Delerm, l'anti-Gainsbourg

Sexe, politique et rock'roll, trois trucs dont je ne parle pas trop dans mes chansons...
On me renvoie souvent l'image du "petit "bourge" qui se plaint quand il se pince les doigts dans la porte. J'en ai un peu soupé de ce truc-là pour être franc. D'autant que ça émane de gens qui sont eux-mêmes pas très rock'roll. Il n'y a pas pire que les bobos pour critiquer les bobos.
Pourquoi je ne parle pas de sexe ? Les premières personnes à qui j'ai chanté mes chansons sont mes parents. Et quand j'avais 15/16 ans, pour rien au monde, je ne leur aurais parlé de sentiments. Ce n'était pas du tout du genre "complice, on se dit tout". Je n'avais pas un rapport de potes avec mes parents. Et la première chanson qui évoquait vaguement les sentiments, j'ai reculé le moment de la leur chanter.
Débandant
En chanson il n'y a pas énormément de gens qui parlent de sexe. Et quand ils le font, ce n'est pas forcément très heureux. Quand c'est un garçon qui en parle c'est souvent sous un angle qui peut être dur pour les filles. Quand ce sont des filles, c'est pareil. Tout ça est un peu débandant. Et ce n'est pas très sexy avec un format de 3 minutes 30. Tout de suite, ça devient de la blague. Il faut prendre le temps pour ces choses.
Gainsbourg pas très classe
Même chez Gainsbourg, qui est classieux, le sexe n'est pas toujours de très bon goût. "J'ai un gros gourdin dans ma housse, si je le pousse, il mousse"... Ce n'est pas ce que je préfère de lui ! Ce qui est réussi, ce sont les chansons élégantes comme "Je t'aime, moi non plus". Mais comme par hasard c'est assez long, ça prend son temps. "Love on the beat", ça me touche moins. On attendait de Gainsbourg qu'il aille plus loin à chaque fois et du coup ça sent un peu la performance. "Regardez je suis allé plus loin que la fois d'avant !"
"Love on the beat"... Je ne sais pas ce qu'auraient dit les chiennes de garde mais franchement le fait d'enregistrer les cris d'orgasmes de sa copine, je ne trouve pas ça très classe. Sans parler du clip qui va avec, où elle balance les seins. Ça ne me touche pas.
Sous les jupes
Je préfère des chanteurs qui se font passer pour des enfants de chœur, qui parlent des filles qui ont des pull-overs. Mais qui regardent sous les jupes des filles, à peine, comme ça, en passant. Finalement ça reflète mieux la vie. La sexualité chez Souchon me convient donc mieux.
Les frôlements
La chanson est rarement un bon format pour parler du sexe. Mais dans mes chansons, il est beaucoup question de frôlements. Je cherche un bouquin en frôlant le bras de quelqu'un. Je n'attaque jamais les choses de façon très frontale. Mais pour la chanson Les piqûres d'araignée, il y a des allusions.
Cra-cra
Gainsbourg a écrit sur le fait qu'il aimait bien doigter sa chienne et tout ça. C'est un peu cra-cra et pas toujours du meilleur goût. Après, on arrive à un point où on ne peut plus aller au-delà. Il s'est passé la même chose en littérature, avec Catherine Millet ou Michel Houellebecq. On en vient à évoquer le fait de se taper des gamines. On atteint le sommet du truc qu'on peut pas dire et, après, on ne peut plus faire que marche-arrière !
Frustré
Souvent, l'évocation du sexe tel que les gens l'entendent, ce n'est pas de se retrouver mais c'est le fait d'aller de plus en plus loin. Au fond, je ne pense pas que Gainsbourg parlait de choses si personnelles que ça. A mon avis, il était plutôt frustré de ne pas les vivre. Les gens qui vivent une sexualité épanouie n'éprouvent pas trop le besoin d'écrire : "Je m'éclate au pieu !"
(A suivre).
Vincent Delerm est en concert le 7 mars à la Bourse du Travail, Lyon 3e. Son dernier disque : Les piqûres d'araignée.

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