Emmanuel Giraud, conseiller délégué PS à la Ville de Lyon, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Malgré des sondages inquiétants pour la majorité municipale sortante, Emmanuel Giraud, conseiller délégué PS à la Ville de Lyon, estime que la campagne ne fait que commencer, sans nier la difficulté du combat face à Jean-Michel Aulas : "il ne faut pas qu’on fasse campagne contre Jean-Michel Aulas. Si l’adversaire, entre guillemets, sert à fabriquer notre programme, on se trompe de combat. Il faut d’abord qu’on fasse notre bilan. Et je pense qu’aujourd’hui, d’ailleurs, les sondages l’ont montré : sur les actions menées, les Lyonnais ont plutôt adhéré".
L'élu socialiste revient aussi sur les victoires arrachées à l'Assemblée nationale par les députés de son parti et les renoncements présentés notamment par les Insoumis comme des trahisons : "Bon nombre de Français, je crois que c’était deux sur trois, s’opposaient à la réforme des retraites. Nous avons réussi à obtenir des inflexions sur le sujet. Je pense que nous n’avons trahi personne lorsqu’on a obtenu ces petites victoires. Et il n’y a pas que sur la réforme des retraites qu’il y a eu une avancée. Il y a eu d’autres éléments sur le volet social. Et je pense qu’on ne trahit pas les gens quand on obtient des victoires sociales, même modestes".
La retranscription intégrale de l'entretien avec Emmanuel Giraud
Bonjour à tous et bienvenue, vous regardez 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction de Lyon Capitale. Aujourd’hui, nous accueillons Emmanuel Giraud. Vous êtes conseiller délégué du Parti socialiste à la ville de Lyon. Vous avez, vous, le Parti socialiste, scellé une alliance avec les écologistes et les communistes. Est-ce qu’on peut réellement parler d’union de la gauche autour de la majorité sortante de Grégory Doucet, sachant qu’il n’y a pas la France insoumise ?
Il y a déjà une bonne partie de la gauche. Effectivement, il n’y a pas la France insoumise. La France insoumise a fait le choix de partir seule, en tout cas au premier tour des municipales. Mais on a une bonne partie de cette gauche et nous sommes assez fiers d’avoir pu rassembler, déjà depuis quinze jours, le Parti communiste, le Parti socialiste, Debout, la gauche républicaine et sociale.
Les Insoumis ne sont pas là. Est-ce que, vous, ça vous a arrangé personnellement, ou vous, en tant que socialiste, de ne pas avoir à faire d’alliance avec les Insoumis dès le premier tour ? Est-ce que finalement c’est un mal pour un bien ?
Écoutez, ça montre en tout cas que la gauche progressiste, celle qui veut réformer avec une certaine sagesse, souhaite renouveler son mandat à la ville. Il y a certaines idées que la France insoumise porte et auxquelles nous adhérons, bien évidemment, mais nous aurons le temps, je pense, dans un éventuel second tour, de nous rassembler. Mais effectivement, ça permet, et moi je le vois aujourd’hui quand je fais du porte-à-porte depuis le début de la campagne, j’étais encore sur la Duchère samedi matin, qu’on nous demande parfois si c’est la gauche dans son entièreté, la gauche avec ou sans les Insoumis, et on a des réactions parfois différentes. Certains citoyens auraient aimé que l’on soit dès le premier tour avec les Insoumis, mais ils ont fait le choix de partir seuls, de leur côté, pour se compter.
Et au second tour, vous n’auriez aucun problème à faire une alliance avec eux ?
Moi, je n’ai pas de problème avec les Insoumis. Il y a effectivement peut-être des points de programme sur lesquels il faudra revenir. Je pense notamment à la réquisition des logements vacants, qui est une des premières mesures portées par Anaïs Belouassa Cherifi, sur laquelle il me semble qu’on aura quelques difficultés à s’entendre. Mais ce sera dans une négociation de second tour sur un programme harmonisé.
Cette campagne démarre avec, pour l’instant, la majorité sortante autour de Grégory Doucet qui est à la traîne dans les sondages. Jean-Michel Aulas frôle une victoire au premier tour. Est-ce que vous pensez que cette tendance peut s’inverser ? Parce qu’on est quand même sur une tendance lourde.
Oui. Alors si je vous disais que je ne crois pas aux sondages, vous me diriez que c’est la méthode Coué. Donc les sondages, il faut en tenir compte. Ce sont des premiers sondages.
Et qu’est-ce qu’ils illustrent pour vous ? Est-ce qu’ils illustrent la popularité de Jean-Michel Aulas, l’impopularité de Grégory Doucet, ou une combinaison des deux ?
Je pense qu’objectivement, et dans une analyse vraiment factuelle, Jean-Michel Aulas a trois qualités. Il a évidemment la notoriété, on en a beaucoup parlé. Il a aussi, en tant qu’ancien capitaine économique, dans une France aujourd’hui un peu déchirée, le profil d’une personne qui rassure, une personne mûre qui prendrait les rênes d’une collectivité. Et puis, il faut le dire, il y a un certain dégagisme, une espèce d’impatience. Ce n’est pas un dégagisme envers Grégory Doucet, mais il y a ce réflexe aujourd’hui, lors des élections, de vouloir dégager le sortant. C’est un peu à la mode. Ça s’est vu au niveau national, ça peut se voir au niveau local. Après, reste à savoir derrière tout cela : qui est Jean-Michel Aulas ? Quel est son programme ? Avec quelle équipe va-t-il travailler ? Et ça, les questions demeurent, mais on n’a pas encore les réponses.
Comment contourner sa popularité ? Arriver finalement à recréer peut-être aussi une attente autour de votre majorité sortante, autour de Grégory Doucet ? Est-ce que ça passe par un examen de conscience, par un bilan en disant : “peut-être que là-dessus on est allés trop loin, peut-être qu’on vous a brusqués” ? Quelles propositions pourraient trouver un écho auprès des Lyonnais ?
D’abord, je pense qu’il ne faut pas qu’on fasse campagne contre Jean-Michel Aulas. Si l’adversaire, entre guillemets, sert à fabriquer notre programme, on se trompe de combat. Il faut d’abord qu’on fasse notre bilan. Et je pense qu’aujourd’hui, d’ailleurs, les sondages l’ont montré : sur les actions menées, les Lyonnais ont plutôt adhéré. Donc il faut qu’on s’appuie sur ce bilan.
Comment vous expliquez qu’ils adhèrent mais qu’ils sanctionnent en même temps ?
Je me pose quelques questions, et c’est là où je m’interroge aussi sur le résultat de ces sondages. Je pense effectivement qu’il y a peut-être des attentes sur plus de concertation, sur la nécessité de revoir certaines politiques que nous avons pu mettre en place. Je pense qu’effectivement, ça a été un mandat de retournement sur certaines politiques à 180 degrés. Peut-être qu’elles ont été, à un moment, trop offensives. Moi, je suis assez convaincu que sur certains sujets, il faut qu’on amplifie notre action : sur le logement, sur l’éducation, et peut-être sur d’autres sujets. Il faut qu’on rétablisse un certain équilibre, plus discuter peut-être sur les mobilités, on sent que cela a froissé, effectivement. Mais on est quand même intimement convaincus que nous montrons un chemin, qu’aujourd’hui la ville de Lyon et la métropole de Lyon changent, évoluent. La démographie évolue, la sociologie évolue. Et nous restons convaincus que ce qui a été porté pendant six ans vise à être poursuivi dans le prochain mandat.
Petite question pour finir sur le climat national : il y a cette étape du budget. Les socialistes ont fait le pari d’essayer de trouver des solutions avec Sébastien Lecornu et de parvenir à des compromis. Il y en a eu un, la suspension de la réforme des retraites. Est-ce que vous diriez que le bilan est globalement positif ? Est-ce que le Parti socialiste a bien fait de s’engager dans cette démarche ? Ou est-ce que, comme le reprochent les Insoumis, vous avez trahi ?
Alors, on a trahi qui, en fait ? On a trahi les partis qui nous entourent ? Ou est-ce qu’on a trahi les Français en faisant le choix d’obtenir des avancées sociales importantes ? Bon nombre de Français, je crois que c’était deux sur trois, s’opposaient à la réforme des retraites. Nous avons réussi à obtenir des inflexions sur le sujet. Je pense que nous n’avons trahi personne lorsqu’on a obtenu ces petites victoires. Et il n’y a pas que sur la réforme des retraites qu’il y a eu une avancée. Il y a eu d’autres éléments sur le volet social. Et je pense qu’on ne trahit pas les gens quand on obtient des victoires sociales, même modestes.
