Coquillettes
Coquillettes, lyon Croix-Rousse

La monofood à Lyon : effet de mode ou tendance de fond ?

Bugnes, pavlovas, coquillettes, madeleine, praluline, burger, gyoza, ramen... Les boutiques et restaurants hyper spécialisés se multiplient à Lyon.

Bugnes, c'est le nom d'une nouvelle petite boutique qui vient d'ouvrir dans le 1er arrondissement, à deux bains d'huile de la place Sathonay (et à deux pas de CHËF, spécialiste des "berliner kebap" un peu haut de gamme).

Bugnes. Deux syllabes. Un seul produit, et pas n'importe lequel,  puisque c'est seul dessert de Lyon dont la tradition s'est maintenue depuis au moins cinq siècles.

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Les grandes recettes lyonnaises : les bugnes

Depuis quelques années, dans le secteur de la restauration, les enseignes proposant un seul produit se multiplient. En vrac : Miss Madeleine (Foch), Coquillettes (Croix-Rousse), Pavlovas par Joël Maier (Célestins), Pralus (et sa praluline, plusieurs à Lyon), Les Merveilleux de Fred (Foch et Grenette), les bars à jus, à soupes, à salades (et à chats, mais c'est autre chose, on ne les mange pas), etc.

L'idée est simple : proposer un seul produit décliné sous toutes les formes. Une manière de se démarquer dans la jungle culinaire lyonnaise.

En 2022, Lyon (intra-muros) compte 1 769 restaurants traditionnels et 1628 établissements de restauration rapide.

L'interview de François Blouin, président de Food Service Vision, cabinet conseil leader en intelligence économique de la filière restauration, basé à Lyon.

Pour quelles raisons de plus en plus de personnes se lancent dans ce concept de monopoduit ?

Pour l’aspect hyper spécialisé et différenciant sur des produits qui interpellent, comme par exemple les bugnes ou les coquillettes par rapport aux pizzas, un produit déjà sur-représenté, et pour la perception d’une grande expertise qui rassure. Proposer un seul produit donne le sentiment de le maîtriser largement. On différencie cependant les monoconcepts salés qui s’inscrivent au cœur du repas (amone, tacos…) qui vont fonctionner seuls et répondre à la fonction de se nourrir, et les monoconcepts sucrés (bugnes...) qui vont fonctionner lorsqu’ils se trouvent en complément d’autres concepts (au sein d’un food court, un concept de donuts à côté d’un coffee shop).

"Le monoproduit offre un côté réassurant avec une offre très lisible."

  Qu'offre le monoproduit ? 

Au niveau de la production, le monoproduit est centré sur une expertise qui facilite la formation des équipes. Travaillé autour d’une base unique, il permet également la réduction du nombre de références utilisées et de matières premières à acheter. Cela permet aussi la négociation de gros auprès des fournisseurs - avec sans doute des économies d'échelles - pour des concepts qui fonctionnent et qui possèdent plusieurs points de vente. Auprès des consommateurs, le monoproduit offre un côté réassurant avec une offre très lisible. Ce qui répond aux attentes actuelles des consommateurs en quête de simplicité et de repères.

Effet de mode ou vraie tendance de fond alors ?
Ce qui relève de la tendance de fond c’est le fait que le marché du hors domicile se développe, que le métier se professionnalise. De plus en plus d’acteurs vont donc pouvoir se spécialiser sur une offre ou un produit particulier. La notion du monoconcept est pérenne (Pralus, Les Merveilleux de Fred) mais, au sein des monoconcepts, on observe un taux d’erreur élevé dû à la complexité de l’équation. Les monoconcepts vont être plus vulnérables aux retournements de tendances à la hausse des coûts aux ruptures. Par exemple, un concept qui propose une carte très courte uniquement composée de burgers, s’il ne propose pas une expérience, un service supérieur, sera plus à risque en cas de hausse de coûts face à une brasserie qui peut revoir sa carte l’adapter en changeant ses produits. 

"On peut s’interroger sur la lassitude : est-ce que le consommateur souhaitera revenir plusieurs fois pour consommer le même produit."

Quelles sont les limites du concept du monoproduit ?
On peut s’interroger sur la lassitude : est-ce que le consommateur souhaitera revenir plusieurs fois pour consommer le même produit. Certains concepts, couvrant une seule unité de besoin, nécessitent d’être intégrés à un ensemble d’offres complémentaires pour fonctionner. Un manque de flexibilité s’observe à différents niveaux : la rupture produit et le coût matière : si un ou plusieurs des ingrédients de base subit l’inflation, le restaurateur aura beaucoup moins d’alternatives pour contrer la hausse. Selon les chiffres de Food Service Vision, l'évolution des prix réels enregistrés de janvier à octobre 2022 sur certaines catégories est, en moyenne, de +42% en moyenne pour l'huile, de +354% à +80% pour le steak haché selon les segments, de +30% à + 50% selon les segments et de +24% pour le beurre.

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