VIRAGE SUD LYON
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Supporter lyonnais gravement blessé : son témoignage

Dimanche 19 octobre, en marge du match OL/Montpellier, des échauffourées ont éclaté aux abords du stade de Gerland. Alexandre Meunier, 25 ans, a reçu un tir de flash-ball sur l’œil droit. À ce jour, il est toujours hospitalisé à l’hôpital Edouard-Herriot. Nous l’avons rencontré.

Pour la première fois depuis son hospitalisation, le jeune homme s’exprime devant la presse. Nous avons recueilli ses propos.

Depuis "bientôt onze ans", Alexandre est de tous les matchs de l’OL. Ardent supporter, il n’hésite jamais à se déplacer aux quatre coins de la France pour suivre son équipe favorite, une "vraie passion" qui lui "prend beaucoup de temps". Auparavant sympathisant de l'ancien groupe de supporters les Lugdunums, au sein de la tribune virage Sud, il "n’adhère à aucun groupe depuis maintenant cinq ans". Il nous raconte : dimanche soir, il se rend comme à son habitude au stade de Gerland, pour assister à la rencontre face à Montpellier, quand il est témoin d’échauffourées entre supporters lyonnais et montpelliérains – "Ils se trouvaient à environ 250 m de moi."

Nous avons également contacté la police pour de plus amples explications concernant les violences. Il semblerait que les supporters montpelliérains ont contourné l’escorte initialement prévue pour eux au péage de Vienne, "visiblement pour en découdre avec les supporters lyonnais", selon Pascal Barthélémy, membre du syndicat de police Alliance.

Alexandre explique s'être ensuite approché, en passant à "plusieurs reprises devant les caméras des policiers". Une curiosité qui va lui coûter cher. Il nous explique avoir voulu s’interposer entre un groupe de Montpelliérains et des familles en proie à la panique. Il est alors identifié par des agents des forces de l’ordre. Quelques minutes plus tard, il recevra un tir de flash-ball au niveau de son œil droit. "Je me suis effondré par terre, le coup était très violent", raconte-t-il. Il est transporté par les urgences dans les heures qui suivent et hospitalisé à l’hôpital Edouard-Herriot.

Erreur sur la personne ?

Aux alentours de 4h du matin, des "officiers de la Bac et de la police des polices" se rendent à son chevet. Alexandre nous rapporte ce qu’ils lui ont dit : "Parfois, si un collègue nous fait bouger le coude, le coup est mal visé et frappe au mauvais endroit." Car la blessure elle-même soulève des questions. Normalement, l’usage du flashball est très réglementé. Il est formellement interdit de cibler au-dessus de la ceinture. Pascal Barthélémy nous indique également que, dans certaines circonstances, dans le cas de "manifestations ou d’affrontements, la visibilité pour les forces de l’ordre est très réduite". Il n’est donc pas "rare que l’on touche une personne qui n’était pas visée au départ", ou même que l’on ne fasse pas la différence entre les "casseurs" et de simples spectateurs.

Pourtant, Alexandre affirme qu’il n’était pas au milieu du groupe de Montpelliérains, mais isolé "sur le côté gauche du fourgon des policiers". Il n’a donc pas pu y "avoir erreur sur la personne". À plusieurs reprises, le jeune homme reviendra sur son incompréhension face à ce qui s’est passé : "Je ne comprends pas, ils ont pourtant commencé à tirer dans les jambes des supporters de Montpellier, pourquoi ils n’ont pas fait la même chose avec moi ?" Il insiste également sur le fait qu’il aurait fallu être "fou" pour participer aux affrontements, au nez et à la barbe des policiers – "Je n’allais pas m’y mettre moi aussi, alors que les policiers étaient devant moi avec les flash-balls."

Des interdictions de stade qui interpellent

Selon la police, Alexandre aurait déjà été interdit de stade à plusieurs reprises. C’est inscrit dans son dossier. Quand nous lui posons la question, le jeune homme ne nie pas les faits : "La première fois, c’était parce que mon groupe avait oublié d’indiquer le lieu d’arrivée du car de supporters à la préfecture. La seconde fois, en 2009, les policiers avaient trouvé que nous étions trop proches des supporters stéphanois." Dans les deux cas, il s’agissait d’IAS (interdictions administratives de stade).

Les IAS ne font pas l’objet d’un jugement au tribunal, il s’agit d’une décision unilatérale de la préfecture, nous explique le jeune homme. Il tient d’ailleurs beaucoup à cette précision : "Je n'ai jamais été interdit de stade pour cause de violences." Une association a d’ailleurs été créée il y a un an, l’ALDDVS, qui a pour vocation de monter des actions en justice à chaque fois qu’une IAS est jugée arbitraire ou abusive. La dernière interdiction de stade d’Alexandre "remonte à cinq ans". Depuis, il nous assure ne plus avoir été dans le viseur de la police.

Vers un abandon du flash-ball ?

À ce jour, le diagnostic d’Alexandre n’est pas encourageant. À la suite d’une maladie intervenue il y a plusieurs années, le jeune homme n’a plus l’usage de son œil gauche. Aujourd’hui, le droit, touché par le flash-ball, a déjà perdu 5/10 et cela pourrait s’aggraver s’il y a déchirement de la rétine.

Néanmoins, le jeune homme ne souhaite pas "salir la réputation du policier ou lui faire perdre son travail". Il engagera certainement une action en justice, mais principalement pour connaître les raisons qui ont poussé le policier à lui tirer au niveau de la tête. "Je sais que les caméras de vidéosurveillance ont tout filmé et, quand on aura les enregistrements, ils verront que je ne participais pas aux affrontements."

Au-delà de sa quête de vérité, Alexandre souhaiterait que son cas fasse jurisprudence et que l’utilisation du flash-ball soit mieux encadrée, "voire supprimée" à l’avenir. Du côté de la police, la solution est difficilement envisageable. Le flash-ball s’est d’ailleurs généralisé pour "éviter de tuer des gens avec des armes à balles réelles", nous explique Pascal Barthélémy. Ce genre d’incident n’est pas une première. Il fait écho au cas d'un jeune supporter montpelliérain blessé lui aussi à l’œil par un tir de flashball en septembre 2012.

Il faut maintenant attendre les conclusions de l’enquête qui a déjà commencé et l’exploitation des enregistrements vidéo, qui sera déterminante.

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