Mariage pour tous : fortes réserves du Conseil d’Etat

Alors que la discussion se poursuit à l’Assemblée nationale sur le mariage pour tous, LaVie.fr s’est procuré l’avis du Conseil d'Etat (octobre 2012) concernant l'ouverture au mariage des couples de personnes de même sexe. Les réserves sont nombreuses, importantes et souvent très proches de celles soulevées dans Lyon Capitale depuis quelques semaines. Extraits.

Sur l'adoption, qui, quoi qu’en disent le président de la République et le gouvernement aujourd’hui, reste le point clé du projet de loi, le Conseil d'Etat met en exergue les failles de l'étude d'impact qui accompagne ledit projet : elle "ne traite pas, contrairement à ce qu'imposent les dispositions de la loi organique du 15 avril 2009, des questions multiples et complexes que soulève l'ouverture de l'adoption aux conjoints de même sexe, tant dans le cadre de l'adoption internationale que, plus généralement, au regard de l'appréciation que les autorités compétentes seront amenées à faire de l'intérêt de l'enfant et qui est opérée, en droit positif, de manière concrète, au cas par cas. Par ailleurs, l'adoption plénière a pour effet de supprimer juridiquement la filiation par le sang pour lui substituer un nouveau lien de filiation découlant du jugement qui l'a prononcé. Par suite, l'acte de naissance d'origine de l'enfant est remplacé par un nouvel acte établi à partir du jugement d'adoption sans aucune référence à la filiation réelle de l'intéressé".

La question cruciale de l’accès aux origines

Puis le texte poursuit : "Alors que la filiation est un élément essentiel de l'identification pour chaque individu tant sur le plan biologique que social et juridique, l'état civil ainsi reconstitué mettra en évidence, par la référence à des parents de même sexe, la fiction juridique sur laquelle repose cette filiation. Le Conseil d'Etat appelle donc l'attention du gouvernement, d'une part, sur les conséquences de cette situation au regard de la question, délicate et toujours en débat, de l'accès aux origines et, d'autre part, sur les précautions qu'il conviendra de prendre dans la rédaction des actes de naissance en cause". Le Conseil d'Etat pointe ainsi l’argument de l'inégalité entre les adoptés : ceux dont on saura forcément qu'ils sont adoptés puisqu'ils seront officiellement « nés » de deux hommes ou de deux femmes, et ceux dont on l'ignorera puisqu'ils seront inscrits dans un schéma familial plus classique.

L’altérité sexuelle des époux

Par ailleurs et d’une façon plus générale, le Conseil d'Etat met en garde le gouvernement sur l'impact du mariage pour tous sur les mariages hétérosexuels. "Eu égard à la portée d'un texte qui remet en cause un élément fondateur de l'institution du mariage, [à savoir] l'altérité sexuelle des époux, et compte tenu des conséquences insuffisamment appréhendées par l'étude d'impact qu'un tel changement apportera à un grand nombre de législations, dans l'ordre pratique comme dans l'ordre symbolique, le Conseil d'Etat souligne l'importance qui s'attache au maintien, dans son périmètre actuel, d'un projet qui ouvre le mariage et l'adoption aux couples de même sexe dans les mêmes conditions que pour les autres couples, sans changer en rien les conditions applicables pour ces derniers".

Les effets pervers pour les conjoints étrangers

Enfin, concernant les contractants du mariage eux même, le Conseil d'Etat s'interroge sur les effets pour les conjoints étrangers. "L’ouverture des mariages entre personnes de même sexe aux étrangers risque de favoriser les mariages que la doctrine a qualifiés de « boiteux », en ce qu'ils produisent des effets en France mais s'avèrent nuls selon la loi étrangère des époux. Dans des hypothèses exceptionnelles, mais qui doivent être prises en considération, ces mariages pourraient même exposer certains étrangers à des sanctions pénales dans leur pays d'origine".

Prochaine étape, le Conseil Constitutionnel

Si l’avis du Conseil d'Etat n’est que consultatif et ne devrait pas, à ce stade, remettre en cause l’adoption au Parlement du mariage pour tous, le Conseil Constitutionnel pourrait en revanche s’appuyer sur l’avis des sages du Palais Royal pour censurer, voire carrément retoquer le texte. C’est d’ores et déjà un coup dur pour le gouvernement et une victoire symbolique pour les opposants au texte, un peu vite accusés d’homophobie voire d’antisémitisme par M. Bergé et les plus médiatiques de ses amis. Le Théâtre du Rond-Point n’est certes pas la France et Laurence Ferrari n’est pas Marianne. A force de prosélytisme acharné et de mises en scènes grotesques, les socialistes et leurs alliés sont en train de faire reculer la cause qu’ils prétendent servir. Pas certain en effet que l’anathème et la loi de Godwin soient les meilleures armes pour faire progresser les droits des homosexuels en France. Comme le dirait Gérard Collomb dans un langage plus fleuri, ce gouvernement fait un peu amateur, qu’il s’agisse de fiscalité, d'économie, ou, désormais, de faits de société.

Didier Maïsto

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