A l’intérieur © Léonore Le Clef

Ciné et danse : "À l'intérieur", les chemins de la danse

Projeté au Comœdia, le superbe film de Claire Juge, À l’intérieur, retrace l’aventure chorégraphique de soignants et de personnes souffrant de troubles psychiques, portée par le Centre hospitalier du Vinatier et la Maison de la danse.

Proposer à des soignants et des personnes souffrant de troubles psychiques de participer à un projet de création collective où chacun a sa place sans hiérarchie de statut et qui œuvre pour une dé-stigmatisation, une valorisation de soi et un mieux-être. Tel est l’objectif du projet “Tous ces autres en soi” initié par Emmanuel Monneron, psychiatre au Centre hospitalier du Vinatier, soutenu par la fondation Apicil et mené par la chorégraphe québécoise Ariane Boulet, qui développe à Montréal des visites dansées auprès de personnes en perte d’autonomie ou en fin de vie. Ce projet suit celui que le chorégraphe Sébastien Ly avait réalisé avec beaucoup de finesse en 2019, devenu sujet d’un film (Des Habitants de Jean-Camille Goimard) projeté devant une salle pleine à l’institut Lumière. C’est au Comœdia que vous pourrez découvrir À l’intérieur, le film de Claire Juge qui retrace l’aventure de cette communauté plongée dans le processus de création. Au cours d’ateliers qui précèdent le spectacle montré en juin dernier à la Maison de la danse, elle capte les découvertes et les expressions du corps auxquelles chacun se confronte, là où le lâcher-prise et la traversée de l’espace évoquent pour certains un cheminement personnel difficile, les confrontant à la réalité de leurs troubles, les montrant apaisés par ce qu’ils sont capables de faire, tous relevés par la présence de l’autre et la solidarité autour du travail corporel. “On est dans notre corps en sentant le monde, leur dit Ariane Boulet. On est dans notre corps en agissant sur le monde, tout passe à travers lui. C’est par lui qu’on connaît, qu’on apprend, qu’on se construit, qu’on développe notre intelligence. Il faut comprendre que nous sommes un corps et non pas que nous avons un corps !”

Un film très émouvant

Claire Juge pose son regard sur ce qu’ils sont, leurs paroles, nous offrant des prises de vue passionnantes sur un foisonnement de gestes, nous donnant à voir aussi une consultation étonnante entre Dina et le psychiatre, où il est question de médicaments et de danse. Depuis dix ans, elle se bat contre les conséquences d’un burn-out et rêve de créer un refuge pour chiens séniors : “J’aime bien être en dehors de mon corps,dit-elle, car je me sens angoissée à l’intérieur et quand je danse je n’ai plus d’angoisses, je m’envole en fait, comme si mon âme était en haut et me voyait danser.” Et Elsa de rajouter plus loin : Si je n’ai pas de corps, je n’ai pas de prise sur le monde autour de moi. Mon corps c’est ce qui me rend présente au monde, ce qui fait que les autres me voient.” Alors qu’ils sont inquiets de ne pas savoir bien faire pour le spectacle, Ariane Boulet les rassure car il n’y a pas une seule façon de faire et la question du rapport au corps est propre à chacun. Travaillant avec l’improvisation, elle n’impose pas de mouvements, elle cherche juste à leur donner les bons outils pour qu’ils se donnent la permission de faire des choix car, dit-elle, tout est déjà en eux”. Superbement filmé, À l’intérieur nous met en présence de personnes qui, à l’instar d’artistes professionnels, questionnent l’écriture de la danse par des chemins de traverse dont la maladie fait partie, en prise avec leurs vécus et leurs émotions…


À l’intérieur - Claire Juge – Le 13 avril à 20 h, au Comœdia

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