nouvelle société", ce qui complique la lecture de l'activité économique y compris pour des professionnels.
Pourquoi un redressement?
Les inquiétudes du monde financier n'étaient toutefois sans fondement puisque le cofondateur Patrice Rives a décidé en septembre de placer la holding en redressement judiciaire, sans publier d'explications. La situation interpelle alors jusqu'à Bercy. "La manière dont cette holding a été mise en redressement judiciaire et les conditions qui l'y ont amenée méritent qu'on s'y intéresse de très près", a déclaré début novembre le ministre de l'Economie Roland Lescure, indiquant avoir "demandé un audit" aux services de Bercy.
La CGT Métallurgie, qui dit craindre une liquidation d'ACI mardi, a prévu un rassemblement devant le palais de justice de Lyon, notamment pour interpeller sur les aides publiques dont ACI aurait pu bénéficier et sur des retards de salaires.
Quel avenir pour les sites?
Autre sujet d'inquiétude : quel impact la situation de la maison mère peut-elle avoir sur les sites détenus? Une douzaine de sociétés du groupe ont déjà été placées en redressement ou en liquidation directe ces dernières semaines.
Samy Tabti, délégué CGT de l'entreprise, a expliqué à l'AFP que des inquiétudes pèsent sur de plus grosses structures comme Fralsen (Doubs), les fonderies de Saint-Dizier (Haute-Marne) ou le fabricant de pompes hydroélectriques Enerflux (ex-JTEKT).
M. Lescure a déclaré début novembre que l'Etat se pencherait sur "toutes les filiales les unes après les autres", dont certaines "vont bien" et d'autres "moins bien", pour "tenter de trouver des repreneurs". Le Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri), service gouvernemental chargé d'accompagner les entreprises en difficulté, est à la manœuvre.
"L'Etat travaille, aux côtés des administrateurs judiciaires, à des solutions visant à préserver la continuité de l'activité sur le plus grand nombre de sites possibles, sous réserve d'une perspective de retour à la viabilité. L'actionnaire majoritaire d'ACI Groupe, M. Philippe Rivière, ne participe pas aujourd'hui à ces discussions", a indiqué Bercy à l'AFP.
"On est bien revenu" du discours faisant de Patrick Rivière "un nouveau capitaine d'industrie, sauveur d'entreprises", a indiqué le député de la Loire Pierrick Courbon (PS) qui avait accompagné des salariés lors d'un rendez-vous à Bercy le 18 novembre.