Pierre Botton
Pierre Botton @Guillaume Lamy

"La prison est une zone de non-droit"

A la suite de sa deuxième condamnation à deux ans de prison pour abus de biens sociaux, Pierre Botton, ex-gendre du maire de Lyon Michel Noir, raconte les prisons en 2022. Sidérant.

Pierre Botton. Un nom qui résonne comme le stigmate de l'un des plus gros scandales politique et financier françaises du milieu des années 90.

L'homme d'affaires, alors gendre et directeur de campagne de l'ancien ministre et maire de Lyon Michel Noir, avait été impliqué dans une retentissante affaire aux côtés de l'homme politique. Il avait été condamné en appel pour abus de biens sociaux.

Vingt-cinq après sa première incarcération, Pierre Botton est à nouveau reconnu coupable pour abus de biens sociaux. Il sera libéré le 12 juin 2022. Soit, au total 1332 jours en prison. Il vient de publier QB4 (éd. Robert Laffont) dans lequel il raconte l'envers du décor des prisons françaises, entre "poids de l'argent de la drogue", "corruption", "ultra violence" et "omniprésence d'un islam radical".


Retranscription intégrale de l'entretien
avec Pierre Botton

Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 Minutes Chrono. Nous recevons aujourd'hui Pierre Botton. Bonjour.

Bonjour.

Pierre Botton, vous êtes un ancien homme d'affaires lyonnais. Vous avez été incarcéré à deux reprises pour abus de biens sociaux : la première fois dans le cadre d'une affaire qui a secoué le monde politique, les médias ont appelé "l'affaire Noir-Botton", qui impliquait le maire de Lyon Michel Noir, dont vous avez été le gendre; et puis la seconde fois, vous avez été incarcéré, et libéré le 12 juin 2022. Aujourd'hui, on vous reçoit parce que vous sortez vous publiez QB4, le nom du quartier de la prison de la Santé où vous avez été incarcéré. "Ce qui se passe en prison est pire que ce que vous croyez". Entre vos deux incarcérations 1996 et 2020 qu'est-ce qui a changé et comment ça a changé ?

La population pénale, c'est clair, la violence : la prison est clairement maintenant un espace de non-droit. C'est-à-dire que vous avez de la drogue à profusion des téléphones - on en sort 40 000 par an. C'est aussi l'impact de la religion, d'une certaine religion : ce n'est pas ce que j'appelle l'islam en fait, c'est une religion qui est pratiquée par des islams autoproclamés qui pratiquent un islam qui n'a rien à voir avec l'islam tel qu'il est pratiqué par des millions de français.

C'est un islam radical donc.

Radical, qui valide la délinquance c'est-à-dire qui valide la délinquance au nom de dire "voilà regarde comment la République nous traite, regarde ce pays il ne nous accueille pas donc vas-y tu peux tout faire de toute façon". Allah, leur Allah, l'Allah dont ils parlent eux, qui n'est pas je répète l'Allah des musulmans, ça n'a rien à voir d'ailleurs - il pourrait avoir un autre nom - il valide tout.

Donc il y a effectivement cette omniprésence de cet islam radical et vous le racontez dans le livre, c'est que vous avez été clairement menacés sérieusement quand vous avez dénoncé à l'administration des appels à prière à 4h30 du matin et à 20h. Ça ça existe en France dans les prisons ?

Oui, alors c'est une des très grandes différences avec il y a 25 ans. Lors de ma première incarcération, je ne me suis jamais senti en danger, jamais, et là, lors de ma seconde incarcération, je me suis senti en danger une fois par semaine je raconte cette anecdote qui est un petit peu longue il faut la lire dans le livre mais en fait il y a un appel à le prière je trouve ça absolument incroyable donc j'essaye de savoir qui c'est. Puis je l'écris à un intervenant qui est Henri Lachmann, l'ancien patron de Schneider Electric. Mon courrier était très surveillé, je suis appelé. On me dit "monsieur Botton, c'est quoi cette histoire d'appels à la prière ?" Je lui dis "parce que vous ne les avez pas vu vous ? Vous ne les avez pas entendus?" C'était les renseignements pénitentiaires qui me faisaient croire qu'ils ne savaient pas qu'il y avait des appels à la prière à la prison alors que tous les riverains de la prison de la santé le savaient.

Vous dites aussi quelque chose : au-delà du fait que la prison soit "une zone de droit", vous dites qu'aujourd'hui la hiérarchie pénitentiaire et on va dire politique au-dessus achète la paix sociale en prison.

C'est juste une évidence, c'est-à-dire qu'à partir du moment où vous êtes en vas clos, là on est dans un studio, si dans ce studio il y avait de la drogue, imaginons je vous fais venir des chiens, ils vont la trouver la drogue. Il n'y a jamais un chien qui débarque en prison. Donc on laisse circuler ça de telle façon à ce qu'il n'y ait pas de problème parce qu'un détenu shooté aux médicaments ou à la drogue est quelqu'un qui fera moins de problèmes. C'est ça qui créera moins de problèmes mais le problème c'est qu'avec la drogue vous faites rentrer l'argent de la drogue et donc la corruption.

Et aujourd'hui il y a de la corruption dans les prisons françaises ?

C'est énorme je raconte cette petite anecdote où un gradé me dit "vous savez monsieur Botton, ici, de sont les détenus qui protègent les surveillants". Alors je lui dis "c'est marrant, vous vous êtes trompé. Vous avez dit que c'était les détenus qui protégeaient les surveillants". Il a dit "non, non, je ne me suis pas trompé c'est la vérité".

Vous êtes en train de dire, vous avez passé deux ans en prison lors de votre deuxième incarcération, que 1/ les prisons sont des zones de non-droit, que 2/ la hiérarchie achète la paix sociale et que 3/ cesont les détenus qui gèrent les prisons de France ?

C'est les détenus qui sont les patrons, alors pas qui gèrent les prisons de France, mais c'est si vous voulez très honnêtemen,t aujourd'hui, compte tenu de la surpopulation, compte tenu également, je répète, de l'argent de la drogue qui rentre, les surveillants ne peuvent pas s'opposer.

Là on a l'impression que vous nous parlez de prisons mexicaines.

Non, non c'est la France, c'est la France. Mais vous savez évidemment j'ai la possibilité de le dire dans les médias mais les gars viennent d'hyler à l'angle de la prison de la santé c'est-à-dire qu'il y a des caméras de partout il y a de la police qui arrive pour vous dire qu'ils n'en ont plus rien à faire ils viennent dealer à l'angle de la prison de la santé.

Oui mais là on est dehors à la rigueur.

On est dehors on est à trois mètres de l'entrée. Non mais ça veut dire quelque chose de fort si vous voulez. Vraiment ça veut dire quelque chose de fort. Et moi j'ai assisté, c'est pas un rapport d'experts, c'est un livre vécu, de choses vécues, il y a très peu de temps.

J'avais quand même une dernière question parce que le temps passe c'est que donc là on a la drogue qui arrive, les portables qui arrivent, les télés, les écrans plasma, ce que vous voulez, vous racontez dans le livre, les armes c'est votre grosse inquiétude.

À mon avis, les armes, c'est la prochaine étape, c'est-à-dire que j'ai fait un reportage pour Canal dans lequel on a vu des drones livrer de la drogue et je pense que la prochaine étape ça sera des armes livrées par un drone.

Ce sera le mot de la fin. Merci.

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