Oncle Vania : la mise en scène comme un corset

'Il m'aura fallu vingt ans d'exercice de la mise en scène pour que j'ose m'y confronter. Et encore ce sont mes acteurs qui m'y ont poussée...', explique la metteur en scène et directrice du théâtre des Célestins. Une telle pression explique peut-être la prévention manifeste avec laquelle elle aborde ce spectacle cruel de la résignation, du flétrissement d'un homme.

Oncle Vania, c'est Ivan, l'homme à tout faire et admirateur déçu de son beau-frère, l'orgueilleux professeur Sérébriakov, sommité intellectuelle typique de la Russie des années 1860, dont l'imposture est démasquée dès le début de la pièce. Celui-ci débarque un été dans la propriété familiale avec sa nouvelle épouse, Eléna, beauté vaine, évanescente, pour mieux la mettre sans dessus dessous. Vania et son seul ami, Astrov, un médecin misanthrope, hystérique des forêts environnantes, se disputent l'air de rien les faveurs d'Elena, quand Sonia, la fille 'pas belle' de Sérébriakov, rongée par la charge du domaine, s'abîme dans la solitude, pas aimée du bon docteur. De cet écheveau d'espoirs déçus et d'émotions bafouées, Claudia Stavisky a fait un exercice de suggestion. Qui fonctionne dans les décors. Beaucoup moins dans la définition des personnages. Aussi bien dans certains costumes que la direction contrainte des acteurs, Stavisky dessine un 'éternel tchekhovien' par trop naturaliste. Un carcan où tout le monde n'est pas logé à la même enseigne. La bride est sévèrement tenue pour Didier Bénureau. Lui qui a remplacé Jean-Pierre Bacri au pied levé dans le rôle-titre ne peut exprimer l'amertume de Vania qu'en surface. Peu de révolte, juste de la crispation. Philippe Torreton, par contre, campe Astrov dans son registre hâbleur habituel, pas séduisant pour un sou. Et c'est toute la distribution qui alors hésite, répertoire d'images plutôt que véritable incarnation d'êtres à la fois mornes et insensés, passant à côté du chaos de ces 'scènes de vie à la campagne'.

Christophe Jacquet - (Photo : Christian Ganet)

Au Théâtre des Célestins, Lyon 2è. Jusqu'au 26 juin. www.celestins-lyon.org

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