Philippe Guelpa-Bonaro, vice-président de la Métropole de Lyon, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Le 13 juin dernier, la justice administrative a annulé certaines dispositions du Règlement Local de Publicité (RLP) métropolitain, notamment l’interdiction absolue des publicités numériques extérieures. Une décision que la Métropole prend « très simplement », selon son vice-président à la réduction de la publicité, Philippe Guelpa-Bonaro, invité de 6 minutes chrono, l’émission quotidienne de Lyon Capitale. "On respecte le travail de la justice, contrairement à d'autres", affirme l’élu écologiste, tout en indiquant qu’un éventuel recours est à l’étude : "On a deux mois pour décider de faire appel ou pas. C’est dans les mains des services juridiques."
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Une interdiction justifiée par des enjeux environnementaux
Le cœur du contentieux porte sur l’interdiction généralisée des écrans publicitaires numériques dans l’espace public. Pour Philippe Guelpa-Bonaro, cette interdiction se justifie pleinement, tant du point de vue environnemental que sanitaire. "La publicité numérique, par son caractère animé, capte l’attention sans notre consentement, ce qui a un impact cognitif et perturbe le cadre de vie", explique-t-il. L’élu insiste aussi sur les nuisances pour la faune et la flore.
Le règlement prévoyait un zonage précis, interdisant les écrans numériques extérieurs dans toutes les zones mais autorisant, sous conditions, leur présence en vitrine. "Dans les vitrines des commerçants, les écrans numériques étaient permis dans notre RLP, à condition qu’ils affichent des images fixes et respectent les mêmes horaires d’extinction que les enseignes", rappelle Philippe Guelpa-Bonaro.
Selon lui, cette approche protège les paysages urbains tout en permettant aux commerces de centre-ville de s’équiper. "On laissait presque une sorte de monopole pour les commerçants, ce qui pouvait leur rapporter un certain nombre de redevances", souligne-t-il.
En réponse aux inquiétudes de certains commerçants, notamment dans la presqu’île lyonnaise affectée par les travaux, l’élu assure que "la réduction globale de la publicité est plutôt bénéfique pour nos entreprises du territoire". Et d’ajouter : "Les panneaux supprimés concernent surtout des enseignes nationales ou des villages de marques, pas les commerçants locaux."
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Plus de détails dans la vidéo :
La retranscription complète de l'émission Philippe Guelpa-Bonaro :
Bonjour à tous, bienvenue dans l'émission 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction de Lyon Capitale. Aujourd'hui, on va parler de publicité à Lyon et de sa réglementation dans la métropole de Lyon. Le contexte, c'est qu'en juin 2023, la métropole a adopté une nouvelle version du règlement local de la publicité, malgré un avis négatif des enquêteurs publics et de nombreuses critiques des métiers de la publicité. En juin 2025, la justice administrative a annulé les dispositions interdisant de façon absolue la publicité numérique dans l'agglomération. Pour en parler, nous recevons Philippe Guelpa-Bonaro, vice-président à la réduction de la publicité de la métropole de Lyon. Bonjour Philippe Guelpa-Bonaro. Merci d'être venu sur notre plateau. On va rentrer un peu dans le vif du sujet. Comment recevez-vous cette décision de justice qui est arrivée à la mi-juin de ce mois-ci ?
On en prend acte, très simplement. On respecte le travail de la justice, contrairement à d'autres, et donc on va voir comment on répond à cette décision. On a deux mois pour décider de faire appel ou pas. C'est dans les mains des services juridiques et on va prendre une décision avant l'été pour savoir ce qu'on fait.
Pourquoi est-ce qu'en amont, la métropole n'a pas jugé nécessaire d'expliciter la justification zone par zone, pour anticiper un petit peu ? Parce que c'est quelque chose qu'on entendait peut-être avant.
Selon nous, on l'a fait. On dit clairement dans les orientations du RLP que la lutte contre la pollution lumineuse est une orientation forte, un objectif. On a aussi l'amélioration du cadre de vie qui est le premier objectif du règlement local de publicité. Et puis dans le rapport de présentation, qui est le document cité par le tribunal administratif et la rapporteure publique, on fait un rappel à ce que dit la loi, le Code de l’environnement en termes d’impact sur le cadre de vie, sur la santé humaine, sur la biodiversité, de tout ce qui est lumineux, et encore plus numérique avec des effets de clignotement.
J’allais vous demander : qu’est-ce qui change, du point de vue environnemental, avec la publicité numérique ? Parce qu’au fond, c’est ça, en fait. Au-delà de la décision de justice, quel est l’impact de la publicité lumineuse numérique par rapport à celle qui ne l’est pas ?
En fait, le numérique et le caractère animé de la publicité numérique provoquent des mouvements. Et d’ailleurs, ce n’est pas pour rien que les publicitaires y sont tant attachés, parce que par le mouvement que ça crée, on capte l’attention sans que les gens aient décidé de regarder. Parce que c’est notre nature humaine, depuis la préhistoire : dès qu’il y avait un mouvement, on était en alerte, en danger. Et donc la publicité numérique, elle s’appuie sur le même réflexe, de capter l’attention sans notre consentement pour nous vendre des produits, des services dont on n’a souvent pas besoin. Donc c’est vraiment cet impact cognitif, sur la santé humaine, les impacts aussi en termes de cadre de vie. Tout ce qui est clignotement, animation, ça va créer un brouillage dans l’espace public, dans le paysage urbain. Et puis il faut aussi penser aux non-humains. Souvent, à côté d’un panneau numérique, il y a quand même un petit peu de végétation, quelques arbres, et dans ces espaces-là, il y a des animaux qui y vivent. Et en fait, quand un écran numérique simule la journée alors qu’on est déjà à 22 h, 23 h en plein hiver, ça perturbe totalement les écosystèmes. Donc selon nous, c’était tout à fait justifié. La rapporteure publique n’a pas la même lecture. Donc acte, on va voir comment on continue.
Parce que c’est quand même aussi… Il faut préciser que les écrans ne seront autorisés que dans les zones commerciales. Il y a un système de zonage, il y a une carte aussi de la publicité. Je ne sais pas si c’est possible de vulgariser un petit peu, mais d’expliquer comment ont été faites les zones. Parce que certains commerçants, notamment, ou annonceurs, ne comprennent pas qu’ils sont dans une zone ou dans une autre. Comment est-ce que c’est fait, ça ?
Alors il y a une dizaine de zones dans le RLP métropolitain qui correspondent aux tissus. Si on est en centre-ville dans le Vieux-Lyon, si on est en centre-ville à Montplaisir ou si on est à Saint-Priest dans une zone commerciale ou dans les Monts d’Or en zone très naturelle, on comprend, tout le monde comprend que ce ne sont pas les mêmes enjeux en termes de protection du cadre de vie et de lutte contre la pollution lumineuse. Et donc là, les publicités numériques extérieures étaient interdites partout parce qu’on connaît les impacts qu’elles ont. Et on s’est permis cette interdiction parce qu’on laissait les écrans numériques en vitrine possibles, mais encadrés : encadrés à un mètre carré dans les zones de centre-ville et résidentielles, et à deux mètres carrés dans les zones commerciales et le long des grands axes globalement. Et là, en fait, la rapporteure publique nous reproche de ne pas avoir assez justifié pourquoi on interdit les écrans numériques en zone hors agglomération. Ça nous semble relativement de bon sens que là où il n’y a personne, on ne mette pas de panneaux numériques, enfin d’écrans numériques. Et qu’aux abords des espaces naturels, on évite aussi de mettre des écrans numériques qui produisent des clignotements et qui impactent le paysage. Mais on ne l’a peut-être pas assez justifié. On va relire les analyses, relire les rapports de présentation et voir si on conteste ce jugement en appel.
Très bien. J’ai une dernière question un petit peu plus large. Alors qu’il y a beaucoup de travaux sur la presqu’île, il y a beaucoup de remontées de terrain de commerçants qui s’inquiètent de voir leur chiffre d’affaires à minima stagner, voire baisser, notamment parfois dans la restauration ou le prêt-à-porter. Comment lier enjeux de réduction publicitaire dans l’espace public et, en même temps, revitalisation des centres-villes ? Comment est-ce qu’on lie les deux ?
Il y a deux choses, en fait. Il y a la réduction de la publicité dite classique : 75 % de panneaux en moins, une protection très forte dans les zones résidentielles, aux abords des écoles notamment et dans les centres historiques. Ça, globalement, ce sont des publicités qui ne servent pas aux commerçants du centre de Lyon ou des centres-bourgs en règle générale. C’est de la publicité plutôt pour des enseignes nationales, voire comme on l’a vu parfois sur Bellecour, des villages de marques qui font de la concurrence à nos commerçants. Donc, d’une part, la réduction globale de la publicité est plutôt bénéfique pour nos entreprises du territoire, et notamment les commerçants. Et après, ce règlement local de publicité, justement, en laissant les dispositifs en vitrine dans les vitrines des commerçants mais en interdisant la publicité numérique extérieure, laissait presque une sorte de monopole ou de priorité pour les commerçants, pour qu’ils puissent mettre ces panneaux numériques-là qui peuvent leur apporter un certain nombre de redevances en termes de loyer. Mais la seule réglementation qu’on mettait, c’était le même horaire d’extinction que les enseignes, et que ne s’affichent que des images fixes pour justement limiter ce mouvement, ce clignotement qui attire l’attention. Donc les écrans numériques étaient tout à fait permis dans notre RLP, dans les vitrines des commerçants. Et là, ils sont encore permis, mais avec un effet d’animation, de clignotement, ce qui est dommage à mon avis pour le cadre de vie.
Très bien, ce sera le mot de la fin. C’est déjà la fin des 6 minutes chrono. Merci beaucoup pour avoir donné votre point de vue. Quant à vous, merci d’avoir suivi cette émission. Plus de détails sur le règlement local de publicité sur le site lyoncapitale.fr. Je vous dis à très bientôt.