Bianca Bondi – The Sacred Spring and necessary reservoirs (détail), 2019 [Courtesy de l’artiste et VNH Gallery, Paris ; galería José de la Fuente, Santander] © Blandine Soulage / Adagp, Paris, 2019
Bianca Bondi – The Sacred Spring and necessary reservoirs (détail), 2019 [Courtesy de l’artiste et VNH Gallery, Paris ; galería José de la Fuente, Santander] © Blandine Soulage / Adagp, Paris, 2019

Que voir à la Biennale de Lyon ? La nature morte saline de Bianca Bondi

Un vent de changement souffle sur la 15e édition de la Biennale d’art contemporain. Sous l’égide de sept jeunes commissaires du palais de Tokyo, elle investit cette année un lieu inédit, indissociable de l’histoire lyonnaise. Les anciennes usines Fagor-Brandt, qui gardent l’empreinte d’une industrie électroménagère autrefois florissante, accueillent les œuvres de 47 artistes. Celle de Bianca Bondi ne vous laissera pas de glace.

C’est d’abord la curiosité qui nous attire vers le recoin où se déploie l’installation de Bianca Bondi. Sa position, dans l’un des rares espaces cloisonnés des anciennes usines, en retrait d’une halle 2 plongée dans la pénombre, accentue l’impression de s’engager dans une pièce secrète. En entrant, l’atmosphère change, se densifie. Dans le prolongement d’un bassin aux reflets vert-de-gris, se dévoile le paysage domestique d’une cuisine emprisonnée sous une couche de givre. Le lien est évident avec le contexte de production de l’œuvre, et la vue de ce vestige électroménager surprend autant qu’elle attire. L’air est lourd et métallique. C’est en s’approchant que l’on identifie le sel comme la nature de la seconde peau qui recouvre l’ensemble. Surfaces liquides, bocaux énigmatiques, fleurs fanées, portes de placard entrouvertes semblent figés dans cette nature morte saline. Au gré des changements des éléments extérieurs – humidité, température, densité de visiteurs –, la matière se cristallise et se liquéfie.

Alchimie à la source

L’élément salé est omniprésent dans la pratique de la jeune artiste italo-sud-africaine, dont les œuvres semblent être autant de paysages sous-marins et intimes desquels la mer se serait retirée. Artiste alchimiste, son intérêt pour les sciences occultes va de pair avec une certaine fascination pour la beauté des phénomènes scientifiques et naturels, qu’ils soient maîtrisés ou aléatoires. Bianca Bondi utilise le sel, l’eau et le métal dans une pratique à mi-chemin entre sorcellerie et expérience chimique en s’immergeant dans l’histoire des lieux où elle expose. À Fagor, c’est au cœur du site qu’elle a voulu rendre ce vibrant hommage au passé, en créant une “source sacrée” (sacred spring). Heureuse coïncidence ou intuition magique, le local choisi pour accueillir son œuvre, autrefois salle de repos de cette vaste halle, était doté d’une cuisine. “Quand j’investis un lieu, dit l’artiste, je ne peux pas me contenter de poser ma pièce. Le lieu rentre dans la pièce. Pourquoi la pièce ne travaillerait-elle pas avec ce qui est déjà là* ?”

* “Entretien avec Bianca Bondi”, Le Châssis, 2015.

Là où les eaux se mêlent / 15e Biennale d’art contemporain de Lyon – Jusqu’au 5 janvier dans les anciennes usines Fagor-Brandt (Lyon 7e/Gerland), au musée d’Art contemporain et dans de nombreux autres lieux de l’agglomération


[Article extrait du cahier Culture de Lyon Capitale n° 793 – Novembre 2019]

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