Photo d’illustration. © Tim Douet

Encadrement des loyers : où en est-on trois ans après sa mise en place à Lyon et Villeurbanne ?

Mis en place le 1er novembre 2021, l'encadrement des loyers à Lyon et Villeurbanne va souffler sa troisième bougie. L'occasion pour la Métropole de Lyon et la préfecture du Rhône de dresser un premier bilan du dispositif qui ne demande qu'à monter en puissance.

Dans quelques semaines, cela fera trois ans que l'encadrement des loyers est en place dans les communes de Lyon et Villeurbanne. Depuis le 1er novembre 2021 une expérimentation est en cours pour lutter contre les niveaux de loyers excessifs et limiter leur augmentation dans les secteurs en forte tension immobilière. Une expérimentation qui devrait prendre fin le 1er novembre 2026 avant d'être probablement pérennisée. C'est en tout cas le souhait de la Métropole de Lyon et de la préfecture du Rhône qui ont fait ce mercredi matin un premier bilan sur ce dispositif "qui monte en puissance".

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"On constate ces dernières années une forte adhésion de la population et un fort intérêt à la fois des locataires et des propriétaires" débute Bruno Bernard, président de la Métropole qui annonce plus de 815 000 simulations de loyers réalisées par les usagers sur le calculateur proposé par la collectivité. "Deux tiers sont des locataires et un tiers des propriétaires" complète le président écologiste.

Si la Métropole se félicite d'une baisse du taux de non-conformité des annonces à Lyon et Villeurbanne, elle constate, pour l'année 2024, encore 29% d'annonces qui ne rentrent pas dans les clous de l'encadrement des loyers. Un chiffre "encore bien trop haut" de l'aveu même de Bruno Bernard, mais qui est légèrement plus faible que celui dévoilé en juin dernier par l'observatoire LFC (31%).

Jusqu'à 5000 euros d'amende pour un particulier

Du côté de l'Etat et de la préfecture, une procédure d'amende administrative a été mise en place conjointement à l'encadrement des loyers. "Avant la signature du bail, la répression des fraudes (service géré par la Direction départementale de la protection des populations) peut déjà contrôler les professionnels" reprend Vanina Nicoli, secrétaire générale de la préfecture du Rhône. En 2023, la DDPP a contrôlé 36 agences immobilières et adressé 12 injonctions de mise en conformité. "Elles ont toutes été respectées jusque-là" poursuit la préfète déléguée. Entre janvier et août 2024, 15 établissements ont fait l'objet d'un contrôle et 7 injonctions ont été adressées. Des contrôles réalisés la plupart du temps suite à des signalements de particuliers ou de collectivités comme la Métropole de Lyon.

Le deuxième volet répressif mis en place au sein du dispositif concerne les signalements effectués par les locataires eux-mêmes. Une procédure de mise en demeure administrative est alors lancée et les bailleurs ne respectant par l'encadrement du loyer disposent de deux mois pour se mettre en conformité et rembourser aux locataires les loyers trop-perçus. "Si à l'issue de ce délai le propriétaire n'a pas régularisé la situation, une amende administrative peut être fixée" ajoute Vanina Nicoli. Cette amende, qui peut atteindre 5000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale est "proportionnée à la gravité du manquement constaté".

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Des sanctions finalement assez minimes qui ne peuvent s'appliquer aux propriétaires privés qu'en cas de signalement de la part du locataire. "Il y a un vrai enjeu d'information pour que cette mesure soit connue du plus grand nombre, aussi bien des propriétaires que des locataires" estime Vanina Nicoli. Et des sanctions administratives (l'amende est prononcée par arrêté préfectoral) qui n'ont aucun effet sur le contrat de location proprement dit. Si le propriétaire se voit infliger une amende par la préfecture, seule une action en justice engagée par le locataire permet de faire régulariser à terme le montant du loyer prévu par son contrat de location.

200 000 euros restitués aux locataires

Depuis deux ans, 184 signalements ont été reçus dans le cadre du dispositif, dont 134 en 2024, preuve, selon la préfecture et la Métropole, que le dispositif monte en puissance. Dans 95% des signalements, la mise en demeure administrative suffit et près de 200 000 euros ont ainsi été restitués aux locataires, soit 1843 euros par dossier en moyenne. "Ce chiffre de 95% montre bien que les propriétaires prennent aussi conscience de l'enjeu et qu'à cet égard le dispositif est une réussite" admet la préfète déléguée. Seulement 6 arrêtés préfectoraux ont été pris pour des montants d'amendes allant de 3000 à 4500 euros à l'encontre de propriétaires refusant la régularisation du bail locatif.

Autre enjeu de ce dispositif qui vise à "redonner du pouvoir d'achat aux Grandes Lyonnaises et Grands Lyonnais", la question des compléments de loyer. Encore flou et très peu encadré par la loi, ce complément est parfois utilisé à tort par les propriétaires pour gonfler artificiellement le loyer de leur logement. Si une liste négative de critères existe pour lesquels le propriétaire a interdiction d'appliquer un complément de loyer (vis-à-vis de moins de 10 mètres, DPE F ou G par exemple), aucune liste n'explicite clairement dans quel cas le propriétaire y a le droit. "C'est encore assez flou et des discussions devront être menées pour clarifier un peu tout ça" confirme Renaud Payre. Avant de poursuivre : "Cela fait deux ans que je tends la main aux organisations représentatives des propriétaires pour qu'on puisse déterminer ensemble ce qui pourrait faire l'objet, ou non, d'un complément de loyer. Pour l'heure, ma main tendue n'a pas trouvé preneur et je le regrette fortement".

Vers une extension à d'autres communes ?

Si pour l'instant le dispositif s'applique seulement aux communes de Lyon et de Villeurbanne, la Métropole de Lyon a fait savoir qu'elle était favorable à son extension à d'autres villes de l'agglomération. "A l'heure actuelle la loi ne le permet pas avant la fin de l'expérimentation en 2026. Mais cette question sera à nouveau débattue, notamment pour les communes qui possèdent des lignes fortes de transports" avoue Bruno Bernard. Les villes d'Oullins, Tassin et Caluire pourraient être choisies pour étendre le dispositif comme l'évoquait il y a quelques semaines Renaud Payre à nos confrères d'Actu Lyon.

Si ce dispositif est critiqué par certains représentants de propriétaires comme la Fédération nationale de l'immobilier du Rhône (FNAIM), il a déjà produit des effets concrets sur le prix des loyers à Lyon et Villeurbanne. "Avant la mise en place de l'expérimentation, on avait constaté une hausse de loyer sur ce périmètre" affirme la préfète. "On voit que cette hausse a été jugulée depuis le début de l'expérimentation". Selon les chiffres communiqués par la préfecture, en dehors du périmètre, les loyers sont en hausse de 2,5% entre 2021 et 2023, tandis qu'à Lyon et Villeurbanne ils ont dans le même temps baissé de 4%. "Après deux ans d'expérimentation, l'effet est déjà là" se félicite Vanina Nicoli. Un effet qui pourra donc se poursuivre encore, au moins, pour les deux années à venir.

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