Sabine Fourrier, directrice de la Maison de l'Orient et de la Méditerranée, qui fête ses 50 ans en 2025, est l'invitée de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Du 2 au 7 juillet ptochazin, à Lyon, se tiendra le 14e congrès international de l’International Congress on the Archaeology of the Ancient Near East (ICAANE). Organisé par la Maison de l'Orient et de la Méditerranée (MOM), notamment, il constitue un forum exceptionnel de dialogue et d'échanges scientifiques entre tous les collègues impliqués dans l'étude du Proche-Orient ancien.
La ville de Lyon et le Proche-Orient entretiennent un lien durable. Entre 170 et 200 apr. J.-C., saint Irénée, né en Turquie et nommé évêque de Lyon, fut accompagné d'un groupe de savants et de missionnaires qui apportèrent la bonne parole d'Orient, "source de tous les biens", selon Jean Pouilloux (fondateur de la MOM), dans son introduction au catalogue de l'exposition "Dix Années d'archéologie lyonnaise en Orient", qui eut lieu à Lyon en 1978. Ce lien n'a jamais été rompu.
Plus connue à l'étranger qu'en France et, notamment à Lyon, où elle a son siège, la MOM est un véritable pôle d'excellence, un "label" dans les universités et les services de patrimoine des pays dans lesquels elle intervient.
Directrice de recherche CNRS HiSoMA (Histoires et sources des mondes antiques), archéologue et spécialiste de l'histoire des royaumes chypriotes, Sabine Fourrier est lauréate de la médaille d'argent du CNRS 2023 (qui distingue des chercheurs et des chercheuses pour l’originalité, la qualité et l’importance de leurs travaux, reconnus sur le plan national et international).
Etudier le passé pour mieux comprendre le présent
"L’étude méthodique et pluridisciplinaire des mondes anciens représente un enjeu plus que jamais actuel dans un monde que fracturent des revendications
identitaires et une instrumentalisation du patrimoine archéologique et historique (pillé, détruit ou récupéré à des fins idéologiques et politiques), expliquait sa récemment sa directrice Sabine Fourrier, dans une lettre du CNRS spécialisée dans les sciences humaines. Cinquante après sa création, la MOM est clairement identifiée dans le paysage de la recherche, aussi bien en France qu’à l’étranger. Son rayonnement international, que nourrissent des collaborations fortes et anciennes avec les services archéologiques et les universités des pays hôtes, lui assure une grande visibilité."
La Maison de l'Orient et de la Méditerranée - MOM pour les intimes - traite notamment de l’égyptologie, et plus globalement des recherches sur tout le pourtour méditerranéen, et sur le sous continent indien, fait intervenir des personnels et étudiants impliqués dans des fouilles à Lyon, en France et à l’étranger, étudie la genèse de textes sacrés (accès aux archives du Vatican…), possède une bibliothèque de référence dans laquelle convergent des scientifiques étrangers, des découvertes sur comment notre civilisation s’est créée/organisée, des premiers groupes d’humains du Néolithique aux sociétés organisées du Moyen-Age. Côté académique, son rayonnement est international.
Cinquantenaire de la MOM - le programme des festivités
21 mai 18h | Conférence Pouilloux Sébastien Gondet Les centres de pouvoir achéménides et leur territoire : 25 années de recherches archéologiques irano-françaises en Iran Amphithéâtre de la MILC |
25 juin 18h | Conférence Pouilloux Bernard Meunier Les conciles chrétiens anciens étaient-ils une expérience de démocratie ? Amphithéâtre de la MILC |
18 septembre 12h30 | Inauguration de l’exposition Au travail : cinquante ans de recherches à la MOM Au fil des objets et des archives, le long d’un parcours en cinq étapes, suivez l’évolution des méthodes de recherche, d’hier à aujourd’hui. MOM - Hall de la bibliothèque |
24 septembre 18h | Soirée mécénat au musée des Beaux-Arts Organisée par l’Association des Amis de la Maison de l’Orient Aidez-nous à financer les projets scientifiques et culturels de la MOM et de ses laboratoires. Musée des Beaux-Arts - place des Terreaux |
26 novembre 17h | Soirée de clôture de l’anniversaire Présentation de l’ouvrage anniversaire édité par MOM Éditions, suivie d’un concert organisé par les membres de la MOM et de ses laboratoires. Musée des Moulages - 87 cours Gambetta |
La retranscription intégrale de l'entretien avec Sabine Fourrier
Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 minutes chrono. Nous accueillons aujourd'hui Sabine Fourrier, bonjour.
Bonjour.
Sabine Fourrier, vous êtes directrice de la Maison de l'Orient et de la Méditerranée qui fête cette année ses 50 ans. Vous êtes archéologue, spécialiste de l'histoire des royaumes chypriotes, et vous avez été lauréate de la médaille d'argent du CNRS 2023, qui distingue les chercheurs et les chercheuses pour l'originalité, la qualité et l'importance de leurs travaux. Alors cette Maison de l'Orient et de la Méditerranée, MOM pour les membres, c'est une fédération de recherche qui a été créée en 1975 par Jean Pouilloux. Fédération de recherche, c'était quoi le but ?
C'est exactement ça. Fédération de recherche, c'est regrouper des laboratoires qui étaient dispersés, qui travaillent sur le même domaine, c'est-à-dire les mondes anciens, dans ce milieu qu’est la Méditerranée, essentiellement la Méditerranée orientale, et leur proposer des services communs : une bibliothèque, des services informatiques, des publications.
Alors justement, cette fédération de recherche est placée sous la tutelle de l'université Lyon 2 et du CNRS...
Pas seulement. On a sept tutelles. Il y a le CNRS, cinq tutelles universitaires et l'ENS de Lyon. Donc pas uniquement Lyon 2.
OK. Finalement, l'étude des mondes anciens, on est sur la Méditerranée, donc Proche et Moyen-Orient... La question peut sembler simple, mais elle va apporter une réponse forcément intéressante : à quoi sert l'étude des mondes anciens ?
C'est comme l'histoire, cela sert à mieux comprendre le présent. Étudier les sociétés anciennes sous toutes leurs formes permet d’éclairer le présent, aussi bien sur le terrain avec les vestiges matériels par l'archéologie que par l'histoire, les textes.
Oui, archéologie, bioarchéologie, géoarchéologie, archéométrie, géographie, géophysique, histoire, linguistique, philologie, patristique... tout un champ de disciplines qui servent à mieux connaître ce qui s'est passé jadis.
Oui, parce que la difficulté, quand on travaille sur des périodes aussi anciennes, c’est qu’on a des témoignages morcelés. Le seul moyen d’essayer de reconstituer ce puzzle, c’est de croiser les disciplines, de faire du pluridisciplinaire.
C’est ça. Aujourd’hui, vous travaillez... finalement, quels sont les axes stratégiques de la Maison de l’Orient et de la Méditerranée ?
Alors ces axes changent régulièrement en fonction de l’évolution de la recherche et des problématiques qui se posent. Actuellement, il y en a différents qui sont inscrits sur ce quinquennat, car nous travaillons sous forme de contrat avec l’État sur cinq ans. Il y en a un autour des données de la recherche, un thème vraiment important : comment les préserver, les partager, les faire connaître. Il y a aussi un programme appelé Labo Junior qui donne la possibilité à des jeunes chercheurs, doctorants et post-doctorants, de constituer un laboratoire pendant deux ans, comme s’ils étaient un vrai labo de recherche, sur un thème choisi, avec un accompagnement. Il y a un axe autour de l’eau, un autre autour des sciences et sociétés, un autre encore sur les villes en construction...
C’est un champ quand même très vaste.
Qui est large. Très large.
Est-ce que la Maison de l’Orient et de la Méditerranée, on peut dire que c’est un pôle d’excellence lyonnais, mais a-t-elle un rang international ?
Bien sûr, et c’est presque un paradoxe : elle est peut-être plus connue à l’international qu’en local. Je pense que les Lyonnais la connaissent moins que nos collègues étrangers.
J’ai même vu qu’elle était devenue un label dans les universités, les services de patrimoine des pays dans lesquels elle intervient.
Oui, on arrive, on dit "je suis de la MOM", on est connu tout de suite. Bien sûr, car ce sont aussi 50 ans de terrain, de relations nouées avec des universitaires, des services d’antiquité, et des personnes dont certaines ont été formées par nous.
Et alors, pour ces 50 ans, plusieurs événements ont déjà commencé. Il va y avoir notamment des conférences. J’en ai vu une le 21 mai prochain : Les centres de pouvoir achéménides et leur territoire. Les conciles chrétiens anciens étaient-ils une expérience de démocratie ? Il va aussi y avoir... qu’est-ce qu’il y aura d’autre ? Des expositions ?
Oui, il y a une exposition qui va ouvrir le 18 septembre à la Maison de l’Orient. Elle portera sur nos méthodes de terrain et sur la façon dont elles ont changé en 50 ans. Il y aura aussi, en collaboration avec l’Association des Amis de la Maison de l’Orient, une soirée de mécénat au Musée des Beaux-Arts, dans ce très beau lieu, le 24 septembre.
J’ai vu qu’il y aura aussi une grande braderie de livres. Elle a déjà eu lieu, donc si vous l’avez ratée, c’est dommage. En tout cas, il y aura encore beaucoup d’autres choses qui vont se dérouler. Comme on le disait, à partir du 21 mai jusqu’au 24 septembre, avec la fameuse soirée de mécénat au Musée des Beaux-Arts. Et moi, je conseille à tout le monde d’aller voir cette exposition, parce qu’effectivement, 50 ans de recherche autour de ces thématiques, et ces méthodes ont énormément évolué. L’émission touche à sa fin, nous avons effleuré le sujet, mais en tout cas, merci d’être venue nous le présenter. Pour plus d’informations : www.lyoncapitale.fr. À très bientôt. Merci beaucoup.
Merci à vous. Au revoir.