Bruno Da Silva, président du Tribunal des affaires économiques de Lyon, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Une bascule. Si les défaillances d'entreprises dans la métropole lyonnaise ont augmenté de 20% en 2025, leur impact sur les emplois est moindre. "Seulement" 20% d'emplois sont concernés" assure Bruno Da Silva, président du tribunal des affaires économiques de Lyon (ex-tribunal de commerce).
"Nous avons un effet ciseau qui caractérise bien le profil des entreprises en difficulté cette année" à savoir des entreprises "de très petite taille".
"Sur l’impact direct sur l’économie et l’emploi, nous pouvons constater que cela a moins d’impact que l’année dernière. C’est toujours trop important, mais beaucoup moins lourd que l’an passé."
Lire aussi : "2 200 procédures collectives et 7 000 emplois" menacés à Lyon en 2025 estime Bruno Da Silva - Février 2025
La retranscription intégrale de l'entretien avec Bruno Da Silva
Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 minutes chrono. Nous accueillons aujourd’hui Bruno Da Silva.
Bonjour Guillaume.
Bruno Da Silva, vous êtes le président du Tribunal des affaires économiques de Lyon. La dernière fois qu’on vous a invité, c’était en février dernier. Nous aimons faire un point avec vous deux fois par an, pour établir un diagnostic sur l’état de nos entreprises. Une étude récente, Allianz Trade, évoquait une hausse des défaillances en Auvergne-Rhône-Alpes au troisième trimestre 2025. Qu’en est-il sur le territoire lyonnais ? Connaît-on également une hausse des défaillances à Lyon ?
Oui, à Lyon, nous constatons également une hausse des défaillances, comme depuis 2023. Nous rattrapons ce que nous n’avons pas connu pendant les années post-Covid, de 2020 à 2022. Cette hausse est surtout marquée par l’augmentation des défaillances d’entreprises de très petite taille, avec un nombre d’emplois concernés plus faible que l’année dernière : 20 % d’emplois concernés cette année, avec une hausse de plus de 20 % des défaillances. Nous avons donc un effet ciseau qui caractérise bien le profil des entreprises en difficulté cette année.
Derrière cette mauvaise nouvelle — une défaillance d’entreprise en est toujours une — qu’en est-il de l’impact sur l’emploi ?
Sur l’impact direct sur l’économie et l’emploi, nous pouvons constater que cela a moins d’impact que l’année dernière. C’est toujours trop important, mais beaucoup moins lourd que l’an passé.
L’étude dont je parlais au début de cette émission évoquait non seulement les TPE mais aussi les ETI. Comment vous préparez-vous, au Tribunal des affaires économiques, à gérer des dossiers d’entreprises de taille intermédiaire ?
Nous sommes prêts à traiter toute taille d’entreprise. Il nous arrive ponctuellement d’avoir des dossiers concernant des entreprises de plus grande taille. Elles sont traitées dans le cadre des procédures collectives ou préventives, confidentielles, de la même manière que les autres, avec toute l’attention requise.
Ces dossiers sont-ils plus complexes ?
Oui, certains dossiers sont plus complexes, mais les outils existent pour permettre, lorsque c’est possible, de sauver les emplois et de préserver l’activité. Malheureusement, parfois, ce n’est plus possible, car l’entreprise arrive beaucoup trop tard.
Votre prédécesseur avait beaucoup travaillé sur ce point, et vous poursuivez ce travail : le tribunal intervient quand les entreprises sont déjà en difficulté. Comment incitez-vous les dirigeants lyonnais à venir plus tôt, pour prévenir plutôt que guérir ?
Plusieurs actions sont menées. D’abord, une action forte en matière de détection des difficultés : chaque semaine, nous invitons des chefs d’entreprise à nous rencontrer grâce à une procédure qui nous permet d’être très proactifs, avec des critères permettant d’anticiper leurs difficultés. Ces entretiens ont pour objectif de les informer sur les procédures qui peuvent leur être ouvertes.
Ensuite, nous intervenons beaucoup à l’extérieur : merci à vous, Guillaume, de m’inviter aujourd’hui. Nous intervenons également devant des chefs d’entreprise, des fédérations, des organisations, des clubs, pour leur expliquer en quoi le tribunal peut être un allié et les aider à surmonter leurs difficultés.
Oui, c’est comme le médecin : on y va quand on est malade, mais c’est mieux de le voir avant.
Chez le médecin, vous recevez parfois une campagne préventive à domicile pour faire tel ou tel test ; vous le faites ou pas. Le tribunal, c’est un peu pareil.
On parle beaucoup depuis quelques mois, voire plusieurs années, des entreprises dites “zombies”, maintenues artificiellement en vie après le Covid, grâce aux aides publiques. Retrouve-t-on ce phénomène dans le tissu économique lyonnais ?
On peut l’estimer, oui. Cela caractérise globalement l’année 2025. La taille moyenne d’une entreprise l’année dernière était de 820 000 euros de chiffre d’affaires et un peu moins de quatre salariés. Cette année, c’est 450 000 euros de chiffre d’affaires et 2,3 salariés. On voit bien que nous nous adressons à des entreprises qui ont très peu d’activité, voire plus du tout, et qui pourraient être qualifiées de “zombies”.
Quels sont les secteurs les plus concernés ?
Toujours les mêmes : la construction, le commerce de détail et l’hôtellerie-restauration. Ce podium ne change presque jamais.
