Les députés examineront la semaine prochaine un texte visant notamment à réintroduire des insecticides destructeurs pour la biodiversité. La députée écologiste de Lyon, Marie-Charlotte Garin dénonce un texte "indigne".
Les parlementaires vont-ils réautoriser l'utilisation d'un pesticide tueur d'abeilles, l'acétamipride, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes ? Interdit depuis 2018, ce produit dont les effets néfastes sur la biodiversité, et particulièrement sur les abeilles, sont documentés, pourrait-être de nouveau autorisé temporairement pour "lever les contraintes" pesant sur les agriculteurs.
"Un rapport complètement trumpiste à la science"
C'est en tout cas ce que prétend faire le texte de loi, porté par le sénateur les Républicains, Laurent Duplomb (par ailleurs ex-président FNSEA de la chambre d'agriculture de Haute-Loire) qui sera examiné par l'Assemblée nationale le 27 mai. "On est dans une régression sans précédent et dans un rapport complètement trumpiste à la science, c'est indigne", dénonce auprès de Lyon Capitale la députée écologiste Marie-Charlotte Garin.
Élue dans la 3e circonscription du Rhône, elle rappelle que "la science a prouvé la toxicité sur la santé et sur la biodiversité" des néonicotinoïdes, et dénonce un "coup de communication du gouvernement qui n'a aucune vraie solution pour les agriculteurs". "S'il n'y a pas de biodiversité, il n'y a pas d'agriculture. Après demain, c'est fini pour nos agriculteurs si l'on s'engage sur cette voie", poursuit Marie-Charlotte Garin.
Que dit la science sur l'acétamipride ?
La littérature scientifique a démontré que l'acétamipride favorise les problèmes de neuro-développement chez les foetus. Il pourrait également favoriser l'apparition de cancers du foie, de la thyroïde et des testicules.
Par ailleurs, s'il ne tue pas directement les abeilles comme le glyphosate, il perturbe leur comportement, altère leur travail de pollinisation et met donc en danger les survie des ruches, comme l'ont démontré plusieurs études de l'Inrae.
Les défenseurs de cette mesure pointent de leur côté la "concurrence déloyale" à laquelle font face les agriculteurs français, puisque plusieurs pays de l'Union européenne autorisent encore les néonicotinoïdes. "Le Parlement européen doit faire son travail mais quand il s'agit de la santé des gens, la règle d'or ne doit pas être de niveler vers le bas, mais être le plus ambitieux possible pour entrainer les autres. Il ne faut pas attendre que l'Europe bouge" répond la députée du Rhône.
"Tout se jouera en commission mixte paritaire
La proposition de loi vise également à attribuer un caractère "d'intérêt général majeur" aux retenues d'eau, notamment les mégabassines, qui permettrait de mettre en oeuvre plus facilement des dérogations environnementales pour ce type d'installations. L'article a été supprimé en commission développement durable où les rapports de force jouent en faveur des écologistes, mais Marie-Charlotte Garin se fait peu d'illusions : "Ça devrait être réintroduit en séance." La députée défend sur ce point aussi une "approche systémique". "Nous sommes pour une gestion concertée de l'eau, avec des pratiques sobres" défend-elle.
Des manifestations organisées par la FNSEA ont eu lieu lundi 19 mai dans plusieurs régions de France pour dénoncer le détricotage du texte par la commission développement durable, et notamment la suppression de l'article autorisant le stockage de l'eau. Les rapports de force à l'Assemblée devraient néanmoins jouer en défaveur des écologistes. "Ça va être compliqué. Nous notre rôle est de faire un travail d'amendement conséquent pour défendre nos positions. Mais tout se jouera en commission mixte paritaire", prévient Marie-Charlotte Garin.
Lire aussi : Limitation des PFAS : "Une victoire historique et collective" se réjouit Marie-Charlotte Garin