RACHIDA DATI RENDRA-T-ELLE LE SOURIRE A LA JUSTICE ?

Star des sondages, elle a une telle cote de popularité qu'on en oublie qu'elle est en charge d'un des domaines les plus complexes et les plus délabrés de la République. Son sourire d'icône est-il un leurre ou une promesse ?

"Je ne la connais pas. Mais ce que j'ai lu sur elle est positif" confie Pierre-Alain Muet, candidat socialiste dans la 2e circonscription. Elle, c'est Rachida Dati qui vient pourtant cette semaine soutenir à Lyon son adversaire UMP Emmanuel Hamelin... Il est vrai que "Rachida", aussi populaire que novice en politique, ne laisse pour l'instant que peu de prises à la critique. Bombardée à la tête du prestigieux ministère de la Justice après avoir brillé en tant que porte-parole de Nicolas Sarkozy, voilà le plus beau sourire de la République personnifier à la fois la nouvelle génération Sarkozy, l'intégration réussie, l'ascenceur social en état de marche, la beauté triomphante, l'énergie... et l'ambition dévorante. Les yeux de braise semblent sans cesse sourire à la vie qui le lui rend bien. Et cet étalage d'optimisme fait visiblement partie des stratégies d'image de la galaxie Sarkozy.

Rachida Dati vient donc à Lyon ce vendredi 15 juin pour soutenir la candidature d'Emmanuel Hamelin. Mais ce déplacement sera d'autant plus médiatisé que, d'après nos informations, la ministre de la Justice devrait annoncer mercredi à l'issue du conseil des ministres, des réformes que l'on qualifie dans son entourage "de très importantes" et "d'actes très forts en ce début de mandature".

C'est d'ailleurs du fait de ces annonces qu'un entretien avec Lyon Capitale a été annulé au dernier moment, l'Elysée ayant demandé expressément à Rachida Dati de suspendre toute intervention publique. Et c'est bien dommage parce que la Cendrillon du gouvernement (lire édito) - elle ne supporte plus qu'on l'appelle Sarcosette - est tout autant un personnage sarkozyste emblématique et singulier qu'un tout frais ministre de la Justice dont l'image en France est nettement moins lisse que le sourire qu'elle arbore. Les problèmes de fonctionnement de ce ministère régalien laissé à l'abandon depuis des décades sont désormais connus de tous puisqu'ils ont fini par peser sur la vie de tous les Français. Ceux-ci critiquent désormais ouvertement une justice lente et lointaine.

"Une Justice de Moldaves"
Les problèmes sont légion. Ils ne peuvent être réduits à des questions de moyens financiers mais ne peuvent être résolus sans beaucoup de moyens. Le bouillant socialiste Arnaud Montebourg confie de façon grinçante à Lyon Capitale : "Pour la Justice, nous sommes en France au niveau de la Moldavie. Nous sommes des Moldaves mon ami !" Maître Genin, ancien bâtonnier de Lyon, pourtant proche de Dominique Perben, ancien Garde des Sceaux ne dit pas autre chose. Il pointe du doigt "l'aide juridictionnelle qui a "appauvri terriblement les avocats". S'agissant de Rachida Dati, souvent présentée comme une marionnette de Nicolas Sarkozy à qui elle ne saura peut-être pas s'opposer, Montebourg tranche : "Au fond, l'essentiel c'est de voir si Rachida Dati arrivera à obtenir de bons arbitrages pour la Justice".

Nous voilà donc renvoyés à une question de gros sous. Le manque énorme de magistrats, "il y en a pas beaucoup plus qu'avant la guerre" souligne Genin, la paupérisation des avocats, la crise d'autorité, l'état indigne et la surpopulation des prisons sont autant de problèmes majeurs que Rachida Dati va devoir affronter tout en mettant en œuvre des réformes contestées. Car la loi sur les peines plancher et sur la récidive, pour populaires qu'elles soient, hérissent le milieu judiciaire. Cette automaticité des peines qu'elle va instaurer de fait apparaît à beaucoup comme contraire à l'esprit de Justice qui est de juger avant tout en fonction des circonstances et des personnalités, et non pas d'appliquer un tarif.

Bref, les questionnements qui agitent la Justice ont largement de quoi voiler la gravité du beau sourire de Rachida. A moins que... Nicolas Sarkozy n'ait décidé de couvrir d'or Cendrillon en lui donnant un rôle de reine du Palais de justice de la République. A moins qu'il n'ait prévu un plan très ambitieux pour la Justice, et très généreux financièrement, afin de transformer les haillons de la justice française en costume éblouissant. Alors le sourire de Rachida Dati n'apparaitrait plus comme un cache-misère super-médiatique mais comme l'expression d'une Justice rayonnante et populaire. A suivre.

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