Gérard Collomb © Tim Douet

L’affaire Collomb est-elle une boule puante ?

Depuis la révélation de l’affaire Collomb, le maire de Lyon et ses soutiens dénoncent une manipulation politique. Ils s’appuient notamment sur des déclarations maladroites de l’entourage de David Kimelfeld et ciblent aussi l’attitude devenue hostile d’En Marche. Cette affaire trouve pourtant son origine dans un signalement au procureur de la République effectué par Gérard Collomb lui-même.

Dès mardi soir, Gérard Collomb a adressé un communiqué à l'AFP pour réagir aux révélations du Canard enchaîné sur l'ouverture préliminaire d'une enquête à son encontre par le Parquet national financier (PNF) pour détournement de fonds publics. Le maire de Lyon dénonce “des informations tant inacceptables qu’intolérables et déjà largement propagées”. “Il n’échappera à personne, poursuit-il, [que] les véritables raisons qui conduisent ceux qui ont pris l’initiative de diffuser de telles informations [sont] de m’atteindre à dix mois des élections municipales”.

Ce jeudi matin, lors d'une conférence de presse consacrée à la végétalisation des rues de Lyon, Gérard Collomb a de nouveau évoqué une instrumentalisation de ces révélations : “Je l'ai dit, je m’inquiète que ce problème, qui, si j'en crois ce que je vois, date d'une vingtaine d'années, sorte juste après les élections européennes et juste avant les municipales. Cette frénésie peut étonner. On verra bien ce que cela donne. Est-ce qu'il y avait des gens qui auparavant étaient au courant de l'enquête ? Il semble que d'autres personnes l'étaient dans la ville. Elles avaient pour une fois, si je puis dire, un temps d'avance sur moi.”

Prophétie

Certains proches du maire de Lyon estiment que David Kimelfeld est à la manœuvre. “La veille des révélations du Canard enchaîné, un membre de l'entourage de David Kimelfeld annonçait que des infos allaient sortir dans les prochaines heures. Il a aussi contacté des élus qui soutiennent Gérard Collomb pour leur dire que c'était le moment de basculer dans l'autre camp”, rapporte un conseiller métropolitain loyal au maire de Lyon. C'est à ces messages que faisait notamment référence Gérard Collomb en évoquant ceux qui avaient “un temps d'avance”.

Une affaire à la Fillon promise

Comme nous l'écrivions dans l'édition de mai de Lyon Capitale, des rumeurs circulaient depuis de nombreuses semaines. Des soutiens de David Kimelfeld évoquaient, avec une grande impatience, le prochain rapport de la chambre régionale des comptes, en particulier le passage concernant l'ex-compagne du maire de Lyon. “Gérard Collomb a fait embaucher son ex-femme et elle touchait systématiquement un maximum d'heures supplémentaires”, nous déclarait à l'époque un soutien de David Kimelfeld. Un autre promettait qu'une “affaire à la Fillon allait sortir dans un journal national”. Dans les premières heures suivant les révélations du Canard enchaîné, l'entourage du président de la métropole s'est aussi montré très prolixe en détails, tout en jurant ne pas avoir joué le moindre rôle. Ce manque de discrétion, parfois accompagné d'une forme de jubilation, a rapidement été recadré. Depuis, il n'est plus question que de présomption d'innocence et de refus de commenter une affaire judiciaire en cours. “Gérard Collomb peut être très dangereux en ce moment. Il n'a plus rien à perdre”, redoute un soutien du président de la métropole.

Quant à la droite lyonnaise, elle assiste en spectateur réjoui à ce nouvel épisode de la guerre fratricide que se livrent Gérard Collomb et David Kimelfeld. Mercredi, Étienne Blanc et Pascal Blache ont préféré se tenir éloignés des déboires du premier et ils ont refusé de commenter l'affaire. Une hauteur de vue qui n'est pas dénuée de calcul politique. “Nous n'avons qu'à les regarder s'entretuer. Les Lyonnais apprécient Gérard Collomb. Je ne pense pas qu'ils auront une grande tendresse pour ceux qui l'ont trahi. Et puis il vaut mieux ne pas être sur la liste de ceux dont voudra se venger Gérard Collomb d'ici quelques mois”, admet un élu LR.

LREM prend ses distances

Mais l'entourage du maire de Lyon regarde surtout vers Paris au moment de pointer l'origine de cette boule puante. Ces derniers jours, de nombreux signaux témoignaient d'une forme de lâchage en règle de Gérard Collomb par La République en Marche. C'est en tout cas ainsi que les analysent une grande partie des soutiens du maire de Lyon. Christophe Castaner, le ministre de l'Intérieur, a fait un aller-retour express la semaine dernière pour recadrer Gérard Collomb qui avait révélé des détails sur l'auteur présumé de l'explosion de la rue Victor-Hugo. La composition de la commission nationale d'investiture de LREM a aussi courroucé les soutiens du maire de Lyon. Dominique Perben et Jean-Marie Girier en font partie et, pour des raisons différentes, ni l'un ni l'autre ne plaidera en faveur de Gérard Collomb. “On sent que l'Élysée envoie des messages à Collomb”, admet un adjoint au maire de Lyon. Les nuages s'amoncelaient. L'ouverture de l'enquête préliminaire du PNF intervient dans ce climat explosif et nourrit les interrogations de Gérard Collomb sur son timing. “Les révélations du Canard enchaîné et les perquisitions arrivent alors que l'enquête administrative diligentée par Gérard Collomb allait rendre ses conclusions”, note un conseiller métropolitain LREM. Mais Gérard Collomb est bien à l’origine du déclenchement de l'enquête. C'est le signalement, au titre de l'article 40, qu'il a effectué auprès du procureur de la République de Lyon en février 2019 qui a entraîné la saisine du PNF et par conséquent le déclenchement d'une enquête préliminaire.

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