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Dr Ternamian, radiologue à Lyon : "les généralistes se sont fait tirer dessus comme des lapins par le DG de la santé"

Pierre-Jean Ternamian, à la tête des 13 500 médecins libéraux d’Auvergne-Rhône-Alpes, porte un "regard désabusé" sur la gestion de la crise sanitaire par les autorités.

Grande gueule naturelle, dont la barbe épaisse en impose comme les grizzly et les ours kodiak qu'il aime photographier en Alaska, Pierre-Jean Ternamian préside depuis 2016  l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) pour les médecins libéraux qui contribue à l’organisation de l’offre de santé régionale. Cet hyperactif, doté d’un carnet d’adresses aussi long que le bras,  
Lyon Capitale : Êtes-vous une grande gueule ?
Pierre-Jean Ternamian : Oui, probablement (il réfléchit)... J’ai déjà fait deux passages aux Grandes Gueules de RMC (rires).
L’êtes-vous encore plus depuis la crise sanitaire ?
Ça m’a, à certains moments, rendu un peu plus hargneux, effectivement. Quand on voit l’inertie du système, on a parfois envie de hurler.
Début mars, une note de la Direction générale de la santé (DGS) a semé le trouble chez les médecins généralistes puisqu’elle indiquait qu’ils ne pourraient pas commander de doses de vaccins AstraZeneca dans l’immédiat, la livraison étant réservée aux pharmaciens. Au-delà de ce petit couac, que montre la gestion de la crise sanitaire ?
Un petit couac ? Une grosse boulette plutôt. On a reçu un message "DGS-urgent" un dimanche soir à 22 h 06 ! De qui se moque-t-on ? Pour qui nous prennent-ils à Paris ? C’est un peu comme si votre patron – pour le coup, pour vous les journalistes, l’information ne s’arrête jamais – vous disait la veille de votre présentation, à des partenaires hyper importants, sur laquelle vous travaillez d’arrache-pied depuis des semaines que c’est annulé, sans plus de précisions. Les médecins généralistes étaient investis depuis des semaines dans la vaccination, en bousculant leurs agendas et en contactant les patients prioritaires en fonction de l’évolution constante des populations ciblées. Décider de prioriser les pharmaciens a pénalisé les médecins généralistes. On a été obligé d’annuler tous les rendez-vous.
Quel est le risque ?
L’incohérence du gouvernement risque de nuire à la fiabilité de la démarche vaccinale et de générer un sentiment d’hostilité à l’égard des autorités sanitaires. Il ne faut pas oublier d’où l’on vient : on a ramé pour faire en sorte que la population, dans sa majorité, souhaite se faire vacciner. 6 Français sur 10 disent aujourd’hui vouloir recevoir le vaccin, c’est dix-neuf points de plus qu’en décembre. La mayonnaise a pris. Mais ça n’a pas été de tout repos, il a fallu convaincre. Cette histoire montre l’incurie, si tant est que personne ne la soupçonnait, de la Direction générale de la santé et de l’administration centrale de la santé. Les médecins généralistes se sont fait tirer dessus comme des lapins par Jérôme Salomon. Ils ont été humiliés. Soyons sérieux deux minutes : les médecins généralistes sont les acteurs des soins de proximité qui connaissent le mieux la santé de la population et les plus à même d’assurer la coordination avec les autres professionnels.
 

"La stratégie de vaccination française est pilotée au gré du vent"


Pharmaciens contre médecins ?
Le gouvernement, dans un cynisme parfait, a privilégié un professionnel de santé au détriment d’un autre. C’est quand même grave. Le schéma vaccinal est bafoué. Sans compter que les pharmaciens ne disposent pas des dossiers des patients. Ce sont les médecins qui les ont. Le danger est donc que les facteurs à risque ne soient pas pris en compte. Cette annonce à la con, excusez-moi pour ce langage fleuri mais je ne décolère pas, fout tout en l’air. Je le dis clairement : la stratégie de vaccination française est pilotée au gré du vent.

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