Ancien directeur de l’École centrale de Lyon, Frank Debouck a été nommé en mars dernier à la tête de la Communauté d’universités et établissements (ComUE) de Lyon.
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Frank Debouck : “Nous ne ferons pas une seule et unique université à Lyon”

Ancien directeur de l’École centrale de Lyon, Frank Debouck a été nommé en mars dernier à la tête de la Communauté d’universités et établissements (ComUE) de Lyon. Il explique à Lyon Capitale son projet pour le monde universitaire lyonnais.

Lyon Capitale : Qu’est-ce que la ComUE ?
Frank Debouck : Le monde de l’enseignement supérieur est aujourd’hui extrêmement morcelé par le nombre impressionnant d’offres de formation. Là-dessus, la ComUE est une instance de coordination territoriale. C’est une idée qui fait l’unanimité. D’ailleurs, on ne part pas d’une page blanche puisque, par exemple, déjà 80 % des unités de recherche de l’université Jean-Monnet de Saint-Étienne sont en lien étroit avec des unités de recherche de Lyon. Autrement dit, les équipes travaillent déjà ensemble. La ComUE prend donc place sur le territoire Lyon Saint-Étienne qui compte en tout 250 formations. Elle regroupe 35 établissements. Ces derniers représentent 180 000 étudiants, l’un des plus importants viviers de France. Cette instance dispose de trois axes de développement pour les cinq prochaines années. Premièrement, nous sommes un soutien aux stratégies des établissements.
C’est irréaliste, les cultures des établissements sont trop différentes.

Attention, nous ne sommes pas chargés de la faire à leur place. Cela correspond plutôt à la mise en relation des établissements ayant un projet similaire afin de faire parler les gens ensemble. Cela permet d’aligner les objectifs et d’articuler les leviers des uns et des autres. Deuxièmement, la ComUE pilote des projets communs. Par exemple, le collège doctoral a besoin d’une harmonisation des procédures d’obtention du doctorat. C’est aussi résoudre les problèmes d’immobilier et de rénovation des bâtiments. On a une compétence sur l’immobilier, l’entrepreneuriat et le transfert des brevets du laboratoire vers l’entreprise. En tout, nous avons une dizaine d’objets communs. Enfin, nous devons contribuer au rayonnement du site, cela passe par un projet commun, l’obtention d’appels à projets et des classements. C’est le plus compliqué mais je suis confiant.
Lire aussi : Histoire : aux origines de la scission de l’Université de Lyon Pourquoi créer une nouvelle coordination ? L’intérêt est déjà de créer un réseau permettant de parler et d’échanger des pratiques entre professionnels du même métier, soit des chefs d’établissement. Il y a beaucoup de problématiques communes. Prenez les violences sexuelles. C’est un sujet de société et tous les directeurs d’établissement doivent gérer ce problème. Il y a aussi la question de la santé mentale des étudiants, ou le problème des transferts d’une formation à une autre. Il y a par ailleurs des problématiques logistiques, comme l’augmentation des tarifs de l’énergie qui pèse sur les budgets… La ComUE permet la mutualisation des connaissances des uns et des autres à travers un réseau mettant du liant au bénéfice de l’étudiant.

Nous équilibrons l’offre, mais c’est une régulation qui n’est pas coercitive.

Le deuxième intérêt est de rendre lisible et claire l’offre de formation. C’est-à-dire qu’il faut trouver un équilibre dans l’offre. Par exemple, il faudrait peut-être moins de formations en machines thermiques alors que nous avons besoin de former de nouveaux mécaniciens de voitures électriques car la demande est là. Pareillement, il faudrait plus de professeurs. Nous équilibrons l’offre, mais c’est une régulation qui n’est pas coercitive. Ensuite, l’idée est aussi d’harmoniser les libellés afin d’aider l’orientation des lycéens qui se projettent dans leurs études supérieures. Pour finir, nous soutenons la stratégie de recherche au niveau local, par l’achat d’équipements mutualisé par exemple, et à l’international grâce à notre projet.
Justement, quel est le projet commun qui va guider votre action ?
J’ai eu l’occasion de l’exposer à madame la ministre Sylvie Retailleau, qui l’a validé. Nous ne ferons pas une seule et unique université. C’est irréaliste, les cultures des établissements sont trop différentes. Cependant, on voit déjà que deux des trois universités de la place lyonnaise, Lyon 1 et Lyon 2, veulent travailler ensemble sur le développement de la recherche médicale, avec les dimensions à la fois humaines et techniques. La fusion des deux établissements est désormais envisagée. Il n’y a pas de tuilage sur les compétences et les domaines, donc l’opération vers une grande université interdisciplinaire semble possible. L’idée est de partir de cette méthode et de réunir les formations autour de grands projets communs, des pôles d’excellence. C’est ce qui se passe pour les quatre écoles d’ingénieurs de Lyon. Elles vont répondre à trois enjeux sociétaux : la transformation numérique des entreprises, la décarbonation de l’industrie et l’économie circulaire.

L’idée est d’aller, ensemble, capter des appels à projets qu’un établissement seul n’aurait pas pu obtenir. C’est un système universitaire comme ceux de Londres, Los Angeles ou Toronto.

Mais ce n’est pas tout : en parallèle, pourrait se dessiner un projet autour de l’art impliquant les écoles d’architecture, mais aussi les Beaux-Arts, l’Ensatt (École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre), le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon, et l’école de la Comédie de Saint-Étienne. Il y a des choses à faire aussi autour de la chose publique en faisant travailler sur des grands projets l’École normale supérieure, Sciences Po, ou encore l’Institut régional d’administration de Lyon (IRA).
Ce sont ces briques, ces regroupements que j’ai présentés à la ministre, comme des “cousinades” dans un village. Dès lors, la ComUE va favoriser un village harmonieux avec des maisons qui se parlent et des projets communs avec des services partagés.
Les classements d’universités sont-ils importants pour vous ?

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