François-Xavier Pénicaud est l'invité de l'Autre Direct
© Tim Douet

Tribune : “Pourquoi le Modem doit quitter la majorité de Laurent Wauquiez”

Tribune libre publiée par François-Xavier Penicaud, conseiller régional, coordinateur régional du MoDem Auvergne-Rhône-Alpes.

C’est la proposition que je ferai à mes collègues, membres du Groupe « MoDem & Indépendants » lors de notre réunion de groupe ce jeudi 21 mars.

Lors des élections régionales de 2015, nous, centristes, avions conclu un accord de principes et de programme avec Laurent Wauquiez, formalisé au travers d’un manifeste puis d’un pacte de majorité. Bien que sur des lignes politiques différentes, chacun avait alors fait un pas vers l’autre pour que des engagements équilibrés puissent être trouvés. Nous avions réussi à mettre nos divergences nationales et partisanes de côté, construisant une complémentarité au service d’une même boussole : l’intérêt général et territorial, certains que la culture du dialogue était nécessaire à l’accomplissement des desseins de cette grande Région naissante.

Nous, Démocrates, nous étions alors engagés à nous positionner comme des garants de ce compromis

au sein de la future majorité régionale. Dans ces conditions les électeurs de notre Région ont soutenu la coalition de projets que nous proposions.

Un des piliers de cet accord, consistait à ce qu’une cloison étanche soit installée entre la politique régionale et la politique nationale. Notre territoire ne devait en aucun cas être l’otage des positionnements, postures et responsabilités nationales des uns et des autres. Une gouvernance partagée, devait en découler, appuyée sur les deux jambes de la majorité dont on s’assurerait que chacune soit, en toute occasion, musclée et confortée, pour que le corps de la majorité ne penche à l’extrême d’aucun côté.

Cette promesse n’est plus tenue.

Ce constat a atteint son paroxysme avec la décision de l’exécutif régional de faire échouer la signature d’un contrat d’objectifs avec le Gouvernement pour la mise en place du Plan d’Investissement sur les Compétences. Ce choix est fait au détriment des personnes les plus fragiles face à l’emploi, les moins qualifiés, les plus en difficulté.

750 millions d’Euros. C’est la somme que l’Etat proposait de mettre à disposition de la Région Auvergne- Rhône-Alpes pour mettre en place, sur un peu plus de 3 ans, un plan de formation ambitieux, convergent avec les objectifs que nous nous étions fixés en 2015 de favoriser des formations permettant une mise à l’emploi la plus rapide possible. Dès la première année, nous avions alertés nos partenaires sur certains défauts de la mise en œuvre de notre compétence, conduisant à la formalisation d’un amendement au budget 2018. Il avait été balayé sans discussion par nos partenaires. J’avais alors manifesté notre désaccord en refusant de voter le budget primitif. En décembre, lors des discussions sur ce dossier du PIC, le Président s’était engagé à associer nos élus et parlementaires afin de favoriser une convergence des positions Etat- Région. Il n’en a rien été.

Nous avons été écartés de ces discussions qui ont été conduites à l’échec pour des raisons qui ne semblent pas dictées par l’intérêt général.

Vice-Président de la Commission « Formation Continue & Apprentissage » du Conseil Régional, ne pouvant plus être solidaire des décisions successives qui ont conduit à cet échec, j’adresserai dès demain, à Laurent WAUQUIEZ, ma démission de cette fonction.

Ce n’est pas, loin s’en faut, le seul incident politique auquel nous ayons été confrontés. Au fil des derniers mois nous avons été obligés de prendre acte du fait que nos partenaires ne souhaitaient plus jouer pleinement le jeu du contrat de mandature qui nous liait.

Pour l’exemple, le 28 mars prochain, le Schéma Régional d'Aménagement, de Développement Durable et d'Egalité des Territoires (SRADDET), devra être adopté par l’Assemblée Régionale. Si nombre de Maires, Conseillers Départementaux, Présidents d’EPCI, se sont vu associés à sa réflexion et rédaction, ayant copie des documents de travail, les élus régionaux ont été mis devant le fait accompli. Malgré nos demandes, il n’a pas été possible, documents prospectifs en main, d’avoir un temps de travail commun au sein de la majorité. Il nous est aujourd’hui juste demander de le voter.

Un autre pilier de l’accord qui nous liait à Laurent Wauquiez, consistait en la liberté d’organisation de nos élus et de notre groupe, condition essentielle pour exercer notre rôle de garants au sein de cette majorité. Alors que dire lorsque le Président de Région se sente légitimité et autorité pour menacer un groupe de sa majorité – le nôtre – de ne pas signer les contrats de ses collaborateurs de Groupe Politique si ceux-là ne sont pas choisi selon les désidératas du groupe LR ou du Président de Région ? Et que dire quand de la même manière il est demandé à un Vice-Président de Région issu de notre groupe que ses déplacements sur le terrain soient conditionnés à une autorisation du cabinet du Président ?

Il ne s’agit pas de jeter le Wauquiez avec l’eau de la majorité. Nous ne renions pas certaines politiques majeures que nous avons soutenues comme, par exemple, faire des économies de fonctionnement visant à favoriser le désendettement et le développement d’une capacité d’épargne et d’investissement de notre collectivité. Nous devrons continuer à la soutenir. Cela nous a permis d’engager rénovation des lignes ferroviaires et modernisation de nos lycées. Cela nous a aussi permis de soutenir un programme environnemental ambitieux, que nous avons largement poussé. Nous pouvons contester l’agressivité de la méthode de réduction des dépenses de fonctionnement, et sur le cas de la formation, le fait de l’avoir fait au détriment de la qualité de nos missions, mais nous ne renions pas la direction.

Chaque fois que ses propositions iront dans le sens des engagements pris ensemble auprès des électeurs, du pacte de majorité que nous avions signé, chaque fois qu’il ira dans le sens de l’intérêt général et du développement de nos territoires, sans les opposer mais en les réconciliant, l’exécutif régional devra pouvoir nous trouver à ses côtés.

Nous devons rester solidaires des engagements pris auprès des électeurs, mais, n’étant plus en mesure d’en être les garants de l’intérieur de la majorité, nous devons être libres d’en apprécier publiquement la qualité de la mise en œuvre.

Nos divergences nationales et européennes, de plus en plus évidentes, laissaient présager cette rupture à nombre d’observateurs. Nous ne souhaitions pas en arriver à cette extrémité. Un dialogue de majorité plus renforcé pouvait ne pas conduire à cet état de fait. A notre corps défendant, nos partenaires de la majorité se sont révélés de moins en moins enclins à le permettre, n’acceptant pas, pour certains, une évolution du paysage en leur défaveur, constatant une rupture du lien de confiance entre les citoyens et leur parti. Mais en s’enfermant dans des postures ils prennent le risque de justifier cette perte de confiance entre les citoyens et leurs représentants.

Nous souhaitons garder un langage de vérité.

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