La Mouette © Simon Gosselin

Théâtre : "La Mouette" aux Célestins, Cyril Teste au plus près des fêlures humaines

Dans une adaptation de La Mouette, pièce phare d'Anton Tchekhov, aux Célestins, Cyril Teste réussit à capter l'indicible. À ne pas rater.

"Est-ce que j’ai l’air de mentir ?". Sur un écran géant, un visage sur lequel coulent les larmes d’Arkadina. Nous sommes au théâtre mais seule une caméra peut nous permettre de fixer cet instant. Un plan rapproché, insistant, presque impudique.

Grâce à ce dispositif cinématographique – un exercice auquel il est rompu – Cyril Teste tient ses personnages à bout portant. Comme pour mieux sonder l’âme de chacun des protagonistes de La Mouette, comédie de mœurs écrite par Tchekhov au crépuscule du XIXe siècle, le metteur en scène choisit de coller au plus près de ses personnages, pour toucher à l’indicible.

C’est ainsi que la caméra suit les tentatives de Konstantin, jeune dramaturge en quête d’une reconnaissance impossible. Celle de sa mère, Arkadina, femme égocentrée et indifférente à son égard.

Comment dire "l’amour fou d’un fils pour une mère"  s’interroge Cyril Teste. Le metteur en scène et son double tchékhovien ont alors en commun cet inexprimable, que seul le théâtre - ou l’art de manière plus général - sait représenter.


Une œuvre teintée d’amertume et de désillusions


La pièce s’ouvre d’ailleurs sur une mise en abyme, sous la forme d’une représentation théâtrale, sorte de happening hypnotique jouée dans le domaine familial au bord d’un lac.

Konstantin a écrit cette pièce pour Nina, jeune actrice qu’il aime. Mais l’on comprend que c’est autant pour sa mère, Arkadina, actrice renommée, dont il aimerait qu’elle reconnaisse sa valeur.

Par un jeu de renversement, Nina s’enfuit avec Trigorine, écrivain célèbre et amant d’Arkadina.

© Simon Gosselin

Dans cet effet de miroir générationnel, entre jeunes aspirants à la célébrité et artistes reconnus mais désabusés, Tchekhov livre une œuvre teintée d’amertume et de désillusions, mais qui ne s’autorise jamais à exprimer de manière crue ou excessive – même dans son dénouement tragique–  la violence des blessures intérieures.

De ces émotions sourdes et contenues, Cyril Teste réussit à en capter les vibrations au plus près, révélant avec sa caméra les tourments de chacun, grâce à de remarquables interprètes et une mise en scène qui happent littéralement le spectateur.


La Mouette, jusqu’au 12 mars aux Célestins


 

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